dimanche 12 octobre 2014

Egypte : Taha Hussein... le doyen de la littérature arabe

Taha Hussein, en arabe طه حسين, est un romancier, essayiste et critique littéraire égyptien né le 14 novembre 1889 et mort le 28 octobre 1973. Surnommé le doyen de la littérature arabe, c'est un des plus importants penseurs arabes du XXe siècle.

Né au sein d'une famille pauvre dans un village de la Moyenne-Égypte en 1889, il est le septième d'une fratrie de treize enfants. Il perd la vue à l'âge de trois ans, des suites d'une conjonctivite mal soignée. Cette rencontre précoce avec les méfaits de la pauvreté et de l'ignorance le marquera pour la vie. Il apprend le Coran par cœur, devenant un hafiz, puis quitte son village pour le Caire où il fait ses études à l'université religieuse d'al-Azhar. Puis, il suit les cours de la nouvellement créée Université Fouad Ie. Il bénéficie ensuite d'une bourse d'État pour poursuivre ses études à Paris, où il arrive en 1914, et y soutient une thèse de doctorat sur Ibn Khaldoun à la Sorbonne en 1919. Il y rencontre sa future épouse Suzanne Bresseau (1895-1989), qui l'aida à apprendre le français, et joua un rôle important dans sa carrière comme dans sa vie.
Quand il revient de France en 1919, il travaille comme professeur d'histoire de l'Antiquité jusqu'en 1925, mais dès son retour en Égypte, il s'est appliqué à moderniser l'enseignement supérieur et à dynamiser la vie culturelle du pays. Il a également été professeur de littérature arabe à la faculté des lettres du Caire, doyen de cette faculté 1930, premier recteur de l'université d'Alexandrie, créée par lui en 1942, contrôleur général de la culture, conseiller technique, sous-secrétaire d'État au ministère de l'Instruction Publique, puis finalement ministre de l’Éducation Nationale. Une volonté extraordinaire et une grande rigueur permettent à ce jeune aveugle, issu d'un milieu modeste et paysan, une ascension sociale impressionnante.
Sur le plan littéraire, il commence comme de nombreux écrivains de la Nahda, par des travaux de traduction (dont les tragédies de Sophocle). Son œuvre principale, "al-ayyâm", (littéralement "Les Jours", traduite en français sous les titres "Le Livre des jours" pour les deux premiers tomes puis "La traversée intérieure" pour le dernier) est une autobiographie à la troisième personne. Le premier tome décrit la vie dans le village de son enfance, au bord du Nil. Il y décrit l'apprentissage précoce de la solitude dont a souffert ce jeune aveugle. Le deuxième tome s'attache à la narration de ses années d'étudiant au Caire, notamment à l'Université Al-Azhar. Là encore, la critique lucide et acérée de Taha Hussein n'épargnera pas même Al-Azhar, qui faisait pourtant figure de vénérable institution. Le dernier tome se déroule entre Le Caire, Paris et Montpellier, et décrit ses années d'études en France sur fond de Première Guerre mondiale, la vie parisienne, la découverte de l'amour, la guerre, ses difficultés... Dans ce livre, simplicité, lyrisme, et même humour, tissent le style de Taha Hussein.
Il a marqué plusieurs générations d’intellectuels du monde arabe en poussant la modernisation de la littérature arabe, notamment à travers celle de la langue arabe : les phrases avec lui (peut-être du fait qu'il n'écrit pas ses livres mais les dicte à sa fille, à qui il dédie d'ailleurs Al-ayyâm) acquièrent une plus grande souplesse, le vocabulaire est simple et abordable. Notons aussi la nouveauté que peut représenter pour le roman arabe l'écriture autobiographique comme un outil de libération (André Gide, dira à ce propos dans sa préface à la version française des deux premiers tomes  : « C'est là ce qui rend ce récit si attachant, en dépit de ces lassantes lenteurs; une âme qui souffre, qui veut vivre et se débat. Et l'on doute si, des ténèbres qui l'oppressent, celles de l'ignorance et de la sottise ne sont pas plus épaisses encore et redoutables et mortelles que celles de la cécité. »). Ses écrits sont traduits en plusieurs langues.
Il fut membre du Comité d'honneur du Centre culturel international de Royaumont.

Œuvres


  • Le livre des jours/La traversée intérieure, (al-ayyâm), Paris : Gallimard, 1947. Préface d'André Gide.
  • De la littérature préislamique, 1927
  • En été, 1932
  • L'avenir de la culture en Egypte, 1938.
  • L'amour perdu, 1942
  • Les deux cheikhs, 1943
  • L'appel du courlis, 1934 (Du'â' al-Karawân)
  • Adib, ou l'aventure occidentale, 1935 (Adîb)
  • Dans la prison d'Aboul-Ala, 1940 (Ma'a 'abî l-'alâ' fî sijni-hi), Villepreux, Éditions Milelli, 2009, ISBN 978-2-916590-11-0
  • L'arbre de la misère, 1944 (Shajarat al-Bu's), traduit de l'arabe par Gaston Wiet, Ed. Dar Al-Maaref, Le Caire, 1964
  • La grande épreuve. 'Uthmân. Paris, Vrin, trad. Anouar Louca, Jacques Jomier, préface de Louis Gardet, 1974, 158 p.
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