mardi 21 janvier 2014

Irak : des insurgés liés à Al-Qaïda imposent leur loi à Fallujah

Des insurgés liés à Al-Qaïda imposent désormais leur loi à Fallujah, une ville échappant depuis début janvier au contrôle du gouvernement irakien, qui redoute que ces combattants bien armés ne se dirigent vers la capitale, distante de seulement 60km.
Depuis plusieurs semaines, des hommes armés contrôlent également des secteurs de Ramadi - contre lesquels l’armée a lancé un assaut dimanche - et des zones rurales entre ces deux villes situées à l’ouest de Bagdad, dans la province majoritairement sunnite d’Al-Anbar.
A Fallujah, des combattants de l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont établi un tribunal islamique et enlevé des hauts responsables, dont un officier de la police et plusieurs cheikhs tribaux, selon des témoins et des chefs de tribus.
Via les haut-parleurs des mosquées, ils ont également appelé les habitants à les rejoindre dans leur combat contre les forces de sécurité irakiennes.
Un habitant, se présentant comme Abu Ossama, a indiqué que les insurgés avaient imposé des règles strictes dans certains quartiers, interdisant par exemple aux femmes de se rendre sur les marchés et aux hommes de porter des vêtements occidentaux et de raser leur barbe.
Les combattants de l’EIIL "n’acceptent rien de ce que nous décidons. Ils veulent que tout le monde travaille sous leur commandement, sous leur régime", a expliqué pour sa part un chef tribal, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat par crainte de devenir une cible.
Fallujah était un bastion de l’insurrection après l’invasion américaine de 2003, tout comme Ramadi, 40 km plus à l’ouest.
Lundi, l’armée irakienne poursuivait son assaut lancé la veille contre Ramadi. Elle menait également des opérations dans des zones rurales entre ces deux localités, où des insurgés ont trouvé refuge.
Dans la journée, un journaliste - Firas Mohammed Attiyah, travaillant pour Fallujah TV - a été tué dans une attaque perpétrée contre une patrouille de police à Khaldiyah, à l’est de Ramadi, tandis qu’un autre - Mouayad Ibrahim, reporter pigiste d’Al-Anbar TV - était blessé. Deux policiers ont également péri.
Lors d’un discours lundi, le secrétaire d’État à l’Intérieur Adnan al-Assadi a averti que les groupes insurgés avaient suffisamment d’armes pour "occuper Bagdad".
"Leur objectif n’est pas seulement de contrôler Fallujah et (la ville proche de) Garma, mais de renverser l’ensemble du système politique", a-t-il jugé, au lendemain de l’appel à "ramper vers Bagdad" lancé à ses hommes par le chef de l’EIIL.
"Il s’agit d’une occasion unique, ne la gâchez pas", a indiqué dans un message audio posté sur des forums jihadistes un homme présenté comme Abu Bakr al-Baghdadi. "Soyez le fer de lance de la bataille (...), restez en première ligne et rampez vers Bagdad et vers le Sud".
L’Irak est entraîné dans une spirale de violences depuis début 2013, et au moins 650 personnes sont mortes en janvier, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources sécuritaires et médicales.
Ces violences ont de nouveau touché lundi la capitale irakienne, où six attentats à la voiture piégée ont fait 18 morts et 40 blessés, selon des sources médicales et de sécurité.
"C’est la deuxième fois que mon restaurant est touché. La première fois, j’avais perdu mon fils. Dieu merci, cette fois je n’ai perdu personne, mais mon restaurant est détruit", se lamentait un restaurateur, Abu Mohammed.
Face à l’escalade de la violence, et alors que le pays doit tenir des élections législatives en avril, un haut responsable américain de la Défense, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat, a indiqué vendredi à l’AFP que l’armée américaine était prête à entraîner des forces irakiennes pour des missions antiterroristes dans un pays tiers. La Jordanie a donné dimanche son accord pour accueillir ces entraînements.
Le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a appelé de son côté les autorités irakiennes à mener une politique de réconciliation nationale pour mettre fin aux heurts, la communauté sunnite s’estimant discriminée par le gouvernement, dominé par les chiites.
Mais le Premier ministre Maliki a affirmé que les violences n’étaient pas la conséquence de problèmes internes, pointant du doigt dimanche des pays arabes "diaboliques et traîtres".

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