jeudi 9 octobre 2014

Moyen-Orient : Kobané embrase les rues de Turquie, un mort lors d'une manifestation prokurde

La bataille qui oppose jihadistes et combattants kurdes pour le contrôle de la ville syrienne de Kobané a suscité mardi dans toute la Turquie de violentes manifestations contre le gouvernement islamo-conservateur turc qui ont fait au moins un mort.
Mobilisés à l'appel du principal parti politique kurde de Turquie, des milliers de personnes sont descendues dans les rues d'Istanbul, d'Ankara et des villes du sud-est à majorité kurde du pays pour dénoncer le refus d'Ankara de voler militairement au secours de Kobané (Aïn al-Arab en langue arabe), en passe de tomber entre les mains des forces du groupe de l'Etat islamique (EI).
Dans la plupart de ces villes, la contestation a dégénéré en affrontements.
Un homme de 25 ans a ainsi été tué dans des circonstances encore indéterminées à Mus (sud-est) et un autre grièvement blessé, ont rapporté les médias turcs.
Le quotidien Hürriyet a indiqué que la victime avait été atteinte par un coup de feu d'origine indéterminée, alors que la chaîne d'information NTV a assuré qu'il avait été touché en pleine tête par une grenade lacrymogène tirée par la police.
Lundi soir, le Parti républicain populaire (HDP) a appelé les Kurdes du pays --plus de 15 millions de personnes soit 20% de la population turque-- à se mobiliser contre l'entrée des jihadistes dans Kobané et contre le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir, accusé d'immobilisme et de complicité avec l'EI.
Après une première série de manifestations ponctuées d'incidents lundi soir à Istanbul ou Diyarbakir, la "capitale" kurde du sud-est, de nombreux Kurdes ont à nouveau défilé mardi contre le gouvernement.
Comme la veille, les forces de l'ordre sont intervenues massivement avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser des milliers de protestataires dans le district stambouliote de Gazi, a constaté un photographe de l'AFP.
Une personne a été grièvement blessée dans le district de Sarigazi, tout comme l'avocat Tamer Dogan, spécialisé dans la défense des droits de l'Homme, dans celui de Kadiköy, un fief de l'opposition sur la rive asiatique d'Istanbul.
De violents incidents ont également été rapportés à Diyarbakir et dans la capitale Ankara, où plusieurs policiers ont été blessés, ainsi que dans la station balnéaire d'Antalya et les villes de Mersin et d'Adana (sud).
Les autorités locales ont par ailleurs décrété le couvre-feu dans plusieurs quartiers de Mardin, une autre ville du sud-est turc à forte densité de population kurde.
Après plusieurs jours d'intenses bombardements, les jihadistes de l'EI sont entrés lundi dans Kobané (Aïn al-Arab en langue arabe) et pris le contrôle de plusieurs quartiers, où de violents combats se poursuivaient mardi.
Malgré le feu vert formel du Parlement à une opération militaire en Syrie et en Irak contre l'EI, le pouvoir islamo-conservateur turc s'est jusque-là refusé à intervenir, provoquant la colère des populations kurdes.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a froidement indiqué mardi que Kobané était "sur le point de tomber" et a plaidé, en visitant un camp de réfugiés syriens à Gaziantep (sud), pour une opération militaire terrestre contre les jihadistes.
"Nous suivons les attaques lancées sur Kobané et d'autres villes où vivent nos frères kurdes avec une grande inquiétude", a ajouté M. Erdogan .
Les Kurdes ont prévenu que la chute de Kobané provoquerait la fin des pourparlers de paix engagés il y a deux ans par Ankara et les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) pour mettre un terme à un conflit qui a fait 40.000 morts depuis 1984.
Dans un message relayé par son frère, le chef emprisonné du PKK Abdullah Öcalan a laissé au gouvernement jusqu'à la mi-octobre pour faire un geste en faveur de la paix.
"Ils (le pouvoir) parlent de résolution et de négociation mais il ne se passe rien", a dit M. Öcalan, "c'est une situation artificielle qui ne pourra pas durer".
L'Union des communautés du Kurdistan (KCK), considérée comme la branche urbaine du PKK, a de son côté appelé les "millions" de Kurdes à descendre dans la rue.

(07-10-2014)

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