mercredi 12 juin 2013

Israël/Palestine : Polémique autour de l’exposition d’une photographe palestinienne à Paris

Une exposition à Paris sur le travail de la photographe palestinienne Ahlam Shibli montrant notamment la façon dont les familles d’auteurs d’attentats-suicide en Israël entretiennent la mémoire de leurs disparus suscite de vives protestations de la part d’associations juives.
Intitulée "Foyer fantôme", cette rétrospective organisée par le Jeu de Paume depuis le 28 mai comprend notamment une série récente intitulée "Death" qui "montre les efforts de la société palestinienne pour préserver la présence de ceux qui ont perdu la vie en combattant l’attaquant", selon le dossier de presse de l’institution culturelle.
Cette série de 68 photographies prises en Palestine en 2011 et 2012 a été conçue spécialement pour l’occasion, précise le dossier. L’exposition se tient jusqu’au 1er septembre. Un livre coédité par le Jeu de Paume l’accompagne.
Née dans un village de Galilée en 1970, Ahlam Shibli a réalisé cette série notamment dans l’enclave de Naplouse et de sa région. Elle a travaillé sur la représentation de Palestiniens "absents", soit parce qu’ils ont été tués par l’armée israélienne, soit parce qu’ils ont commis des attentats-suicide, soit parce qu’ils sont en prison.
Ahlam Shibli a photographié ainsi le salon d’une famille habitant dans un camp de réfugiés. Une grande toile représentant le fils, membre des brigades al-Aqsa et mort "en martyr" selon la légende rédigée par l’artiste, emplit la pièce sous le regard des enfants de ce combattant et de sa mère.
Une autre photo montre une grande représentation sur le mur du salon familial d’Osama Bushkar, auteur d’une "opération martyre" en 2002, selon la légende.
Le Crif (Conseil représentatif des organisations juives) s’indigne de cette exposition. Le président du Crif, Roger Cukierman, a écrit le 5 juin à la ministre de la Culture Aurélie Filippetti pour juger "particulièrement regrettable et inacceptable qu’en plein Paris, cette série fasse ainsi l’apologie du terrorisme", indique le Crif sur son site. Cukierman "sollicite l’intervention de la ministre", ajoute le conseil.
Le Jeu de Paume a regretté mercredi dans un communiqué "la polémique naissante" autour de cette exposition et indiqué avoir "reçu de nombreux messages de protestation à propos de cette exposition".
"Le Jeu de Paume réfute fermement les accusations d’apologie du terrorisme ou de complaisance à l’égard de celui-ci, et portera plainte contre toutes les personnes lui adressant des menaces", souligne l’institution.
Dans la série Death, l’artiste Ahlam Shibli "présente un travail sur les images qui ne constitue ni de la propagande ni une apologie du terrorisme, contrairement à ce que certains messages que le Jeu de Paume a reçus laissent entendre. Comme l’artiste l’explique elle-même : +Je ne suis pas une militante [...] Mon travail est de montrer, pas de dénoncer ni de juger+".
"Le Jeu de Paume ne souhaite pas esquiver le débat ni passer sous silence l’émoi que l’exposition suscite auprès d’un certain nombre de personnes, bien au contraire, il invite chacun à la découvrir sereinement", ajoute le communiqué.
L’exposition a déjà été présentée au MACBA de Barcelone et ira ensuite à la Fondation Serralves de Porto, également coproducteurs.

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