mardi 23 octobre 2012

Syrie : les espoirs de trêve s’amenuisent

L’armée syrienne a mené mardi un raid aérien sur Alep et des perquisitions à Damas, laissant peu d’espoir sur la possibilité de faire taire les armes pour la fête musulmane de l’Aïd al-Adha dans trois jours. Dans une apparente tentative d’apaisement, le président Bashar el-Assad, dont les troupes sont engagées dans un conflit avec les insurgés qui a fait selon une ONG au moins 34 000 morts en 19 mois, a décrété une amnistie, mais en a exclu les "terroristes", mot par lequel le régime désigne les rebelles.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), des dizaines de milliers de civils ont été emprisonnés et des milliers d’autres ont disparu dans les geôles du régime depuis le début de la révolte mi-mars 2011. À trois jours de l’Aïd al-Adha, durant laquelle l’émissaire international Lakhdar Brahimi a plaidé pour une trêve dans les combats opposant rebelles et forces du régime, de nouvelles violences ont eu lieu, notamment à Damas et Alep. L’aviation a bombardé un quartier rebelle à Alep, la métropole du Nord où une guerre d’usure se déroule depuis plus de trois mois, rapporte l’OSDH, qui s’appuie sur un réseau de militants et médecins sur le terrain.
À Damas, les forces de sécurité ont mené une campagne de perquisitions dans le quartier périphérique d’al-Zahira. Dans la nuit, un homme a été tué par l’explosion d’une bombe dans la banlieue sud-est de Damas. Dans l’est du pays, des combats ont eu lieu près des locaux de la sécurité politique à Deir Ezzor, que les rebelles tentent de contrôler depuis des mois. Ces violences sont intervenues au moment où les autorités ont jugé "réussie" la mission à Damas de Lakhdar Brahimi, qui en cinq jours n’a pourtant obtenu aucune garantie sur une trêve temporaire.
Interrogé si les deux parties étaient parvenues à un quelconque accord, Faisal Moqdad, vice-ministre des Affaires étrangères, a répondu à la presse : "Il faut y parvenir de manière rapide." Damas a par ailleurs accusé la France d’entraver les efforts visant à l’arrêt des violences en soutenant les "terroristes", en appelant au "Conseil de sécurité de l’ONU pour traiter de manière sérieuse la question du rôle de la France". "À trois jours de l’Adha, rien ne laisse penser que les armes vont se taire", a affirmé Rami Abdel Rahman, chef de l’OSDH, estimant que "ni les rebelles ni le régime ne semblent vouloir d’un cessez-le-feu" et faisant valoir que "le bilan quotidien continue de dépasser les 100 morts".
Mardi, les violences à travers la Syrie ont fait 45 morts - 19 civils, 13 soldats et 13 rebelles -, selon un bilan provisoire de l’OSDH. Se préparant malgré tout à un éventuel arrêt durable des violences, l’ONU travaille sur un projet de force de maintien de la paix en Syrie, a annoncé le chef des opérations de maintien de la paix des Nations unies, Hervé Ladsous. "Nous nous préparons à agir si c’est nécessaire et si un mandat est approuvé" par le Conseil de sécurité, a-t-il déclaré lundi à New York. Les 15 membres du Conseil sont profondément divisés sur la question, Moscou et Pékin protégeant leur allié syrien en utilisant leur droit de veto.
Autre allié de poids de Damas, l’Iran a annoncé qu’un "dialogue national" regroupant toutes les parties syriennes pourrait s’ouvrir "bientôt" à Téhéran ou dans un autre pays de la région. Ce dialogue réunira "les groupes (...) de l’opposition et des représentants du pouvoir", a précisé le vice-ministre des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian, tout en reconnaissant que Téhéran "essaye toujours de convaincre" certains mouvements d’opposition qui ont refusé d’y participer.
Lakhdar Brahimi a appelé dimanche les belligérants à cesser "unilatéralement" les combats "à partir d’aujourd’hui (dimanche) ou de demain (lundi)", à l’occasion de l’Aïd al-Adha, ou fête du sacrifice, l’une des fêtes musulmanes les plus sacrées, célébrée cette année du 26 au 29 octobre. Avec la poursuite des violences, le nombre des réfugiés syriens au Liban a franchi la barre des 100 000, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). La Turquie, la Jordanie et l’Irak avaient auparavant dépassé ce chiffre.
Dans le royaume hachémite, des réfugiés syriens en colère ont d’ailleurs de nouveau mis le feu à des tentes de leur camp pour protester contre leurs conditions de vie. Alors que le médiateur international a mis en garde contre un débordement du conflit syrien, l’armée restait déployée au Liban dans des quartiers de Beyrouth et de Tripoli (nord) après des violences déclenchées par un attentat meurtrier attribué par l’opposition au régime syrien. Et des députés de l’opposition libanaise hostile à Damas ont affirmé avoir reçu des textos menaçants envoyés depuis un numéro syrien, avant et après l’assassinat d’un dirigeant de la police le 19 octobre.

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