À Alep, deuxième ville du pays et enjeu majeur du conflit qui dure
depuis plus de 18 mois, de violents combats se sont déroulés pendant
plusieurs heures dans les souks historiques, déjà victimes de
destructions durant le week-end. "Le plus grand problème, c’est qu’on ne
sait rien de nos échoppes, tout ce qu’on sait, on l’apprend par le
bouche-à-oreille", se lamente un marchand de ficelles qui estime sa
marchandise à des millions de livres syriennes. Classés au patrimoine
mondial de l’humanité par l’Unesco en 1986, avec la vieille ville
d’Alep, les souks et leurs quelque 1 550 échoppes étaient depuis des
siècles l’un des centres névralgiques du commerce au Moyen-Orient.
La France a exprimé lundi sa "vive condamnation suite à la destruction
par les flammes du marché médiéval d’Alep causée par de violents
bombardements". Les portes de bois des échoppes, remplies d’étoffes et
de broderies, s’étaient rapidement consumées après les premiers combats
samedi. Cinq de la quarantaine des marchés du souk, comme le souk des
femmes, celui de l’or ou encore celui des abayas, ont été entièrement
détruits, selon des témoins, même s’il reste difficile d’estimer les
dégâts en raison des combats.
Toujours à Alep, de violents combats ont également éclaté dans d’autres
secteurs. L’immeuble abritant le gouvernorat local a été la cible d’un
tir, "provoquant la panique parmi les fonctionnaires", selon
l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH). Au total, près de 56
personnes, dont 31 civils ont péri dimanche dans les violences à
travers le pays, selon un bilan provisoire de l’OSDH.
Ainsi, à Idleb, province voisine d’Alep dans le nord-ouest du pays, au
moins 21 civils, dont huit enfants, ont été tués dans un raid aérien
mené par les troupes du régime de Bashar el-Assad sur la localité de
Salqin, selon l’OSDH et des militants. Une vidéo postée sur Internet
montre des images insoutenables de corps carbonisés et démembrés, dont
ceux d’enfants." Oh, mon Dieu, mon fils est mort", pleure un homme
devant un pick-up plein de corps. Trois enfants sont membres d’une même
famille, selon l’ONG.
La mort a frappé ailleurs dans le pays, dans les régions défendues
farouchement par les rebelles, comme à Deraa, berceau de la
contestation, où au moins cinq personnes, dont une femme, son père et un
rebelle, ont péri dans le pilonnage par l’armée, selon l’OSDH. "Que
Dieu te maudisse, Bashar, toi, tes soldats et ta famille, nous nous
vengerons", clame un homme dans une vidéo. Au moins 18 soldats syriens
ont par ailleurs été tués et 30 autres blessés dans une embuscade
rebelle contre un convoi de voitures, de camions et de véhicules sur la
route de Homs, dans le centre du pays, selon l’OSDH. Le conflit a fait
plus de 30 000 morts depuis le début du conflit en mars 2011, toujours
selon l’organisme indépendant basé à Londres.
Le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, a accusé les
États-Unis de vouloir répéter le scénario qui a mené à la chute du
dictateur irakien Saddam Hussein en prétextant la présence d’armes
chimiques dans le pays. "C’est une chimère qu’ils ont inventée pour
lancer une campagne contre la Syrie comme ils l’ont fait en Irak",
a-t-il déclaré dans une interview à la chaîne arabe Al-Mayadeen,
réalisée en marge de l’Assemblée générale de l’ONU à New York, et dont
des extraits ont été rendus publics lundi. L’argument des États-Unis de
la présence d’armes de destruction massive en Irak avait servi à
justifier l’invasion de ce pays en mars 2003 et s’était ensuite révélé
faux.
Walid Mouallem a toutefois gardé le flou sur la détention d’un tel
arsenal par le régime, deux mois après que Damas a reconnu pour la
première fois posséder des armes chimiques et menacé de les utiliser en
cas d’intervention militaire occidentale, mais jamais contre sa
population. "Ces armes chimiques en Syrie, si elles existent, et je dis
bien si elles existent, comment est-il possible que nous les utilisions
contre notre propre peuple ? C’est du n’importe quoi", a-t-il dit. La
semaine dernière, le secrétaire américain à la Défense Leon Panetta
avait affirmé que Damas avait déplacé des armes chimiques pour les
sécuriser. Washington est défavorable à une intervention armée en Syrie.
Le diplomate syrien a en outre estimé que des pays comme le Qatar
"dépensaient des milliards de dollars pour faire assassiner le peuple
syrien".
La Turquie a par ailleurs évalué dimanche à près de 100 000 le nombre de
Syriens réfugiés sur son territoire, et a réclamé une aide
internationale pour continuer à les accueillir. Au total, 93 576
réfugiés sont logés dans 13 camps dispersés dans le sud-est de la
Turquie, frontalière avec la Syrie, selon Ankara.
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