mercredi 4 mars 2015

Irak: l'armée tente d'encercler Tikrit, la bataille appelée à durer

Les forces irakiennes tentaient mercredi de d'encercler les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) dans les environs de Tikrit, en coupant notamment leurs lignes d'approvisionnement, au troisième jour d'une vaste offensive appelée à durer pour reprendre cette ville stratégique.
Appuyées par des miliciens chiites et des tribus sunnites, les forces armées étaient à plus d'une vingtaine de km de Tikrit, ville située à 160 km au nord de Bagdad.
Les "opérations se poursuivent conformément au plan préparé", a indiqué un officier à Samarra, la deuxième ville de la province de Salaheddine. "Nos forces avancent lentement et méthodiquement", en raison des snipers et des bombes placées en bord des routes.
Les combattants progressent depuis trois fronts: de la cité de Samarra au sud, du camp militaire de Speicher au nord et de la province de Diyala à l'est.
"L'objectif est d'empêcher Daech (acronyme en arabe de l'EI) de commettre des attaques, de couper ses lignes d'approvisionnement, de l'empêcher d'être en liaison avec ses combattants (hors de la ville) et de l'encercler totalement avant de l'attaquer", a détaillé le général Abdel Amir Al-Zaidi, commandant des opérations dans le secteur de Diyala.
Les troupes veulent commencer par prendre deux localités toutes proches de Tikrit, Al-Alam au nord et Al-Dour au sud, sur leur chemin vers la ville, a-t-il ajouté. Elles ont réussi "à détruire la première ligne de défense de Daech, poussant les jihadistes à se retirer à l'intérieur des localités".
Depuis le début de l'opération lundi, il n'"y pas eu de confrontation directe" entre les deux camps. Le porte-parole de la police Mohammed Ibrahim a expliqué que les jihadistes avaient surtout recours aux attentats à la voiture piégée contre les forces en progression.
"Si tout se passe bien, je vois l'opération prendre quelques semaines. Mais même si Tikrit est reprise, elle restera vulnérable à des infiltrations et à des attaques terroristes vu sa proximité avec les autres points chauds comme les provinces de Ninive et d'Al-Anbar", a prévenu John Drake, un expert de l'institut de recherche sur la sécurité AKE Group.
Bagdad a annoncé avoir mobilisé 30.000 hommes et l'aviation pour cette offensive présentée comme "la plus massive" lancée depuis la prise par l'EI en juin 2014 de pans entiers du territoire irakien face à une armée en déroute.
Située entre Bagdad et Mossoul, Tikrit, berceau de l'ex-président Saddam Hussein, est la deuxième ville la plus importante conquise par l'EI en Irak, après celle de Mossoul, à 350 km au nord de Bagdad.
Dans l'offensive actuelle, les Irakiens n'ont pas demandé l'aide des Etats-Unis et de leurs alliés qui ont poursuivi leurs frappes quotidiennes contre l'EI ailleurs en Irak et en Syrie.
Pour Bagdad, la prise de Tikrit représenterait "un tremplin sur le chemin de la libération de Mossoul".
En visite à Bagdad, le ministre turc de la Défense Ismet Yilmaz a déclaré selon l'agence Anatolie que son pays était "aux côtés de l'Irak en cas d'une offensive sur Mossoul. La Turquie est prête à tout soutien logistique et en matière de renseignements dans le cadre de la lutte de l'Irak contre le terrorisme".
Dans la bataille pour Tikrit, les Etats-Unis ont confirmé la participation de l'Iran sur le terrain. Cette offensive marque l'implication iranienne "la plus manifeste" en Irak depuis 2004, "avec de l'artillerie et d'autres moyens", a déclaré le plus haut gradé, le général Martin Dempsey.
Craignant des représailles, plusieurs familles ont fui la région dès l'annonce dimanche par le Premier ministre Haider al-Abadi de l'offensive de Tikrit.
"Nous sommes partis car nous craignions que les forces armées n'arrivent et ne fassent pas la différence entre les civils innocents et les hommes armés", a témoigné Abou Ahmed, qui a fui avec sa femme et ses cinq enfants Al-Alam vers Kirkouk.
Au lieu de faire la centaine de kilomètres séparant ces deux villes, ils ont dû faire un détour de 800 km après avoir payé à un "guide" 4.000 dollars pour les faire sortir d'Al-Alam.
"Nous avons eu peur des rumeurs qui circulaient selon lesquelles les milices vont arriver et se venger de ceux qui ont commis le massacre de Speicher", a-t-il ajouté, en allusion à une attaque de l'EI en 2014 contre ce camp militaire où des centaines de recrues essentiellement chiites avaient été tuées et où des tribus sunnites avaient été accusées de complicité.

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