Trois personnes dont un Américain ont été tuées lors de violents
heurts vendredi en Egypte entre partisans et opposants du président
Mohamed Morsi à l’occasion de manifestations rivales qui ont rassemblé
des dizaines de milliers de personnes à travers le pays.
Un an après la prise de fonctions de M. Morsi, premier président
islamiste et civil d’Egypte, ces rassemblements rivaux témoignent des
divisions croissantes dans le pays et les accrochages font craindre une
propagation des troubles.
Les Frères musulmans, la confrérie dont est issu M. Morsi, ont averti
l’opposition qu’ils ne permettraient pas un "coup d’Etat" contre le
président, à deux jours d’une protestation massive attendue dimanche
pour réclamer une présidentielle anticipée.
Malgré le déploiement policier et de l’armée pour protéger les
installations vitales, de violents heurts ont éclaté entre pro et
anti-Morsi à Alexandrie, deuxième ville du pays, où un Egyptien et un
Américain ont été tués, selon des médias officiels et des sources
médicales.
Vendredi soir, les Etats-Unis ont confirmé la mort d’un de leurs
ressortissants. "Nous pouvons confirmer qu’un citoyen américain a été
tué à Alexandrie, en Egypte", a indiqué le département d’Etat dans un
communiqué.
Selon le chef de la sécurité à Alexandrie (nord), Amine Ezzedine, le
jeune homme, qui travaillait au centre culturel américain d’Alexandrie,
"prenait des photos" quand il a été tué dans les heurts.
Des sources au ministère de la Santé et de sécurité ont affirmé que
l’Américain avait été poignardé. Mais une source médicale a dit qu’il
avait été tué par des "tirs à la chevrotine".
Le département d’Etat a également annoncé le départ d’une partie de ses
agents diplomatiques et consulaires d’Egypte "en raison des troubles
politiques et sociaux qui s’y déroulent", dans un communiqué publié à
Washington.
Par ailleurs, dans la ville de Port-Saïd, sur le canal de Suez, un
journaliste égyptien a été tué et plusieurs autres personnes blessées
lorsque des inconnus ont lancé un petit engin explosif sur des
manifestants anti-Morsi, ont indiqué un responsable des services de
sécurité et plusieurs témoins.
Ces trois décès portent à sept le nombre de personnes tuées depuis mercredi lors des violences dans le pays.
Des heurts entre pro et anti-Morsi ont également éclaté en soirée dans
les provinces de Daqahliya et Beheira, dans le Delta du Nil (nord),
selon des responsables qui ont fait état de 130 blessés à travers le
pays.
Les locaux du siège du Parti de la liberté et de la justice (PLJ),
vitrine politique des Frères musulmans, ont été en outre incendiés à
Alexandrie, de même qu’à Aga, dans la province de Daqahliya.
A l’appel des mouvements islamistes, des dizaines de milliers de
personnes se sont rassemblées devant la mosquée Rabaa al-Adawiya de Nasr
City, un faubourg du Caire, et ont promis d’y rester pour défendre "la
légitimité (de l’élection de M. Morsi)" qui est "une ligne rouge".
Dans l’autre camp, des milliers de manifestants anti-Morsi défilaient
sous des drapeaux égyptiens et au cri de "Dégage", sur l’emblématique
place Tahrir du Caire, ainsi que dans le delta du Nil et à Port-Saïd.
L’opposition et le mouvement populaire Tamarrod (rébellion, en arabe)
ont appelé à manifester dimanche pour demander le départ de M. Morsi.
Tamarrod a dit avoir réuni 15 millions de signatures pour une présidentielle anticipée.
En prévision de cette mobilisation, des entreprises ont annoncé qu’elles
seraient fermées dimanche, journée qui marque le 1er anniversaire de
l’investiture de M. Morsi et le début de la semaine en Egypte.
Face aux tensions croissantes, le ministre de la Défense Abdel Fattah
Al-Sissi a prévenu il y a quelques jours que l’armée interviendrait en
cas de violences.
Amnesty International a appelé les autorités égyptiennes à la retenue.
"Etant donné leurs antécédents en matière d’encadrement policier des
manifestations, il est absolument impératif que les autorités
égyptiennes donnent des instructions très claires aux forces de sécurité
pour qu’elles protègent la liberté de rassemblement des manifestants,
et pour qu’elles s’abstiennent de tout recours à la force excessif ou
inutile", plaide l’organisation de défense des droits de l’homme dans un
communiqué.
L’armée avait pris les rênes de l’exécutif à l’issue de la révolte de
janvier/février 2011, qui avait chassé du pouvoir le président Hosni
Moubarak, et jusqu’à la prise de fonctions de M. Morsi.
Les détracteurs de M. Morsi l’accusent d’accaparer le pouvoir, de ne pas
s’atteler aux revendications démocratiques qui avaient déclenché la
révolte de 2011 et de ne pas résoudre une situation économique marquée
par le chômage et l’inflation croissants.
Les pro-Morsi mettent, eux, en avant son statut de premier président élu
démocratiquement en Egypte et arguent que difficultés économiques et
tensions religieuses affectaient déjà le pays avant son arrivée au
pouvoir. Ils affirment aussi qu’il épure les institutions corrompues.
(29-06-2013)
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