A l’occasion du martyre du dr. Fathi Shiqaqi, fondateur et premier
secrétaire général du mouvement, le 26 octobre 1995, assassiné par le
Mossad sioniste, le site de la chaîne satellitaire « Falastin al-Yom » a
mené cet entretien avec Abu’ Imad Rifa’i, représentant du mouvement au
Liban.
A l’occasion de la commémoration de l’assassinat du fondateur du
mouvement du Jihad islamique en Palestine, dr. Fathi Shiqaqi,
pensez-vous que le mouvement est parvenu à surmonter les conséquences de
cet assassinat ?
Il est certain que le martyr dr. Fathi Shiqaqi est un symbole et un
dirigeant, et sa personnalité dirigeante et savante a représenté un axe
important. Il fut une personnalité exceptionnelle du renouveau, que ce
soit sur la scène palestinienne ou sur le plan du mouvement islamique.
Quiconque l’a connu de près réalise parfaitement qu’une personnalité de
ce niveau est difficile à compenser sur le plan personnel, et que son
assassinat a eu lieu alors qu’il se trouvait à l’apogée de son apport et
de sa créativité. La voie qu’il avait fondée avec ses frères impliquait
ce que pouvait commettre l’ennemi sioniste, d’autant plus que la
politique des assassinats est une méthode sioniste adoptée depuis la
fondation de l’entité ennemie, qui a assassiné de nombreux dirigeants et
combattants. C’est pourquoi le mouvement du Jihad islamique est d’abord
basé sur la foi en l’idée et en la voie, avant même l’organisation du
mouvement en tant que telle. Ainsi, il est parvenu à surmonter
l’attachement aux personnes au profit de l’attachement aux bases et
principes sur lesquels s’appuie le mouvement du Jihad islamique en
Palestine.
Par conséquent, nous apercevons que le mouvement n’a pas été affecté,
sur le terrain et au niveau pratique, par l’assassinat de son premier
symbole et secrétaire général fondateur, au contraire, nous pensons que
le sang pur de docteur Shiqaqi a vivifié ces principes et leur a accordé
encore plus de crédibilité, comme le martyr a dit une fois : « le
mouvement dont le secrétaire général tombe martyr ne peut être vaincu ».
Tout le monde réalise à présent que la place occupée par le mouvement
du Jihad islamique dans le confit avec l’ennemi sioniste, ne peut être
débordée, et que le mouvement est parvenu à développer son action
combattante sur le terrain, et renforcer sa présence dans la scène
palestinienne et au niveau du monde musulman. Il a acquis une
reconnaissance et un respect importants à tous les niveau. La direction
actuelle du mouvement, qui a accompagné le dr. martyr dès le début de la
fondation, a non seulement respecté les mêmes idées et principes sur
lesquelles s’est basé le mouvement, malgré les difficultés et les
conditions complexes, mais a réussi à développer l’action du mouvement
et ses positions dans le cadre des ses propres constantes.
Qu’a ajouté le projet de Shiqaqi à la scène palestinienne ?
Il faut d’abord affirmer que le martyr Shiqaqi ne fut pas uniquement le
dirigeant d’une organisation ou d’un groupe palestinien armé, bien qu’il
ait été ingénieux sur ce plan, mais il était avant tout un penseur et
un théoricien au sein du mouvement islamique comme en témoignent sa
production intellectuelle et ses écrits. Le dirigeant martyr, que la
miséricorde de Dieu soit sur lui, a pu résoudre de nombreux problèmes
posés sur les scènes palestinienne et islamique, comme il a pu
concrétiser ses réflexions en une méthodologie pratique et combattante
claire.
Par exemple, il considérait que le conflit entre le patriotisme et le
nationalisme d’un côté et l’islam de l’autre, qui avait déchiré le monde
arabe au cours des années 70 du siècle dernier, était un conflit
fabriqué, alimenté par les forces qui souhaitent déchirer la nation et
paralyser ses capacités. C’est pourquoi le martyr fut le premier à avoir
appelé à régler ce problème, considérant que le conflit avec l’ennemi
sioniste rassemble l’islamiste, le patriote et le nationaliste, tout en
mettant l’islam en avant.
De même, le docteur martyr fut le premier à lancer le slogan affirmant
que la Palestine est la cause centrale du mouvement islamique, appelant
les mouvements islamistes dans le monde à orienter leur boussole vers la
Palestine, considérant que la libération de la Palestine est la
principale confrontation avec le projet occidental dans la région, et
présentant sa conception du projet sioniste comme fer de lance du projet
occidental, et non seulement une occupation éphémère. Ces contributions
et d’autres sont le noyau qui caractérise la vision du mouvement du
Jihad islamique. Sur le terrain, le martyr a réussi à concrétiser sa
vision, instaurée sur des bases coraniques, historiques et réelles, en
déclenchant le jihad et la lutte armée à l’intérieur même de la
Palestine, et en introduisant le mouvement islamique en Palestine. C’est
l’heureux résultat que nous voyons aujourd’hui, où les forces de la
résistance, et notamment islamiques, sont parvenues à accomplir
d’importantes réallisations en s’attachant à l’idée de la lutte et de la
résistance en Palestine.
Quelles sont les difficultés et les entraves qui empêchent le mouvement du Jihad islamique à accomplir le projet de Shiqaqi ?
Le mouvement du Jihad islamique en Palestine est attaché au projet du
martyr Shiqaqi, basé sur trois données : l’islam, la Palestine, le Jihad
(la lutte). C’est le fondement sur lequel a été bâti le mouvement du
Jihad islamique, qui s’y attache encore. C’est pourquoi le mouvement
tient à nouer les meilleures relations avec le mouvement islamique, avec
tous ses courants et ses orientations, sur la base que la Palestine est
la question centrale vers laquelle doivent se diriger tous les efforts,
elle est la direction (qibla) de la lutte, qu’aucun doute ne peut
traverser.
Quant aux difficultés rencontrées pour accomplir ce projet, certaines
sont dues à des conditions objectives, liées au conflit avec l’ennemi
sioniste et aux circonstances vécues par la région, et d’autres
dépendent de la situation palestinienne interne. Le mouvement n’agit pas
dans le vide, il mène une guerre réelle contre l’ennemi sioniste qui
vise ses dirigeants et ses cadres, par les poursuites, les assassinats
et les arrestations, ce qui impose d’énormes défis au mouvement. De
même, le mouvement est influencé par les conditions et les ambiances qui
secouent la région, et notamment au cours de ces dernières années, où
plusieurs guerres internes et troubles sanglants ont éclaté sur des
bases confessionnelles et sectaires ou bien ethniques. Le mouvement
tient à empêcher la question de la Palestine et de son peuple d’être
entraînée vers le marécage de la sédition, et insiste sur la nécessité
d’unifier tous les efforts vers la libération de la Palestine, qui est
l’issue véritable à la permanence des conflits qui veulent saigner la
nation, détruire ses ressources et ses potentialités, déchirer son unité
et détruire l’avenir de ses jeunes et ses générations futures.
Nous avons foi dans le fait que le conflit contre l’ennemi sioniste en
Palestine est le véritable « jihad », en considération de ce que
représente la Palestine en tant que question unificatrice, et du
symbolisme doctrinaire, historique et civilisationnel qu’elle renferme
d’une part, et parce que la confrontation avec le projet occidental
nécessite d’affronter son fer de lance, le projet sioniste en Palestine.
Sans cela, la nation ne saurait être unifiée et ne sortirait pas de son
sommeil. Au niveau de la situation palestinienne interne, nous avons
foi dans la nécessité de s’accrocher à l’unité interne, sur la base de
la résistance et la nécessité d’ élaborer un projet stratégique
palestinien unifié, qui protège notre cause et les droits de notre
peuple et qui libère notre terre et nos lieux saints. C’est pour cela
que nous sommes confiants dans le fait que le mouvement poursuit le même
projet instauré par le martyr Shiqaqi, il le continue et s’y attache
parce que ce projet a prouvé sa justesse sur le terrain même.
Le mouvement du Jihad islamique s’écarte de toute participation aux
institutions de l’Autorité (palestinienne) et se contente d’affirmer le
rôle de la résistance. Certains ont jugé cette attitude non réaliste,
disant que vous proposez un programme irréalisable. Que pensez-vous à ce
propos ?
La stratégie sur laquelle s’appuie le mouvement du Jihad islamique
affirme que la libération de la Palestine est une question qui dépasse
les capacités et les possibilités du seul peuple palestinien. C’est
pourquoi le mouvement considère que le rôle de la résistance en
Palestine se limite à deux points : d’abord mener une guerre d’usure
contre l’ennemi sioniste, l’empêcher d’encercler notre peuple
palestinien et ne pas lui permettre de fixer sa présence. La résistance a
réussi en cela dans une grande mesure. Même l’ennemi a reconnu que la
résistance constituait un danger existentiel pour son projet et sa
présence dans la région, malgré les mauvaises conditions vécues par
cette région. Le second point consiste à relever ou réveiller la nation
arabo-islamique, responsable de la libération et du sauvetage de la
Palestine. Selon cette vision, nous pensons que nous sommes en harmonie
avec notre conception de la gestion du conflit, nous pensons qu’il
s’agit d’une vision réaliste qui a prouvé sa justesse, sa sincérité et
son réalisme. La preuve en est que ceux qui disaient que la résistance
est vaine ont dû en fin de compte reconnaître son rôle et son
efficacité. C’est pourquoi, au mouvement du Jihad islamique, nous
pensons que la participation dans les appareils de l’Autorité, dans ce
sens, constitue une entrave à la résistance, et lui impose un
comportement différent qui peut entraver le mouvement de résistance et
mettre des freins à son développement, comme cela peut l’entraîner dans
des conflits et querelles internes qui ne servent pas la résistance.
Comment voyez-vous l’avenir du mouvement dans le cadre des crises et changements vécus par les Etats arabes ?
Malgré la confusion de la situation dans de nombreux Etats arabes, et
malgré notre grande peine pour toute goutte de sang versée et les
séditions qui bouleversent la région arabe, nous avons foi dans le fait
qu’il y a une issue vers laquelle tous doivent se diriger aujourd’hui,
c’est l’unité de tous les efforts pour affronter l’ennemi sioniste, le
fer de lance du projet occidental, pour sortir du marécage de l’usure.
C’est pourquoi nous voyons que l’avenir du mouvement du Jihad islamique
est lié au développement de la conscientisation de la nation
arabo-islamique, et notamment des fils du mouvement islamique. Nous
sommes certains et confiants dans l’avenir du projet du mouvement, car
c’est un mouvement qui s’appuie sur une nation, et non seulement une
organisations armée.
Comment voyez-vous le présent du mouvement du Jihad islamique aujourd’hui, 19 ans après le martyre de son fondateur ?
Je pense que toute personne équitable ne peut que constater que le
mouvement du Jihad islamique avance selon une vision ferme et accomplit
une action prodigieuse, et il est en développement constant, que ce soit
sur le terrain de la résistance et de la lutte contre l’ennemi sioniste
ou au niveau de la justesse des idées et des bases auxquelles il
s’accroche, qui prouvent jour après jour qu’il sut affronter les défis,
malgré les conditions difficiles. C’est pourquoi nous sommes confiants
dans le présent et l’avenir du mouvement, car le mouvement du Jihad
islamique, en toute simplicité, ne veut rien pour lui-même, mais il est
objectivement rattaché au mouvement de la nation et à sa cause centrale
en Palestine.
(28-10-2014 - "Baladi")
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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