Après presque trois ans de conflit en Syrie, émissaires du président
Bashar al-Assad et membres de l’opposition en exil vont s’assoir à la
table des négociations à Genève pour des premiers pourparlers de paix
aux chances minimes de succès.
Arrivés jeudi à Genève après une conférence sous tension à Montreux qui
réunissait une quarantaine de pays et d’organisations, les deux
délégations vont enfin entrer dans le vif du sujet pour tenter de mettre
fin au chaos meurtrier qui a déjà fait plus de 130.000 morts en Syrie
et a forcé des millions de civils à abandonner leurs maisons ou à
s’exiler.
Diplomates et observateurs se font peu d’illusions sur l’issue de ces
négociations mais rappellent que le simple fait que les deux camps
acceptent de se trouver ensemble dans une même pièce est en soi un
événement.
Le maître d’oeuvre de ce délicat exercice de diplomatie, l’émissaire de
l’ONU pour le conflit syrien, Lakhdar Brahimi va entrer en scène à 11h
locales (10H GMT). Et le ton des Syriens ces deux derniers jours,
notamment celui de Damas accusant les opposants d’être des "traîtres" et
des "agents" à la solde de l’étranger, laisse augurer de débuts
difficiles.
Selon plusieurs sources diplomatiques, M. Brahimi réunira les deux
délégations dans une même pièce au siège de l’ONU en Europe. "Il
s’exprimera pendant une trentaine de minutes en introduction", selon une
source diplomatique occidentale. Les Syriens, eux, ne parleront pas.
Dans un second temps, chaque délégation sera conduite dans sa propre
salle où Lakhdar Brahimi viendra discuter du cadre des négociations.
Selon cette source diplomatique occidentale, M. Brahimi pourrait tenter
dès vendredi ou samedi de réunir une nouvelle fois les deux délégations
dans la même salle où les négociateurs se parleront "par Brahimi"
interposé.
Le premier cycle de négociations est censé durer "jusqu’à la fin de la
semaine prochaine", soit le 31 janvier. "Mais tout peut très bien
s’arrêter dès vendredi", rappelle, prudent, une source diplomatique
occidentale.
"Nous savons que cela prendra du temps, et si cela doit prendre un jour
de plus, cela prendra un jour de plus. Nous savions que ce ne serait pas
un processus facile", a également indiqué un haut responsable du
Département d’Etat américain.
La délégation de Damas est conduite par le très chevronné ministre des
Affaires étrangères Walid Mouallem. Si Ahmad Jarba est le chef de la
délégation de l’opposition, il ne devrait pas en être le négociateur en
chef. Le nom du négociateur de l’opposition doit être annoncé vendredi, a
indiqué à l’AFP Monzer Aqbiq, porte-parole de la délégation.
La question du sort de Bashar al-Assad reste le principal motif de
désaccord, l’opposition posant comme principe son départ et la
constitution d’un gouvernement transitoire où il ne jouerait pas de
rôle, le régime rejetant cette idée.
Faute de consensus sur cette question centrale, Lakhdar Brahimi pourrait
se concentrer, ainsi que les Occidentaux et les Russes, sur la
recherche de premières mesures visant à soulager la population.
M. Brahimi a évoqué des "indications" sur une disponibilité des
délégations à discuter de l’acheminement de l’aide humanitaire, de
cessez-le-feu localisés, notamment à Alep, et d’échanges de prisonniers.
Selon une source diplomatique, l’opposition pourrait mettre sur la table
l’idée d’"aide humanitaire couplée à des cessez-le-feu localisés" dès
le début de la négociation.
Une partie de l’équation tient également à la capacité des "parrains"
des deux camps, les Etats-Unis pour l’opposition et la Russie pour le
président Bashar al-Assad, à peser et à manoeuvrer en coulisses.
Mercredi à Montreux, le chef de la diplomatie américaine John Kerry n’a
pas mâché ses mots contre Damas et réitéré son exigence qu’Assad quitte
le pouvoir. La Russie pour sa part a montré un soutien ferme mais sobre
au régime. Et nul ne sait comment dans ce "grand jeu" de luttes
d’influence et de bluff diplomatique, Occidentaux, Russes, monarchies du
Golfe et Syriens vont avancer leurs pions.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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