Les pourparlers de paix pour la Syrie sont partis sur de mauvaises bases
vendredi à Genève après l’échec de l’ONU à réunir dans la même pièce
les délégations syriennes et les menaces de Damas de se retirer au
premier jour des négociations.
L’émissaire de l’ONU pour le conflit syrien, Lakhdar Brahimi, souhaitait
réunir émissaires du président Bashar al-Assad et membres de
l’opposition en exil à 10H GMT pour une réunion, dans la même pièce, où
seul le diplomate onusien aurait pris la parole.
Mais l’opposition a refusé de s’asseoir à la même table que le régime,
arguant du fait que le gouvernement syrien devait accepter le principe
d’un gouvernement de transition sans Assad avant toute négociation
directe.
Face à cette position, le très chevronné chef de la diplomatie syrienne
Walid Mouallem a informé M. Brahimi, lors d’une réunion bilatérale à
10H00 GMT, que sa délégation "quittera Genève si des séances de travail
sérieuses ne sont pas tenues demain" samedi.
"L’autre partie (est) peu sérieuse et pas prête" aux pourparlers de
paix, a indiqué M. Mouallem cité par la télévision d’Etat syrien.
"Le problème de ces gens est qu’ils ne veulent pas faire la paix, ils
viennent ici avec des pré-conditions", a accusé le vice-ministre syrien
des Affaires étrangères Fayçal Moqdad, qualifiant la revendication d’un
départ d’Assad d’"illusions".
Mais l’opposition a insisté de son côté qu’elle n’allait pas s’asseoir
avec le régime tant que celui-ci n’aurait pas accepté de négocier
l’accord dit Genève I qui prévoit une période de transition comme issue
au conflit en Syrie qui a fait plus de 130.000 morts.
"Nous ne voulons pas nous asseoir avec eux tant que le régime n’aura pas
accepté" Genève I, a affirmé à l’AFP Nazir al-Hakim, membre de la
délégation de l’opposition.
Régime et opposition divergent sur l’interprétation du contenu de Genève
I, signé entre les grandes puissances en 2012 et prévoyant une période
de transition. Les opposants à Bashar al-Assad réclament que celle-ci
implique nécessairement un départ du président, tandis que Damas rejette
ce scénario et parle d’un gouvernement d’union.
"Nous parlons d’un gouvernement d’union élargi mais pour y arriver, il
faut voir qui représente cette opposition", a indiqué M. Moqdad.
Selon une porte-parole de l’ONU à Genève Alessandra Vellucci, M. Brahimi
va rencontrer les opposants conduits par le chef de la Coalition
syrienne Ahmad Jarba à 15H GMT. "Il faut être patient et voir le
processus se développer", a ajouté la porte-parole.
Diplomates et observateurs se font peu d’illusions sur l’issue de ces
négociations mais rappellent que le simple fait que les deux camps
acceptent de venir à Genève est en soi un événement.
Le premier cycle de négociations est censé durer "jusqu’à la fin de la semaine prochaine", soit le 31 janvier.
"Nous savons que cela prendra du temps, et si cela doit prendre un jour
de plus, cela prendra un jour de plus. Nous savions que ce ne serait pas
un processus facile", a également indiqué un haut responsable du
Département d’Etat américain.
Faute de consensus sur la question centrale de l’avenir d’Assad, Lakhdar
Brahimi pourrait se concentrer, ainsi que les Occidentaux et les
Russes, sur la recherche de premières mesures visant à soulager la
population.
M. Brahimi a évoqué des "indications" sur une disponibilité des
délégations à discuter de l’acheminement de l’aide humanitaire, de
cessez-le-feu localisés, notamment à Alep, et d’échanges de prisonniers.
Selon une source diplomatique, l’opposition pourrait mettre sur la table
l’idée d’"aide humanitaire couplée à des cessez-le-feu localisés" dès
le début de la négociation.
Une partie de l’équation tient également à la capacité des "parrains"
des deux camps, les Etats-Unis pour l’opposition et la Russie pour le
président Bashar al-Assad, à peser et à manoeuvrer en coulisses.
Mercredi à Montreux, le chef de la diplomatie américaine John Kerry n’a
pas mâché ses mots contre Damas et réitéré son exigence qu’Assad quitte
le pouvoir. La Russie pour sa part a montré un soutien ferme mais sobre
au régime. Et nul ne sait comment dans ce "grand jeu" de luttes
d’influence et de bluff diplomatique, Occidentaux, Russes, monarchies du
Golfe et Syriens vont avancer leurs pions.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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