jeudi 4 juillet 2013

Égypte : Tahrir défie Morsi

Des foules de partisans et d’opposants au président Mohamed Morsi se massaient mercredi à travers l’Égypte avant l’expiration à 16 heures GMT d’un ultimatum de l’armée le menaçant d’imposer sa propre "feuille de route" s’il persiste à rester au pouvoir. L’armée était engagée entre-temps dans d’intenses tractations sur cette "feuille de route" avec l’opposition et des responsables religieux, selon une source militaire. Les représentants des partis islamistes, dont celui de M. Morsi, ont été invités, mais ne sont pas venus. Les militaires ont annoncé qu’ils publieraient un communiqué après l’expiration de l’ultimatum sans toutefois avancer d’heure précise, au moment où le pays traverse sa plus grave crise politique depuis la chute du régime de Hosni Moubarak en février 2011.
Mohamed Morsi, accusé par ses détracteurs d’accaparer le pouvoir au profit des Frères musulmans, a de nouveau martelé mardi qu’il ne quitterait pas le pouvoir, faisant valoir sa "légitimité" gagnée à l’issue de la première présidentielle démocratique de l’histoire du pays, il y a un an. Lundi, l’armée lui a donné 48 heures pour "satisfaire les revendications du peuple", dont une partie manifeste par des dizaines de milliers depuis dimanche pour appeler à son départ. Alors que des violences, notamment lors de heurts entre pro et anti-Morsi, ont déjà fait 47 morts depuis une semaine, le ministère de l’Intérieur a affirmé qu’il répondrait "fermement" à toute violence.
Sur l’emblématique place Tahrir, des milliers de manifestants étaient rassemblés dans l’après-midi scandant "Dégage !" à l’adresse de Mohamed Morsi. "Il a répété au moins 1 000 fois le mot ’légitimité’ comme si nous n’existions pas. Sa légitimité, il la tient du peuple qui aujourd’hui manifeste partout contre lui", a déclaré Rouaya, 19 ans, une jeune manifestante voilée rejetant le discours de Mohamed Morsi. Ailleurs au Caire, des milliers de pro-Morsi étaient toujours massés sur la place Rabaa al-Adaouiya, au Caire. Les rassemblements anti-Morsi commençaient également à se former dans d’autres villes, dont Alexandrie (nord) et Port-Saïd, sur le canal de Suez. Mardi, 16 personnes ont péri dans une attaque contre un rassemblement d’islamistes pro-Morsi près de l’université du Caire, selon le ministère de la Santé. Sept autres personnes ont été tuées lors d’affrontements ailleurs dans la capitale.
Près d’une centaine d’agressions sexuelles ont par ailleurs été commises sur la place Tahrir et ses environs au Caire en quelques jours, en marge des manifestations anti-Morsi, a rapporté Human Rights Watch (HRW). Lors d’intenses tractations, le chef de l’armée, Abdel Fattah al-Sissi, discutait avec le représentant de l’opposition Mohammed El Baradei et des chefs religieux de la "feuille de route" qui prévoit, selon la presse, une "période de transition" sous étroite surveillance de l’armée. Celle-ci avait déjà pris les rênes de l’exécutif après le départ du président déchu Hosni Moubarak.
Auparavant, des responsables militaires s’étaient réunis autour du général al-Sissi, jurant au début de la rencontre de sacrifier leur "sang pour l’Égypte et son peuple, contre tous les (groupes) terroristes, extrémistes et ignorants". "Aujourd’hui : éviction ou démission", affirmait en une le quotidien à grand tirage al-Ahram, détenu par l’État. El Watan (indépendant), à l’unisson de nombreux autres journaux, titrait laconiquement : "La fin". Le camp pro-Morsi dénonce une tentative de coup de force contre le chef de l’État, pour permettre un retour au pouvoir des militaires.
Selon le journal gouvernemental al-Ahram, la "feuille de route" prévoit la nomination d’un conseil présidentiel de trois personnes dirigé par le président de la Haute Cour constitutionnelle et une suspension de la Constitution pouvant durer jusqu’à un an. Un gouvernement de technocrates apolitiques serait formé pour la période de transition sous "la direction d’un des chefs de l’armée", écrit le journal. Toute personne s’opposant à ces mesures pourrait être placée en résidence surveillée puis traduite en justice. Les dirigeants des Frères musulmans seraient placés sous surveillance, avec de possibles mesures d’assignation à résidence, contrôle des avoirs, interdiction de quitter le pays, etc. Depuis lundi, cinq ministres et le porte-parole du président ont présenté leur démission, isolant un peu plus Mohamed Morsi invité par Washington et Paris à "écouter" son peuple.

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Morsi appelle à un "gouvernement de consensus" pour régler la crise
Le président égyptien Mohamed Morsi a appelé mercredi à former un "gouvernement de coalition et de consensus" au moment où expirait un ultimatum lancé par l’armée, menaçant d’imposer sa propre "feuille de route" au chef d’Etat s’il ignorait les "revendications du peuple".
Sur sa page Facebook officielle, M. Morsi, contesté par une partie de la population, a appelé à "former un gouvernement de coalition et de consensus afin d’organiser des législatives à venir".

(03-07-2013)

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