lundi 22 octobre 2012

Liban : violente manifestation contre le gouvernement aux obsèques du général Wissam al-Hassan à Beyrouth

Beirut, Lebanon, 20 oct 2012 : Men block a road in protest against the assassination of top intelligence official Wissam al-Hassan
(Photograph : Joseph Eid/AFP)

Les obsèques dimanche à Beyrouth d’un chef de la Sécurité libanaise ont dégénéré en une manifestation violente contre le Premier ministre Najib Mikati accusé par ses opposants de couvrir ce "crime", la police tirant en l’air et usant de gaz lacrymogènes. Des milliers de personnes ont participé à la cérémonie religieuse à la mosquée Amine, au centre de la capitale, à la mémoire du général Wissam al-Hassan, chef des services de renseignements de la police, et de son chauffeur, tués vendredi dans l’explosion d’une voiture piégée.
À l’issue des funérailles, Fouad Siniora, chef du bloc parlementaire d’opposition, a chauffé à blanc les manifestants rassemblés sur la place des Martyrs. Le gouvernement est responsable du crime qui a tué Wissam et son compagnon. C’est pourquoi il faut qu’il parte", a-t-il lancé à la foule. "Mikati, tu ne peux plus rester à ton poste pour couvrir ce crime. Si tu restes, c’est que tu es d’accord avec ce qui s’est passé et avec ce qui se passera", a-t-il encore dit, ajoutant qu’"il n’y aura[it] pas de dialogue avant la chute du gouvernement".

Dans le cabinet actuel, le Hezbollah occupe une place prépondérante, alors que l’opposition est violemment opposée au régime de Bashar el-Assad en Syrie voisine, ancienne puissance tutélaire du pays du Cèdre. Surexcités, deux cents jeunes ont tenté de prendre d’assaut le Sérail, siège du Premier ministre, et la police a lancé des grenades lacrymogènes et tiré en l’air pour les faire reculer, a constaté une journaliste.
Les manifestants jetaient des pierres et des bâtons, a rapporté la journaliste, faisant état de blessés des deux côtés. Saad Hariri, qui vit hors du Liban, a lancé un appel au calme, indiquant qu’il voulait "la chute du gouvernement, mais de manière pacifique". Dans l’après-midi, quelques milliers de personnes avaient convergé vers la place des Martyrs, où étaient placardées des affiches géantes du général Hassan avec ces mots : "Le martyr de la justice et de la vérité".

"Une seule révolution dans deux États" proclamait une banderole, faisant allusion à la Syrie et au Liban, "Va-t’en, Najib" Mikati, pouvait-on également lire, ainsi que "Bashar, hors du Sérail". La majorité des manifestants étaient des sunnites, communauté à laquelle appartenait le défunt, des chrétiens et des druzes.
Najib Mikati et le président Michel Sleimane avaient fait samedi le lien entre l’attentat qui a coûté la vie au général Hassan et l’interpellation de l’ancien député libanais Michel Samaha, partisan inconditionnel du régime de Damas. Au cours d’une cérémonie militaire dimanche au QG de la police en présence de la famille du défunt et de Najib Mikati, Michel Sleimane a demandé à la justice d’accélérer la rédaction de l’acte d’accusation contre Michel Samaha.

L’ex-député avait été arrêté par le général Hassan qui l’accusait d’avoir transporté des explosifs pour commettre des attentats afin de créer le chaos à l’instigation du très puissant chef des renseignements syriens, le général Ali Mamluk. Le général Hassan avait ensuite défié le général Mamlouk en étant à l’origine du mandat d’arrêt délivré en août contre lui par la justice libanaise dans le cadre de l’enquête sur Michel Samaha.

Auparavant, le général Hassan avait joué un rôle majeur dans l’enquête sur les nombreux attentats qui ont visé entre 2005 et 2008 des personnalités libanaises anti-syriennes, dont Rafic Hariri. Le général Hassan a d’ailleurs été inhumé dans le mausolée de Rafic Hariri, qui fut son mentor, à la demande de Saad Hariri. L’attentat de vendredi a été attribué par l’opposition libanaise et les experts à Damas, confronté depuis 19 mois à une révolte qu’il tente d’écraser. Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius a jugé dimanche "probable" l’implication de Damas, accusant le président Assad "d’essayer d’élargir la contagion" du conflit syrien aux pays voisins. La Syrie n’a jusqu’à présent pas réagi officiellement à ces accusations.

"C’est exactement comme le jour de la mort de Rafic Hariri. Les Syriens ne sont plus ici, mais il y a des Libanais qui travaillent pour eux. Le gouvernement est responsable de ce qui s’est passé et nous voulons qu’il parte", a affirmé Manal Charqawy, une étudiante qui participait à la manifestation. Le dirigeant politique libanais allié du Hezbollah, Michel Aoun, a mis en garde l’opposition anti-syrienne. "Nous serons vigilants pour qu’il n’y ait pas de dérapage à l’instigation de certains qui voudraient utiliser ce crime, qui a coûté la vie à des Libanais, en une bataille politique", a-t-il dit à la presse. La colère restait vive dimanche dans les régions à majorité sunnite. À Tripoli (nord), trois personnes ont été blessées, après cinq samedi. Vendredi, un cheikh avait été tué dans des échanges de tirs.

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