Un gouvernement d’indépendants a finalement été formé dimanche en
Tunisie après six mois de crise politique, une annonce coïncidant avec
l’adoption espérée dans la soirée de la nouvelle Constitution, trois ans
après la révolution qui lança le Printemps arabe.
"J’ai remis au président la liste des membres du gouvernement candidat
pour recevoir la confiance de l’Assemblée nationale constituante", a
annoncé le Premier ministre désigné Mehdi Jomaâ, en disant espérer qu’il
"l’obtiendra le plus vite possible".
La législation prévoit un vote sous trois jours.
"J’ai formé ma liste sur la base de trois critères : la compétence, l’indépendance et l’intégrité", a-t-il dit.
Ce cabinet est "une équipe extraordinaire qui a conscience des défis",
a-t-il ajouté, "la mission n’est pas facile", la Tunisie étant sans
cesse déstabilisée, depuis la révolution qui a chassé Zine El Abidine
Ben Ali, par l’essor de jihadistes, les batailles politiques et les
conflits sociaux, déjà moteur du soulèvement de 2011.
M. Jomaâ a souligné que "les élections représentent la priorité des
priorités", alors que les islamistes du parti Ennahda ont accepté de
laisser le pouvoir à des indépendants pour qu’ils organisent les
législatives et la présidentielle en 2014.
Comme promis, la liste est composée de personnalités réputées
indépendantes et apolitiques. M. Jomaâ, ministre sortant de l’Industrie,
a reconduit cependant un de ses collègues, le ministre de l’Intérieur
Lotfi Ben Jeddou, bien que ses détracteurs aient lutté jusqu’au bout
pour qu’il quitte ses fonctions. Ce fut l’une des causes de son échec à
annoncer son équipe dès samedi.
L’entrée en fonction d’un cabinet apolitique est la pierre angulaire
d’un accord entre Ennahda, majoritaire à l’Assemblée, et ses détracteurs
pour sortir le pays de la profonde crise politique déclenchée il y a
six mois par l’assassinat d’un député d’opposition, Mohamed Brahmi.
Un vote sur la Constitution dans la soirée
Par ailleurs, l’Assemblée nationale constituante (ANC) devait adopter dimanche soir la nouvelle Constitution.
L’Assemblée a d’abord rectifié trois articles du projet puis les députés
ont adopté une réforme de la motion de censure pour permettre l’annonce
de la composition du gouvernement.
La séance parlementaire consacrée à la Constitution a commencé peu avant 21H00 GMT (22H00 locale).
Le rapporteur du texte, Habib Kheder, a entamé la lecture des 149
articles de la Loi fondamentale, après quoi le vote solennel
interviendra. Pour être adopté, le texte doit recueillir 145 voix sur
217 élus.
Le texte présenté dimanche a déjà été approuvé article par article lors
de débats houleux entre le 3 et le 23 janvier, opposant notamment
Ennahda et ses détracteurs. Des compromis ont été négociés à chaque
étape si bien que la Loi fondamentale a toutes les chances d’être
adoptée.
Une cérémonie de signature par le chef de l’Etat Moncef Marzouki, le
président de l’ANC Mustapha Ben Jaafar et le Premier ministre sortant,
l’islamiste Ali Larayedh, a d’ores et déjà été annoncée pour 10H00 GMT
lundi.
Cette Constitution, qui consacre un exécutif bicéphale et accorde une
place réduite à l’islam, devrait recueillir la majorité nécessaire des
deux tiers, des compromis assez larges ayant été négociés pour permettre
son adoption.
Plus de deux ans de travaux ont été nécessaires pour aboutir à ce
compromis visant à éviter une dérive autoritaire dans un pays qui a
connu plus d’un demi-siècle de dictature, sous Habib Bourguiba, puis
sous Zine El Abidine Ben Ali, renversé par la révolution de janvier
2011.
En cas d’échec cependant, une seconde lecture devra avoir lieu. Si elle
échoue aussi, le projet sera soumis à référendum, ce que l’essentiel de
la classe politique souhaite éviter.
La Tunisie, berceau du Printemps arabe, a réussi jusqu’à présent à ne
pas basculer dans le chaos, mais sa transition postrévolutionnaire a été
considérablement freinée par le climat de méfiance entre Ennahda et ses
détracteurs.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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