Le Premier ministre tunisien Ali Larayedh a jugé mercredi, jour de son
investiture, que le terrorisme et les violences sociales menaçaient la
sécurité de son pays, résumant la gravité des défis sécuritaire et
économiques auxquels son cabinet sera confronté.
Son investiture par l’Assemblée nationale constituante (ANC) a
d’ailleurs coïncidé avec le décès d’un jeune vendeur ambulant qui
s’était immolé par le feu la veille à Tunis, poussé par la misère et le
désespoir.
"Le danger principal pour la sécurité nationale est le terrorisme, que
ce soit celui venant de l’étranger (...) ou celui qui peut provenir de
l’intérieur. Je veux dire par terrorisme un groupe organisé qui utilise
la violence et les armes contre les individus ou pour prendre le
pouvoir", a-t-il dit dans un bref entretien à l’AFP.
La Tunisie est confrontée à l’essor de groupuscules islamistes
responsables, selon les autorités, notamment de l’attaque de l’ambassade
américaine en septembre 2012 et de l’assassinat de l’opposant Chokri
Belaïd le 6 février qui a provoqué une grave crise qui a entraîné la
chute du précédent gouvernement.
M. Larayedh, ministre sortant de l’Intérieur, a aussi estimé qu’une
autre menace était "la violence sociale alimentée par la politique",
alors que la misère est à l’origine de nombreuses manifestations, dont
certaines dégénèrent en violences ou sont réprimées brutalement.
Il a à ce titre dit viser la création de 90.000 emplois en 2013 pour
apaiser les tensions et faire baisser le chômage (17%). M. Larayedh a
aussi regretté une nouvelle fois le décès d’Adel Khazri, le marchand à
la sauvette qui s’est immolé et sera enterré jeudi à la mi-journée.
Quelques heures plus tôt, le gouvernement avait prêté serment à la
présidence, et la passation de pouvoir aura lieu jeudi après-midi, soit
près d’un mois après la démission le 19 février du Premier ministre
Hamadi Jebali.
Le président Moncef Marzouki, s’adressant aux ministres de cette
coalition regroupant les islamistes d’Ennahda, deux partis laïques et
des indépendants, a aussi mis l’accent sur le désespoir des jeunes face à
la misère et au chômage.
Ce gouvernement "n’a pas de baguette magique pour résoudre les problèmes
de la pauvreté et du chômage qui se sont accumulés pendant trois
décennies (...) mais il a une volonté inébranlable pour affronter ce
tsunami de problèmes", a-t-il dit.
Le décès d’Adel Khazri est hautement symbolique en Tunisie où la
révolution avait déjà été déclenchée par l’immolation d’un vendeur
ambulant excédé par la misère et les brimades de policiers à Sidi Bouzid
(centre).
Une trentaine de vendeurs à la sauvette ont manifesté mercredi sur les
marches du théâtre municipal à Tunis, où l’immolation a eu lieu, en
scandant "Honte au gouvernement, la jeunesse brûle".
Pauvreté et chômage étaient au coeur des causes du soulèvement de 2011,
or, deux ans, après l’économie est toujours anémique et le pays est
paralysé par une interminable crise politique et institutionnelle.
M. Larayedh a assuré mardi qu’il comptait mettre un terme avant la fin
de l’année à l’impasse causée par l’absence de consensus sur la future
Constitution qui bloque l’organisation d’élections et prive la Tunisie
d’institutions stables.
Il s’est ainsi fixé comme priorités d’organiser "des élections dans les
plus brefs délais", d’"instaurer la sécurité", le pays étant déstabilisé
par l’essor d’un islamisme armé, et de "continuer de relever
l’économie, l’emploi et de lutter contre la hausse des prix".
Pour qu’une Constitution soit adoptée le soutien des deux-tiers des
députés est nécessaire, or, aucun compromis ne s’est dessiné même entre
Ennahda et ses alliés.
Un calendrier a été soumis aux députés prévoyant l’adoption de la loi
fondamentale début juillet et des élections en octobre. Si les élus ne
se sont pas encore prononcés, des observateurs ont jugé l’échéancier peu
réaliste, d’autant que les dates-limite fixées précédemment n’ont pas
été respectées.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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