La réunion de l’opposition syrienne, prévue samedi à Istanbul pour
désigner un "Premier ministre" chargé du futur gouvernement en
territoire rebelle, a été reportée sine die, a indiqué jeudi un membre
de la Coalition nationale de l’opposition. "C’est le présidence de la
Coalition qui a pris à partir de Rome la décision du report de la
réunion. La conférence a été reportée sans qu’aucune nouvelle date ait
été fixée. Je ne peux donner immédiatement de raisons et je n’exclus pas
son annulation", a affirmé Samir Nachar, membre de la Coalition.
La Coalition nationale de l’opposition, reconnue par une majorité de
pays occidentaux comme représentant légitime du peuple syrien, devait se
réunir dans un hôtel pour ce scrutin qui intervient juste avant le
deuxième anniversaire du conflit meurtrier. "Ce ne sont pas les
divergences sur les candidats à la présidence du gouvernement qui ont
conduit au report, comme certains pourraient croire", a assuré Samir
Nachar. "Je pense que c’est une tentative américano-russe pour ouvrir un
dialogue entre le régime syrien et la Coalition, dont le résultat sera
un gouvernement de transition, et cela s’oppose à l’idée de former un
gouvernement temporaire de la part de la coalition", a-t-il ajouté.
Dans le nord et l’est de la Syrie, contrôlés en grande partie par des
groupes rebelles hétéroclites, le pouvoir central et l’appareil
sécuritaire de l’État se désintègrent progressivement, les
infrastructures sont complètement détruites, et la population peine à
survivre. L’opposition tente en conséquence de mettre sur pied un
gouvernement chargé d’administrer les zones rebelles. Pour le diriger,
les cinq noms le plus souvent cités sont l’ex-Premier ministre Riad
Hijab, qui a fait défection en 2012, Burhan Ghalioun, ex-chef du Conseil
national syrien et opposant de longue date, deux autres membres du CNS,
l’économiste Oussama Kadi et le cheikh Salem Moslet, et enfin
l’opposant Khaled Moustapha.
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60 millions de dollars à l’opposition et aide directe non létale aux rebelles
Les Etats-Unis ont annoncé jeudi une aide supplémentaire de 60 millions
de dollars à l’opposition politique syrienne et, pour la première fois,
des aides directes non létales à la rébellion, sans toutefois franchir
le pas de la livraison d’armes.
"Les Etats-Unis vont fournir 60 millions de dollars d’aide non létale
pour soutenir les besoins opérationnels quotidiens de la Coalition de
l’opposition syrienne, alors qu’elle continue à oeuvrer à une transition
politique", a déclaré à la presse le secrétaire d’Etat américain John
Kerry, en marge d’une conférence internationale à Rome. Il s’exprimait
aux côtés du chef de la Coalition nationale syrienne (CNS), Ahmed Moaz
al-Khatib, qu’il avait rencontré pour la première fois dans la matinée.
"La Coalition de l’opposition peut réussir à mener une transition
pacifique, mais elle ne peut pas le faire seule, elle a besoin de
davantage d’appui", a plaidé le ministre américain, qui s’est dit
"confiant" pour avoir le feu du Congrès à l’allocation de ces fonds.
Cette aide est principalement destinée à administrer les zones récemment
libérées en Syrie, a expliqué M. Kerry. Et pour éviter aussi que ces
régions ne tombent entre les mains d’"extrémistes", ont précisé des
responsables américains.
Par ailleurs, et pour la première fois, le secrétaire d’Etat a annoncé
"qu’il y aura(it) une aide directe, mais non létale, au Conseil suprême
militaire" syrien (CSM), qui chapeaute les rebelles de l’Armée syrienne
libre (ASL) sous forme d’"aide médicale et de nourriture".
Il s’agit concrètement de "rations militaires alimentaires et d’aides médicales", selon des diplomates américains.
Washington fournissait déjà depuis des mois une aide non létale d’une
valeur de 50 millions de dollars (équipements de communication, aide
médicale, formations), mais cette assistance était acheminée
indirectement aux rebelles via l’opposition politique syrienne et des
ONG, à l’extérieur du pays.
Les Etats-Unis ont également débloqué au total depuis près de deux ans
385 millions de dollars d’aide humanitaire pour les déplacés syriens
dans leur pays et les réfugiés dans les pays frontaliers, via les
agences internationales et l’ONU.
"Tous les Syriens doivent savoir qu’ils peuvent avoir un futur", a lancé
M. Kerry, espérant une nouvelle fois "changer le calcul que fait
M. Assad (...) qui doit quitter le pouvoir".
Auparavant, les onze pays de la conférence des "Amis du peuple syrien" —
Etats-Unis, Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Turquie, Egypte,
Jordanie, Arabie saoudite, Qatar et Emirats arabes unis— avaient promis
dans un communiqué "plus de soutien politique et matériel à la
Coalition, représentante unique et légitime du peuple syrien et à
apporter plus d’aide concrète à l’intérieur de la Syrie".
Les Onze "ont souligné la nécessité de changer l’équilibre du pouvoir
sur le terrain" et ont "déploré les livraisons continues d’armes au
régime (syrien) par des pays tiers", en allusion à la Russie qui livre
armes et munitions à Damas.
Les Américains ne dérogent donc pas à leur principe d’une aide
exclusivement non létale à l’opposition syrienne, la Maison Blanche
refusant toute assistance militaire. Mais le gouvernement de Barack
Obama a été divisé à l’été 2012 sur l’opportunité ou non d’armer la
rébellion.
En avril 2011, Washington avait débloqué 25 millions de dollars pour de
l’aide et des équipements "non-létaux" aux rebelles libyens combattant
l’armée de l’ancien dictateur Mouammar Kadhafi. Cette aide comprenait
rations militaires, gilets pare-balle, uniformes, tentes, jumelles,
radios et équipements médicaux.
Sur le terrain, les rebelles syriens se sont emparés à l’aube de la
mosquée des Omeyyades dans le centre d’Alep (nord), joyau historique et
prise hautement symbolique.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), les forces
loyalistes se sont retirées dans les immeubles environnants et les
combats se poursuivent autour du Palais de Justice et près de la place
Sabaa Barhat.
Par ailleurs, un attentat à la voiture piégée a fait un nombre
indéterminé de morts et de blessés jeudi à Homs, une ville du centre de
la Syrie dévastée par les combats entre rebelles et soldats, a rapporté
l’agence officielle Sana en l’attribuant à des "terroristes".
Douze civils, dont quatre membres d’une même famille, sont morts sous la
torture en prison après leur arrestation à Damas, selon l’OSDH.
Ailleurs dans le pays en guerre depuis bientôt deux ans, les combats
entre soldats et rebelles se poursuivent sans relâche sur plusieurs
fronts -Alep (nord), Homs, Damas, Deraa (sud) notamment, en l’absence de
toute perspective de règlement politique.
M. Kerry, en tournée en Europe, avait plaidé mercredi à Paris pour doper l’aide à l’opposition et hâter la transition politique.
La communauté internationale a mis cette semaine Damas et l’opposition
sous pression pour qu’ils amorcent des négociations afin de trouver une
issue à la guerre, qui a fait 70.000 morts en deux ans.
A Moscou, le président français François Hollande a déclaré jeudi
espérer une "solution politique" rapide en Syrie, une question qu’il
devait aborder avec son homologue russe Vladimir Poutine. Il a ajouté
avoir "constaté des progrès" en faveur d’un dialogue politique entre
Damas et l’opposition.
M. Kerry avait rencontré mardi à Berlin son homologue russe Sergueï Lavrov.
Moscou a pressé cette semaine l’opposition et Damas d’entamer un
dialogue. La Syrie s’est dite prête à discuter, même avec des groupes
armés, une offre rejetée par la rébellion tant que M. Assad ne sera pas
parti.
(28-02-2013 - Assawra)
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