mardi 16 octobre 2012

Syrie : la mosquée historique des Omeyyades d’Alep endommagée

Une partie de la Grande Mosquée des Omeyyades d’Alep, joyau historique de la deuxième ville de Syrie, a subi d’importants dommages à la suite de combats entre troupes du régime et rebelles, selon un correspondant de l’AFP sur place. À l’intérieur de cette mosquée datant du VIIIe siècle, des tapis ont été brûlés et le sol était couvert de douilles et de vitres brisées.
Des reliques appartenant selon la tradition au prophète Mahomet, trois cheveux et un fragment de dent, ont été subtilisées dans un coffret en bois dans une petite chambre de la mosquée, a constaté le journaliste. Outre l’architecture superbe de la mosquée, il s’agissait de l’une des principales attractions du lieu saint. Des livres qui étaient disposés dans des armoires ont également disparu, tandis que des corans ont été brûlés et déchirés.
Des meubles anciens en bois ont été complètement détruits par les flammes dans une galerie située dans la cour de la mosquée. La télévision officielle syrienne a aussi montré des images d’arcades noircies par le feu dans la cour. Dimanche, l’armée a repris le contrôle total de la mosquée que les rebelles avaient partiellement prise la veille, selon une source militaire et une ONG. Le président syrien Bashar el-Assad a formé lundi une commission chargée de restaurer le site, selon l’agence officielle Sana.
Alors qu’à proximité de la mosquée, une bibliothèque renferme une collection de livres religieux rares, on ne savait pas, lundi, si ces ouvrages avaient été touchés. La vieille ville d’Alep est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Un incendie a récemment détruit de nombreux magasins du souk d’Alep, le plus important du Moyen-Orient, situé également dans la vieille ville. La métropole du Nord connaît des combats sans relâche depuis trois mois entre rebelles et forces du régime.

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Face au risque d’embrasement, l’UE renforce ses sanctions
L’Union européenne, faute d’accord avec la Russie sur une issue à la crise syrienne, a brandi lundi le risque d’un embrasement de la région, et renforcé ses sanctions contre le régime, sans envisager d’accueillir massivement les réfugiés syriens sur son sol.
"Le danger d’un embrasement grandit. Et personne, y compris la Russie, n’y a intérêt", a averti le ministre allemand des Affaires étrangères Guido Westerwelle. "Il est nécessaire de convaincre ceux qui continuent à protéger le régime d’Assad que le danger d’une internationalisation du conflit grandit, que le danger d’une guerre par procuration grandit", a-t-il insisté.
Les ministres européens ont eu dimanche soir un long échange à ce sujet avec leur homologue russe Sergueï Lavrov, lors d’un dîner de plus de trois heures.
La Syrie a été abordée "sous toutes ses dimensions. Je ne peux pas dire que nous ayons fait quelque progrès que ce soit", a commenté lundi le Britannique William Hague.
"Le point de vue russe n’a pas évolué", a convenu le Français Laurent Fabius, avouant avoir même cru constater "un certain recul", notamment quand M. Lavrov "a expliqué que jamais le président syrien Bachar al-Assad ne quitterait le pouvoir".
Selon un diplomate européen, le ton de M. Lavrov a été par moments "très dur", le ministre russe allant jusqu’à accuser ses homologues européens de ne "rien comprendre" au conflit et critiquant vivement leurs sanctions autonomes contre Damas.
Cela n’a pas empêché les ministres européens, comme à chacune de leurs réunions depuis le début de la crise syrienne en mars 2011, d’adopter lundi un nouveau train de sanctions.
Il porte à 181 le nombre de personnes proches du régime et à 54 le nombre de sociétés ou administrations placées sur les listes noires de l’UE. Leurs avoirs sont gelés et ils sont frappés d’interdictions de visa.
Les deux nouvelles sociétés désignées sont soupçonnées d’avoir acheté des armes ou du matériel répressif, a précisé une source diplomatique.
Par ailleurs, l’UE va interdire à ses ressortissants d’acheter des armes à la Syrie, de les transporter vers les pays tiers ou d’assurer de tels transports.
Le but est de priver le régime d’éventuelles sources de financement.
A ce jour, l’UE a également décrété des embargos sur les armes et le pétrole, ainsi qu’une série de sanctions commerciales et financières.
L’urgence est, selon M. Fabius, à la "désescalade, parce que rien ne serait pire que d’ajouter au drame syrien en plus un conflit entre les Syriens et les Turcs", alliés des 27 dans le cadre de l’Otan.
Ankara, qui vient d’annoncer que le nombre de réfugiés syriens a dépassé la barre des 100.000 sur son sol, verrait bien l’UE en accueillir, a souligné le ministre des Affaires européennes, Egemen Bagis.
Mais les Européens n’y sont pas prêts. "Il faut clairement se concentrer sur l’accueil des réfugiés sur place", a jugé M. Westerwelle.
"On ne peut pas prendre des avions, transporter ces gens vers l’Europe et dire que ça règle le problème", a renchéri son homologue luxembourgeois Jean Asselborn, soulignant qu’il valait mieux aider la Turquie, le Liban, la Jordanie.
Berlin se dit toutefois prêt, en principe, à "accueillir des réfugiés, par exemple pour des traitements médicaux", a dit M. Westerwelle. Mais cela doit avoir lieu dans le cadre d’une démarche européenne et en accord avec l’ONU, estime-t-il.
L’UE a déjà débloqué 200 millions d’euros pour aider les pays voisins de la Syrie à gérer l’afflux de réfugiés.

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L’atterrissage de l’avion humanitaire arménien pour la Syrie était "prévu"
Un avion cargo arménien en route pour Alep (Syrie), qui a atterri lundi en Turquie pour une fouille de sa cargaison, transporte de l’aide humanitaire et son atterrissage était prévu, a indiqué à l’AFP le ministère arménien des Affaires étrangères.
"L’avion qui transportait une cargaison humanitaire pour la Syrie a effectué un atterrissage en Turquie qui était prévu. L’atterrissage en Turquie avait été convenu à l’avance avec la partie turque", a déclaré le porte-parole du ministère, Tigran Balaian.
Cette cargaison a été envoyée dans le cadre d’une campagne humanitaire arménienne baptisée "Aide un frère", a précisé un des organisateurs de la campagne.
"La cargaison humanitaire comprend des produits alimentaires comme du sarrasin, du riz, du sucre, des pâtes, etc", a déclaré à l’AFP Vahan Hovannissian, un député du parti nationaliste Dachnaktsoutioun.
Il existe une petite communauté arménienne en Syrie, rassemblant de 60 000 à 100 000 personnes selon les estimations, qui vivent essentiellement à Alep.
Depuis le début du conflit en Syrie, plusieurs milliers d’entre elles ont fui en Arménie, craignant des problèmes en Syrie si le président Bashar al-Assad, dont le gouvernement entretient des relations amicales avec l’Arménie, est renversé et remplacé par un régime islamiste.
Le 10 octobre des avions de chasse turcs ont forcé un avion de ligne syrien à se poser à Ankara pour une inspection de sa cargaison, jugée suspecte par Ankara qui a rompu avec le régime de Damas.
Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé que cet Airbus de la Syrian Air transportait des "munitions" et des équipements militaires fournis par la Russie à destination de la Syrie. Damas a démenti catégoriquement et Moscou concédé que l’avion convoyait du "matériel pour des stations radar" tout à fait "légal".
La Turquie et l’Arménie n’entretiennent pas de relations diplomatiques en raison de leur profond différend sur le caractère génocidaire des déportations d’Arméniens sous l’empire ottoman, en 1915. Une démarche de réconciliation entre les deux pays lancée en 2009 est restée sans effet.

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Brahimi appelle à une trêve pour la fête musulmane fin octobre
Le médiateur international Lakhdar Brahimi a appelé lundi à une trêve en Syrie durant la grande fête musulmane d’Al-Adha fin octobre, le jour même où le conflit dévastateur entrait dans son 20e mois.
L’appel de M. Brahimi, en tournée régionale, survient alors que les combats entre rebelles et troupes du régime de Bachar al-Assad continuent de faire rage dans le pays et que les divisions persistent entre l’Occident et la Russie, un pays allié du pouvoir à Damas, sur les moyens de régler la crise.
Le conflit risque en outre de déborder, la Syrie étant en crise ouverte avec la Turquie voisine -qui soutient la rébellion et héberge plus de 100.000 réfugiés syriens- depuis la mort le 3 octobre de cinq civils turcs dans la chute d’un obus syrien près de la frontière.
Face à la détermination du pouvoir d’en finir coûte que coûte avec les rebelles qualifiés de "terroristes", l’Union européenne a infligé de nouvelles sanctions contre le régime en gelant des fonds de 28 partisans de M. Assad et de deux sociétés.
Lors d’une visite à Téhéran où il a rencontré dimanche le président Mahmud Ahmadinejad, un allié principal de M. Assad, M. Brahimi a "appelé les autorités iraniennes à aider pour la mise en oeuvre d’un cessez-le-feu en Syrie durant l’Aïd al-Adha, l’une des fêtes les plus sacrées célébrées par les musulmans dans le monde", selon un communiqué diffusé lundi par son porte-parole.
La fête d’Al-Adha, qui couronne les rites du grand pèlerinage musulman à La Mecque en Arabie saoudite, devrait être célébrée cette année le 26 octobre et dure trois jours.
M. Brahimi, émissaire de l’ONU et de la Ligue arabe, a "souligné l’urgence de mettre fin au bain de sang" et répété "l’appel de Ban Ki-moon pour un cessez-le-feu et l’arrêt du flux d’armes", selon le texte. Une telle trêve "favoriserait un environnement permettant au processus politique d’évoluer".
Le 10 octobre, le régime syrien avait rejeté une demande du chef de l’ONU Ban Ki-moon qui l’avait appelé à décréter un cessez-le-feu unilatéral et demandé aux forces d’opposition de le respecter.
Selon Ahmad Ramadan, un responsable du Conseil national syrien (CNS) réuni au Qatar, "l’une des idées envisagées (par M. Brahimi), est le déploiement de forces de maintien de la paix mais cette question est encore à l’étude".
Le secrétariat général du CNS, qui regroupe 35 personnes, débat dans la capitale qatarie sous la présidence de son chef Abdel Basset Sayda, "de la situation sur le terrain et du problème des réfugiés", selon M. Ramadan.
Après Téhéran, M. Brahimi est arrivé à Bagdad dont le gouvernement se garde d’appeler au départ de M. Assad préférant demander la fin des hostilités qui ensanglantent la Syrie depuis le début le 15 mars 2011 du conflit déclenché par la répression brutale d’un mouvement de contestation populaire.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), plus de 33.000 personnes ont péri en 19 mois, alors que quelque 340.000 personnes ont pris la fuite dans les pays voisins et environ deux millions ont été déplacées à l’intérieur du pays et ont besoin d’aide selon l’ONU.
Au lendemain d’une nouvelle journée de violences sanglantes au cours de laquelle 150 personnes, en majorité des civils, ont péri dimanche selon l’OSDH, insurgés et soldats continuent de se battre sur trois fronts principaux : province de Damas, Alep (nord) et Idleb (nord-ouest).
L’armée syrienne, forte de sa puissance aérienne, mène une contre-attaque au sud d’Alep et dans la région voisine d’Idleb pour reprendre des positions clés conquises par les insurgés, et tente de repousser une offensive rebelle contre la base militaire de Wadi Deif, la plus importante d’Idleb.
L’opposition armée s’était emparée la 9 octobre de la ville stratégique de Maaret al-Nooman située sur la route reliant Damas à Alep, et a pu freiner l’acheminement des renforts militaires vers la métropole du Nord.
Le blocage de son approvisionnement affaiblit l’armée qui peine déjà à faire face sur tous les fronts dans le pays. De plus selon des analystes, les troupes sont démoralisées après 19 mois de révolte, minées par les défections et privées de renforts.
Au coeur d’Alep, l’armée a néanmoins repris dimanche le contrôle total de la mosquée historique des Omeyyades, selon une source militaire et une ONG. Human Rights Watch (HRW) a en outre accusé l’aviation du régime, couramment utilisée dans le conflit, d’avoir largué des bombes à sous-munitions.

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