Des milliers de croyants, faute de place à l'intérieur de la mosquée al-Aqsa (pour les hommes) et au dôme du Rocher (pour les femmes) - les deux remplis à craquer -, ont étendu leur tapis de prière à même le sol de l'esplanade, avant de repartir sans incident à l'issue de la prière. Cela "fait quatre mois que je n'ai pas pu prier le vendredi à al-Aqsa, même pendant le mois sacré de ramadan", relatait Amir, 18 ans, "à chaque fois, il y avait un policier druze, un Arabe comme moi, pour m'interdire d'aller prier".
Une Palestinienne d'une soixantaine d'années avait, elle, "trop peur pour venir" ces derniers temps. Alors, elle se prend en photo devant le dôme du Rocher : "Je l'envoie à mes enfants en Allemagne... enfin, je reviens prier à al-Aqsa." Les policiers israéliens restaient déployés en force auprès des portes et dans la vieille ville que surplombe l'esplanade. Mais ils se contentaient de contrôles sporadiques auprès d'hommes plutôt jeunes, semble-t-il pour s'assurer qu'ils satisfaisaient au critère d'être en situation régulière à Jérusalem.
Il n'était pas question, comme les semaines précédentes, d'interdire l'accès aux hommes les plus jeunes (aux moins de 35 ans, par exemple, la semaine passée) pour limiter les risques d'affrontements, dans un contexte très tendu à Jérusalem-Est, partie palestinienne de la ville sainte annexée et occupée par Israël. La levée de toute limitation d'âge semble bien être la première des mesures concrètes dont le secrétaire d'État américain John Kerry a obtenu la garantie lors d'entretiens jeudi en Jordanie voisine avec les dirigeants israélien, palestinien et jordanien.
John Kerry avait fait ce voyage au pied levé pour tenter de faire retomber les tensions qui dégénèrent depuis plusieurs semaines en violents affrontements à Jérusalem-Est. Lors de ses entretiens avec le président Mahmud Abbas puis avec le Premier ministre Benyamin Netanyahou et le roi Abdallah II, dont le pays assure la gestion de l'esplanade, John Kerry a dit avoir reçu des "engagements fermes".
Chacun s'est aussi engagé à "des mesures constructives, des mesures réelles, non pas rhétoriques" pour faire en sorte que les tensions "ne se transforment pas en un incendie échappant absolument à tout contrôle", a-t-il dit, sans détailler ces mesures. L'esplanade est le troisième lieu saint de l'islam, mais aussi le lieu le plus sacré pour les juifs. Vendredi, l'imam y a prêché contre "les agressions israéliennes", accusant l'État hébreu de chercher "une escalade qui pourrait mener à l'explosion".
Les extrémistes juifs ont récemment multiplié les visites sur le site, déclenchant de violents affrontements et entraînant, fait rarissime, une fermeture d'une journée de l'esplanade. Ces heurts, conjugués aux violences quotidiennes à Jérusalem-Est, à une série d'attentats meurtriers anti-israéliens et à l'agitation en Cisjordanie occupée, font redouter à Israël une troisième Intifada (soulèvement palestinien). La deuxième passe pour être partie d'al-Aqsa, justement, quand Ariel Sharon, alors chef de l'opposition de droite, s'y était rendu fin 2000. Elle avait duré cinq ans.
Les mesures convenues à Amman constitueront un "test" des intentions réelles des Israéliens et des Palestiniens, a dit John Kerry. La situation reste très tendue dans la ville sainte, après des affrontements nocturnes à Essaouiya. Israël a fermé trois des quatre routes menant à ce quartier situé en face du mont Scopus, enclave israélienne dans Jérusalem-Est, et les habitants dénoncent un état de "siège". Jeudi, un enfant y a été grièvement blessé par une balle en caoutchouc tirée par la police. Dans un tel contexte, la destruction annoncée comme imminente des maisons d'auteurs des récents attentats anti-israéliens risque d'envenimer encore l'atmosphère.
(14-11-2014)
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