Les dirigeants de la liste arabe aux législatives israéliennes du 17 mars 2015.
Les partis arabes ont obtenu mardi le plus grand nombre de députés de leur histoire selon les sondages à la sortie des urnes. Il leur faut maintenant décider que faire de ce capital.
Selon les projections des chaînes de télévision, avec 13 députés, les représentants des descendants des Palestiniens restés sur leur terre à la création d'Israël en 1948 (20% de la population) sont désormais une force avec laquelle il faut compter.
La droite, menée par Benjamin Netanyahu auquel ils ont appelé à faire barrage, paraît en meilleure position pour former le futur cabinet et ne fera pas appel à eux. Mais la question reste posée de savoir si la liste du travailliste Isaac Herzog chercherait leur appui pour rassembler une majorité parlementaire.
Car ils sont désormais fréquentables: leur numéro un, Ayman Odeh, avocat de 40 ans, a réussi un triple tour de force. Il a uni sur une même liste juifs et Arabes, communistes, islamistes et nationalistes arabes. Il est parvenu à mobiliser les "Arabes de 48", grands abstentionnistes. Et surtout, il a permis à sa liste d'exister dans la campagne.
Refusant le repli communautaire, cet enfant de Haïfa, la grande ville mixte d'Israël, a porté son discours auprès du public arabe comme de ses concitoyens juifs. Celui auquel partisans et détracteurs reconnaissent une opiniâtreté impressionnante a milité durant toute la campagne pour tisser des liens avec tous ceux en Israël qui réclament "l'égalité et la justice sociale".
Le président Reuven Rivlin rencontrera prochainement les représentants des partis siégeant au Parlement qui lui diront qui ils soutiennent pour le poste de Premier ministre.
La liste arabe pourrait proposer M. Herzog et s'abstenir de bloquer son investiture, sans lui fournir de ministres. C'est le "soutien extérieur" que les députés arabes avaient déjà offert au travailliste Yitzhak Rabin au début des années 1990. Jusqu'ici, M. Odeh laisse planer le doute. "On écoutera d'abord ce qu'il a à nous proposer", a-t-il dit à l'AFP.
"Nous, on est prêt, mais je doute qu'Herzog soit aussi courageux que Rabin", a-t-il dit à ses partisans après les résultats.
Car cet appui est à double tranchant pour M. Herzog que la droite accuse déjà d'être le "parti de l'étranger dépendant des Arabes".
Et les dirigeants de la liste arabe citent à l'envi l'épisode du dernier Premier ministre travailliste Ehud Barak que leurs électeurs avaient massivement soutenu en 1999, ce qui n'avait pas empêché la répression sanglante de la deuxième Intifada et la mort de 13 Arabes tués par la police en 2001.
Si la "soi-disant gauche" arrivait au pouvoir, a prévenu M. Odeh mardi soir, "elle permettrait à Israël de se racheter une virginité aux yeux du monde". Or la ligne rouge de la liste arabe n'a pas bougé: pas d'alliance avec ceux qui voudraient une guerre contre les Palestiniens ou soutenir l'occupation.
Au contraire, en se cantonnant dans l'opposition, les "Arabes de 48" pourraient, assurent-ils, accéder à la présidence de commissions parlementaires. "Nous ne pouvons pas avoir les commissions de la Défense et des Affaires étrangères, mais nous voulons les Finances ou les Affaires sociales", a dit M. Odeh à la radio publique. Plus d'un Arabe israélien sur deux vit sous le seuil de pauvreté.
Si MM. Herzog et Netanyahu formaient un gouvernement d'union nationale, M. Odeh serait, précédent historique, propulsé chef de l'opposition, prédit-il: le Premier ministre serait alors tenu de le consulter pour les décisions majeures. M. Odeh aurait aussi le droit de prendre la parole à la suite du Premier ministre quand celui-ci s'adresse à la Knesset ou lors de cérémonies officielles.
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