Les événements graves se succédant en Palestine occupée, sans que
beaucoup se rendent compte de ce que les déclarations et les décisions
prises par le gouvernement israélien vont avoir comme impact sur la
cause palestinienne.
Les responsables sionistes, appuyés et défendus par l’administration
étasunienne, tentent de profiter, au maximum, des développements
politiques et militaires de la région – depuis la guerre qui se déroule
en Syrie et ses répercussions sur le Liban et jusqu’aux préoccupations
du peuple égyptien – afin de créer les conditions nécessaires pour faire
passer le projet dit « Israël, Etat des Juifs dans le monde » ; ce
projet que le président étasunien Barak Obama avait remis en avant dès
le début de son second mandat afin de tenir la promesse qu’il avait
faite au lobby sioniste dans ce sens.
Le projet dit de « L’accord – cadre »
Pour ce faire, un nouveau projet fut mis en route, « l’accord – cadre »,
que le ministre des Affaires étrangères John Kerry avait mis en route
en novembre dernier, lors de sa dixième visite dans la région.
Ce projet – qui fut plébiscité par l’Arabie saoudite et la Jordanie,
avant même d’en connaitre le contenu et d’en avoir vu la version
complète – s’est avéré être très dangereux, parce qu’il impose au peuple
palestinien de nouvelles concessions se rapportant aux problèmes de
souveraineté, de territoires, du droit au retour. Tout cela à un moment
où Israël intensifie les mesures de « judaïsation » de Jérusalem, mais
aussi la colonisation de nouveaux territoires palestiniens ; ainsi,
dernièrement, Netanyahu signa la construction de 1400 nouvelles
habitations, dont la moitié autour de Jérusalem et l’autre moitié dans
des zones stratégiques en Cisjordanie. A cela, n’oublions pas d’ajouter
les bombardements, les assassinats et les milliers de détenus
palestiniens dans les geôles israéliennes…
Quelles sont les grandes lignes du projet ?
Le projet du ministre John Kerry part de la création de « deux Etats
indépendants » en Palestine ; cependant, il renonce très vite à cette
« indépendance » pour donner – comme il est dit – à Israël le droit de
protéger la sécurité de son territoire à travers le déploiement, pour
une durée de 10 à 15 ans, d’une force militaire sur les frontières
séparant les deux Etats.
Le projet ne se contente pas de ces mesures dites « de protection » ; il
va encore plus loin, puisqu’il stipule qu’Israël sera aussi chargé de
la sécurité des frontières séparant la Cisjordanie de la Jordanie, et
plus précisément le long du Jourdain, à travers des systèmes
d’observation sophistiqués et permanents.
Cela, sur le plan global. Quant aux autres problèmes contenus dans la
Résolution 194 de l’ONU et concernant le sort de Jérusalem et le droit
au retour des refugiés palestiniens dans les territoires de 1948 et
autres, l’ambiguïté plane ; parce que « L’Accord – cadre », tout en
parlant de « Jérusalem – capitale des deux Etats » et aussi du « droit
au retour », ne précise pas ce qui va advenir des colonies israéliennes à
Jérusalem et dans sa banlieue Est ni les délais pour mettre en
application le principe du retour.
Pourquoi une telle ambiguïté sinon parce que l’administration Obama ne
veut en aucun cas mettre dans l’embarras le gouvernement israélien,
surtout que le ministre Avigdor Liebermann a insisté dans une
déclaration récente sur le fait qu’Israël « ne peut accepter qu’un
accord de paix ne prenne en considération la question d l’échange des
terres »… cet échange qui, selon Liebermann, doit commencer par le
« transfert des habitants (palestiniens) hors du triangle et de la
vallée de ‘AAra afin de renforcer la judaïté d’Israël » et ne se
terminer, selon nous, qu’après avoir chassé les Palestiniens qui vivent
dans les territoires de 1948, ces territoires étant le point de départ
de ce qui est appelé le Grand Israël.
« La vallée du Jourdain est et restera israélienne » ?
Et, afin de pouvoir soutirer de nouvelles concessions des Palestiniens,
et des Arabes en général, sans toutefois mettre dans l’embarras
l’Administration Obama qui avait fait des promis-jurés concernant l’Etat
palestinien, le gouvernement présidé par Netanyahu a pris des décisions
irrévocables, non seulement en matière de colonisation, mais aussi dans
deux directions principales : la première concernant la proposition
faite par une commission ministérielle israélienne de s’emparer de la
vallée du Jourdain avant de signer un accord de paix avec les
Palestiniens ; la seconde – qui constitue la mise en exécution de la
proposition précitée – concernant la création par une bande
d’extrémistes (menée par le ministre israélien de l’intérieur, Gédéon
Saar) d’une colonie dans cette vallée sous le mot d’ordre : Le Jourdain
est israélien, et il le restera.
Tout cela accompagné d’une vaste campagne (80 pour cent des Israéliens,
dit-on) disant que le projet de John Kerry était incapable de réaliser
la paix.
Cette nouvelle campagne menée contre la politique internationale
étasunienne vise, sans aucun doute, à soutirer plus d’avantages des
responsables étasuniens, surtout à la suite de l’accord avec l’Iran qui a
permis à ce pays de briguer la candidature du club du nucléaire, d’une
part, toute en mettant en veilleuse le projet israélien de bombarder les
réacteurs iraniens. Parce que, pour les responsables israéliens, il
n’est plus suffisant que les responsables étasuniens affirment et
réaffirment que la sécurité d’Israël st une des priorités de la
politique de Washington, il leur faut aussi des preuves tangibles et un
appui certain, tant sur le plan économiques que militaires.
L’autorité palestinienne et la politique de reculade
Mais si nous ne sommes pas surpris par l’attitude du gouvernement
israélien, qui a toujours su comment profiter de l’appui du lobby
sioniste étasunien, l’AIPAC en particulier, afin de liquider le dossier
palestinien et de mettre fin au droit au retour, par contre nous ne
pouvons qu’être très inquiets de la ligne politique suivie par
l’autorité palestinienne. Une ligne qui va dans le sens des exigences
étasuniennes, qui accepte sans résistance aucune le retour a la table
des négociations bilatérales en dehors des Nations Unies et qui passe
sous silence les projets de colonisation du gouvernement israélien. Une
ligne que John Kerry qualifia de « sacrifice », puisque, selon des
sources bien informées, l’autorite palestinienne serait d’accord sur la
suppression de la clause concernant le droit au retour et qu’elle aurait
accepté qu’une partie des négociations se fasse dans le secret le plus
total, rappelant par là d’autres temps, ceux qui précédèrent la
signature de l’accord d’Oslo et tout ce qui s’ensuivit comme tragédies
pour le peuple palestinien.
C’est pourquoi il est a craindre que de mauvais jours attendent, de
nouveau, le peuple palestinien, tant en Cisjordanie qu’a Gaza, parce que
le nouveau projet étasunien va accorder une nouvelle victoire aux
Israéliens, leur permettant d’aller plus avant dans leur projet de
d’éliminer toute possibilité de voir renaitre l’Etat palestinien…
John Kerry avait présenté l’« accord – cadre » comme étant un puzzle
dont les pièces se mettent en place graduellement et après mure
réflexion. Jusqu’à maintenant, ce « jeu » a bien réussi aux Israéliens,
parce que le négociateur palestinien s’est laissé faire. Va-t-il
continuer dans ce sens ? Et que fera la gauche palestinienne pour
s’opposer au nouveau projet étasunien et reprendre en main la
situation ?
Telle est la question.
D. Marie Nassif-Debs
Article paru dans le bimensuel « An Nidaa »
Numéro 229, 17 janvier 2014
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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