Un gouvernement d’indépendants doit être présenté samedi en Tunisie, à
la veille du vote d’adoption de la nouvelle loi fondamentale, des
avancées devant résoudre une profonde crise politique et achever la
"transition démocratique" engagée avec la révolution de 2011.
Le ministre sortant de l’Industrie Mehdi Jomaâ va présenter au président
Moncef Marzouki ce cabinet apolitique vers 17H00 GMT, le parti
islamiste Ennahda ayant accepté de quitter le pouvoir pour résoudre la
longue crise politique provoquée par l’assassinat du député d’opposition
Mohamed Brahmi fin juillet.
Le vote d’adoption de la Constitution a d’ailleurs été reporté à
dimanche pour permettre aux députés d’adopter samedi une réforme de la
motion de censure. Il s’agit de rendre plus difficile pour la
Constituante (ANC) de limoger le gouvernement de M. Jomaâ qui doit
entrer en fonction la semaine prochaine et conduire le pays vers des
élections en 2014.
La nature précise de ce changement faisait encore l’objet de
négociations vendredi soir. Les élus reviendront ensuite dimanche matin à
l’ANC pour le vote d’adoption de la future loi fondamentale du pays, en
cours d’élaboration depuis plus de deux ans.
Ils l’ont déjà au préalable approuvé article par article du 3 au 23
janvier, si bien qu’elle devrait obtenir l’assentiment de la majorité
requise des deux tiers des 217 députés. Les partis ont négocié, après
moult disputes et controverses, des compromis sur les articles
problématiques, notamment ceux traitant de l’islam.
Le cas échéant, la Constitution sera promulguée lundi, autrement une
deuxième lecture devra être organisée. Si elle échoue aussi, un
référendum devra avoir lieu.
La Constitution consacre un régime avec un exécutif bicéphale où le
Premier ministre aura le rôle dominant mais où le chef de l’Etat dispose
d’importantes prérogatives en matière de défense et de politique
étrangères notamment.
L’islam n’y a pas été inscrit comme source de droit, mais les références
à la religion sont nombreuses, laissant une place importante à
l’interprétation.
Ainsi, la Tunisie y est définit comme "un Etat libre, indépendant et
souverain, l’islam est sa religion". Si "la liberté de croyance et de
conscience" est garantie, l’Etat s’engage aussi à "interdire toute
atteinte au sacré". Cette version de compromis a cependant été critiquée
à droite comme à gauche. Vendredi, des centaines d’islamistes radicaux
ont manifesté à Tunis pour dénoncer ce texte.
Sur le plan des droits humains, les grandes libertés y sont inscrites,
même si des ONG de défense des droits de l’Homme s’inquiètent de
dispositions souvent vagues. L’objectif de parité homme-femme dans les
assemblées élues, une disposition exceptionnelle dans le monde arabe, y a
été inclue. "C’est une Constitution progressiste, répondant aux espoirs
de la révolution", a estimé le président de l’Assemblée Mustapha Ben
Jaafar, reconnaissant qu’il "peut y avoir des améliorations".
Le chef d’Ennahda, Rached Ghannouchi a lui loué une des "meilleures
constitutions au monde" qui fera "de la Tunisie la première démocratie
arabe". Moins dithyrambiques, des détracteurs des islamistes ont jugé
plutôt positif le résultat final. Ce n’est "probablement pas la plus
belle, ni la plus équilibrée, ni la plus révolutionnaire des
Constitutions, mais (c’est) certainement un grand pas vers un avenir à
bâtir", a jugé la députée Selma Mabrouk sur sa page officielle.
Pendant plus de deux ans, les travaux sur la Constitution n’ont eu cesse
d’être ralentis par la profonde méfiance régnant entre les islamistes
et leurs opposants ainsi qu’une succession de crises politiques.
Les travaux de l’ANC ne sont pas pour autant finis. Les députés doivent
encore adopter dans les jours à venir une législation électorale, alors
que la commission chargée d’organiser les élections, cruciales pour
achever la transition et permettre l’entrée en vigueur de la loi
fondamentale, vient tout juste d’être formée.
Les partis militent pour qu’elles aient lieu en 2014, mais aucun calendrier précis n’a été avancé.
"La date des élections sera déterminée par l’Instance électorale en
fonction des délais qu’elle estime nécessaire pour la tenue de scrutins
libres, transparents et intègres", a souligné, un représentant
d’Ennahda, Ajmi Lourimi.
La Tunisie, berceau du Printemps arabe, a réussi à ne pas basculer
jusqu’à présent dans le chaos, mais sa stabilité reste minée par l’essor
de groupes jihadistes et par de profonds problèmes économiques et
sociaux, déjà à l’origine de la révolution de janvier 2011.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire