dimanche 12 octobre 2014

Israël/Palestine : Gaza, un puits sans fond? Au Caire, la communauté internationale va en décider

La communauté internationale est-elle encore prête à financer la reconstruction d'une bande de Gaza dévastée cet été par sa troisième guerre en six ans ? La conférence internationale des donateurs qui se tient dimanche au Caire le dira.
Le besoin d'argent est énorme. Mais les motifs de réticence sont considérables.
A quoi bon s'engager financièrement quand les bombes ont fracassé les projets que vous souteniez; quand l'immuabilité du conflit israélo-palestinien expose au risque d'une nouvelle guerre; quand la guerre en Syrie proche vous met déjà à contribution; quand votre budget est contraint par la crise ?
Les délégués d'une cinquantaine de pays, une trentaine de ministres des Affaires étrangères, le secrétaire général des Nations unies, le secrétaire d'Etat américain, les représentants de multiples organisations humanitaires, financières ou politiques comme le Fonds monétaire ou la Ligue arabe se réunissent au Caire pour apporter leur réponse à la question et au désastre gazaoui.
La guerre de juillet et août entre Israël d'une part, le Hamas qui contrôle le territoire, et ses alliés d'autre part n'a pas seulement fait plus de 2.100 morts palestiniens et 73 israéliens.
Selon l'organisation onusienne UNRWA pour les réfugiés palestiniens, les combats ont détruit ou endommagé 80.000 maisons. Infrastructures et entreprises ont subi le même sort. L'électricité et l'eau manquent.
Le PIB devrait diminuer de 20% au cours des neuf premiers mois de 2014 par rapport à 2013. L'enclave exiguë et surpeuplée, dont une bonne partie de la population vit sous le seuil de pauvreté et où 45% de la population active et 63% des jeunes étaient au chômage avant la guerre, reste sous blocus israélien et égyptien.
"Sans action immédiate", disait récemment Steen Lau Jorgensen, directeur de la Banque mondiale pour les territoires palestiniens, une reprise de la violence "reste un danger clair et réel".
L'inquiétude d'une nouvelle conflagration s'est atténuée à mesure que le cessez-le-feu du 26 août tenait bon. Les besoins, eux, restent les mêmes.
Le gouvernement d'union palestinien a établi en vue du Caire un plan de reconstruction détaillé de quatre milliards de dollars. D'autres chiffres encore plus importants ont été avancés. La reconstruction devrait durer de longues années.
Quant à savoir si les donneurs répondront présent, "nos prévisions initiales nous disent que la conférence sera un grand succès", a assuré le ministre palestinien des Affaires étrangères, Riyad al-Malki.
Les Américains ne lieront pas leur concours à un renoncement de la part du président palestinien Mahmoud Abbas à son initiative en cours (qu'ils réprouvent) pour forcer la marche vers la reconnaissance de l'Etat palestinien, a-t-il dit.
Mais Riyad al-Malki veut surtout croire que le retour de l'Autorité palestinienne dans la bande de Gaza, matérialisé jeudi par le premier conseil des ministres du gouvernement d'unité soutenu par les rivaux du Fatah et du Hamas et composé de personnalités indépendantes, rassurera les donateurs.
L'Union européenne, grand pourvoyeur d'aide aux Palestiniens, avait conditionné ses efforts au Caire à des progrès politiques entre Palestiniens et Israéliens et entre Palestiniens eux-mêmes.
Or elle a vu depuis septembre des "développements positifs", côté palestinien mais aussi israélien, dit John Gatt-Rutter, représentant européen pour les territoires palestiniens.
La conférence pourrait produire un chiffre de promesses élevé, ne serait-ce que parce que son hôte égyptien, co-organisateur avec la Norvège habituée de l'exercice, a intérêt à un succès, dit une source proche de la conférence.
Mais deux diplomates sous couvert d'anonymat mettent en garde contre les promesses non tenues. "Un certain pessimisme est de rigueur, les gens en ont assez de payer sans horizon politique", dit l'un d'eux.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon l'a dit lui-même: pas de solution durable aux problèmes de Gaza sans règlement global entre Palestiniens et Israéliens. Or les perspectives sont sombres.
Autre complication, les fonds levés auront bien des difficultés à transiter vers Gaza en raison du blocus imposé par Israël à la bande de Gaza depuis 2006 et qui concerne également les transactions financières, estime l'ONG Oxfam.
"La majeure partie des financements promis lors de la conférence (...) va languir sur des comptes bancaires pendant des décennies avant d'avoir enfin un impact bénéfique sur les conditions de vie de la population", craint l'ONG britannique.

(11-10-2014)

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