Les pourparlers entre des représentants du régime syrien et des
opposants à Bashar al Assad ont repris dimanche à Genève, sans toutefois
déboucher sur des progrès tangibles, ni sur la distribution d’aide
humanitaire à Homs ni sur des libérations de prisonniers.
Lakhdar Brahimi, le médiateur international, espérait que d’éventuels
accords sur ces points permettraient de créer un minimum de confiance
entre les deux camps avant de basculer lundi sur les questions
politiques, sur lesquelles les positions des uns et des autres sont
diamétralement opposées.
En l’absence de résultats concrets, Lakhdar Brahimi devait finalement
s’entretenir séparément dimanche après-midi avec les représentants des
deux camps afin de préparer les discussions politiques du lendemain, a
dit un représentant de l’opposition, Ahmad Ramadan.
Au lendemain d’une première série de pourparlers, les délégations de
Damas et de l’opposition se sont à nouveau retrouvées face à face
dimanche matin au Palais des nations à Genève. Rassemblées autour d’une
table en forme de U, elles ne s’adressent pas directement la parole mais
échangent par l’intermédiaire de Lakhdar Brahimi.
Les deux camps ne s’entendent même pas sur les faits les plus basiques.
Des représentants de l’opposition disent avoir soumis une liste de
47.000 prisonniers et de 2.500 femmes et enfants dont ils réclament la
libération.
Or, citant une source gouvernementale, la télévision
syrienne assure que le régime est prêt à libérer tout détenu civil "mais
la coalition de ce qui est appelé l’opposition s’est abstenue de
soumettre la moindre liste".
Délégué de l’opposition, Monzer Akbik a rapporté que les représentants
du gouvernement s’étaient engagés à répondre à une demande
d’acheminement d’aide humanitaire dans le centre de Homs, tenu par les
rebelles et assiégé depuis 18 mois par les forces de Bashar al Assad.
L’opposition affirme que 500 familles ont un besoin urgent de nourriture
et de médicaments dans cette ville, l’un des premiers foyers de la
contestation contre le régime en 2011.
"Les représentants du régime disent qu’ils vont devoir consulter Damas
avant de prendre une décision définitive à ce sujet", a dit Monzer
Akbik. "C’est une manoeuvre dilatoire (...) Nous avons relevé le manque
de sérieux de la part du régime."
D’après Ahmad Ramadan, les représentants du gouvernement n’avaient
toujours pas répondu dans l’après-midi aux demandes sur l’aide
humanitaire et sur les prisonniers.
L’opposition considère la question de l’aide humanitaire comme un test de la sincérité du régime dans la négociation.
L’agence de l’Onu qui tente depuis une semaine d’acheminer des vivres
dans le faubourg de Yarmouk, à la lisière sud de Damas, a accusé
dimanche les autorités syriennes d’entraver ses efforts malgré leurs
promesses de collaboration.
Ancien camp de réfugiés palestiniens, Yarmouk abrite aussi des Syriens
désormais. Il est tenu par les rebelles et assiégé depuis des mois par
les forces gouvernementales. Quinze personnes y seraient déjà mortes de
faim.
L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de
Palestine (UNRWA) affirme que les autorités syriennes lui ont garanti
le 18 janvier qu’il pourrait distribuer de l’aide aux habitants de
Yarmouk.
"L’office est extrêmement déçu par le fait que, pour le moment, les
assurances fournies par les autorités ne sont pas étayées par des actes
sur le terrain pour faciliter un accès rapide et régulier à Yarmouk", a
dit un porte-parole de l’UNRWA, Chris Gunness.
Seulement 138 colis permettant de nourrir huit personnes pendant 10
jours ont pu être distribués, alors que 18.000 personnes sont bloquées à
Yarmouk.
Les représentants du régime aux pourparlers de Genève contestent la
stratégie des petits pas de Lakhdar Brahimi.
"L’autre partie est venue ici pour discuter d’un petit problème ici ou
là. Nous, nous sommes là pour débattre de l’avenir de la Syrie", a dit
Boussaïna Chaabane, conseillère du président Assad.
Même sans accord sur les questions humanitaires, les discussions
porteront lundi sur les aspects politiques, a dit l’opposant Monzer
Akbik, en insistant à nouveau sur la mise en oeuvre intégrale de la
déclaration de Genève I, le nom donné à la première conférence de paix
sur les rives du Léman.
Cette déclaration de juin 2012 appelle à la formation par consentement
mutuel d’une autorité de transition dotée des pleins pouvoirs exécutifs.
Cette formulation est interprétée de manières complètement divergentes
par les opposants au régime et par les autorités syriennes. Les premiers
considèrent qu’elle induit la mise à l’écart de Bashar al Assad, ce que
rejettent catégoriquement les secondes.
"Si quelqu’un pense ou croit qu’il y a une possibilité de parvenir à ce
qui est appelé la démission du président Bashar al Assad, cette personne
vit dans un monde mythique et qu’elle reste alors chez Alice au pays
des merveilles", a dit le ministre syrien de l’Information, Omran Zoabi.
Boussaïna Chaabane a abondé dans ce sens en jugeant que la déclaration
de Genève n’était "pas le Coran, pas les Evangiles". "Elle a été
formulée en juin 2012. Nous sommes désormais le 26 janvier 2014. La
situation sur le terrain a changé. Nous évoluons en fonction de ce que
la réalité exige."
Au cours de l’été 2012, les rebelles avaient pris le contrôle d’une
grande partie d’Alep, la grande ville du nord de la Syrie, et défiaient
les forces d’Assad aux abords de Damas. Depuis, soutenues par les
combattants du Hezbollah libanais et guidées par des commandants
militaires iraniens, les forces gouvernementales ont regagné du terrain
et consolidé leur contrôle sur le centre de la Syrie.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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