jeudi 9 octobre 2014

Yémen: le nouveau Premier ministre aussitôt rejeté par les rebelles chiites

Le président yéménite a nommé mardi un nouveau Premier ministre qui a été aussitôt rejeté par les rebelles chiites qui contrôlent Sanaa, faisant craindre une aggravation de la crise politique dans un pays déjà épuisé par les violences et les divisions.
Avec deux semaines de retard sur le calendrier prévu par un accord conclu avec les rebelles houthis, le président Abd Rabbo Mansour a procédé par décret à la nomination d'Ahmed Awad Mubarak, son chef de cabinet.
La nomination est intervenue après une réunion du chef de l'Etat avec ses conseillers, dont un représentant des rebelles chiites, pendant laquelle un accord a été trouvé sur le nom du Premier ministre, selon l'agence officielle Saba.
Mais peu après, les rebelles ont annoncé leur rejet de cette décision, la jugeant "contraire à la volonté du peuple".
"Nous rejetons avec force cette nomination qui n'est pas conforme à la volonté nationale et ne répond pas à celle du peuple", a déclaré le bureau politique d'Ansarullah, la formation des rebelles dans un communiqué.
"Cette nomination est l'expression d'une volonté extérieure, un déni de la souveraineté nationale et une violation de la règle du consensus qui doit présider au processus de transition politique", a ajouté le bureau politique du mouvement chiite.
Le nouveau Premier ministre, qui avait été l'émissaire auprès des rebelles chiites, présente le profil d'un technocrate.
L'accord de cessez-le-feu, parrainée par l'ONU, prévoit outre la nomination d'un nouveau Premier ministre, le retrait des rebelles de Sanaa, leur désarmement et la relance du processus de transition politique.
Or depuis l'accord de trêve, les rebelles chiites, venus de leur fief de Saada, dans le nord du Yémen, n'ont cessé de renforcer leur emprise sur la capitale.
Ils ont notamment saisi de grosses quantités d'armes, appartenant à l'armée, lancé des patrouilles armées dans la ville et commencé à organiser un semblant de système judiciaire parallèle.
Selon des sources concordantes, les rebelles tentent d'étendre leur influence vers l'est, où se trouvent les principaux gisements pétroliers du pays et le sud-ouest, vers le détroit stratégique de Bab al-Mandeb, qui contrôle l'entrée sud de la mer Rouge.
M. Mubarak avait été auparavant le secrétaire général du dialogue national, forum réunissant les principales forces du pays engagées dans le processus de transition politique.
Né à Aden (sud), ce haut fonctionnaire, diplômé en gestion de l'Université de Bagdad, avait été l'un des candidats du Mouvement sudiste auprès de l'instance du dialogue national.
 Il devait avoir la lourde tâche de tenter de relancer l'action du gouvernement, quasiment à l'arrêt depuis l'entrée des rebelles chiites dans la capitale.
Il devait également, de concert avec le président Hadi, tenter de rétablir l'autorité de l'Etat en négociant le retrait des rebelles armés de Sanaa.
Outre le fait qu'elle a paralysé ou presque l'activité dans la capitale, la présence des rebelles commence à exaspérer une population qui doit affronter un quotidien de plus en plus difficile à cause notamment de la hausse des prix.
A deux reprises, des manifestants sont descendus dans la rue pour appeler au retrait des rebelles de la capitale.
Ce mouvement, s'il s'amplifie, risque de produire des frictions avec les combattants houthis, fortement armés et omniprésents à Sanaa.
L'entrée à Sanaa des rebelles qui recrutent dans la communauté zaïdite (branche du chiisme), complique un peu plus la transition politique engagée depuis le départ négocié en 2012 de l'ancien président Ali Abdallah Saleh, dans la foulée du Printemps arabe.
Le Yémen est déjà agité par des violences, qui sont le fait d'Al-Qaïda et de la frange dure du Mouvement sudiste, qui milite pour la renaissance du Yémen du sud, pays indépendant avant 1990.
Al-Qaïda a multiplié les attentats contre les rebelles zaïdites, majoritaires dans le nord d'un pays à dominante sunnite, promettant de les combattre sans merci.

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