mercredi 4 février 2015

Jordanie : deux djihadistes exécutés en réponse à l'otage brûlé vif

Photographie diffusée par l'organisation terroriste l'EI montrant le pilote Jordanien l'instant avant que le feu ne l'atteigne.
 
Amman, qui avait promis une réponse "terrible" après le meurtre d'un pilote jordanien par le groupe État islamique (EI), a procédé à l'exécution mercredi à l'aube de deux djihadistes condamnés à mort, dont une Irakienne réclamée par l'EI. Sajida al-Rishawi, condamnée à mort pour sa participation à des attentats meurtriers en 2005 à Amman, et un autre Irakien, Ziad Karbouli, un responsable d'al-Qaida, ont été exécutés à 3 heures, a dit le porte-parole du gouvernement, Mohammad Momani. Après le franchissement par l'organisation djihadiste d'un nouveau palier dans l'horreur en diffusant une vidéo dans laquelle le pilote de 26 ans est brûlé vif dans une cage, un responsable la sécurité jordanienne avait indiqué la veille que des prisonniers djihadistes seraient pendus à l'aube.
"Un groupe de djihadistes condamnés à mort seront exécutés, à commencer par Sajida al-Rishawi", avait précisé ce responsable sous le couvert de l'anonymat. L'EI avait dit ces derniers jours qu'il laisserait la vie sauve au soldat Maaz al-Kassasbeh si Amman relâchait l'Irakienne, mais les autorités jordaniennes réclamaient d'abord des preuves de vie de leur pilote. Sajida al-Rishawi est une kamikaze irakienne condamnée à mort en Jordanie pour des attentats perpétrés en 2005 dans la capitale jordanienne. Âgée de 44 ans, elle était détenue dans une prison jordanienne depuis sa condamnation à mort en septembre 2006.
Quelques heures après avoir condamné la "barbarie" des djihadistes, le président américain Barack Obama, dont le pays mène une coalition internationale en guerre contre l'EI en Syrie et en Irak, a reçu le roi Abdallah II de Jordanie à la Maison-Blanche. "Le président et le roi Abdallah ont réaffirmé que l'abominable meurtre de ce courageux Jordanien ne servira qu'à renforcer la détermination de la communauté internationale à détruire l'EI", a déclaré un porte-parole officiel américain, à l'issue de cette entrevue. La diffusion de cette vidéo aux images insoutenables est intervenue trois jours après l'annonce de l'exécution d'un otage japonais, décapité une semaine après la mort dans les mêmes circonstances d'un autre prisonnier ressortissant de ce pays.
Cage en métal
Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a qualifié cette exécution d'"ignoble et impardonnable". Sur les images de la vidéo, un homme présenté comme Kassasbeh, en tenue orange, est enfermé dans une grande cage en métal. Un homme masqué et armé, présenté comme un "émir d'une région bombardée par la coalition des croisés", prend une torche et met le feu à de l'essence. Les flammes se propagent jusqu'à la cage et le supplicié se transforme vite en une boule de feu. Kassasbeh, un sous-lieutenant de 26 ans, avait été capturé fin décembre par l'EI après le crash de son avion en Syrie où son appareil participait aux frappes de la coalition internationale. "Celui qui doutait de la barbarie de l'organisation EI, en voici la preuve (...), et celui qui doutait de l'unité des Jordaniens, on lui prouvera le contraire", avait déclaré mardi le ministre jordanien de l'Information et porte-parole du gouvernement, Mohammad Momani.
Juste après la diffusion de la vidéo, la télévision officielle jordanienne a affirmé que cette exécution remontait au 3 janvier, une déclaration semblant indiquer qu'Amman était déjà au courant de la mort du pilote. Le ministère des Affaires religieuses a demandé aux Jordaniens de prier mercredi pour le pilote dans toutes les mosquées du pays. "Cette organisation (de l'EI) semble ne s'intéresser qu'à la mort et à la destruction", a déclaré Barack Obama, appelant à redoubler de "détermination" pour lutter contre les djihadistes.
Soutien
Lors d'une rencontre avec le roi de Jordanie, le vice-président américain Joe Biden a réitéré le "soutien sans faille" des États-Unis à la Jordanie et salué la contribution de ce pays au sein de la coalition internationale mise en place pour contrer l'EI. La France et la Grande-Bretagne, deux pays participant à la coalition internationale, ont également exprimé leur révulsion. Le Premier ministre britannique David Cameron a estimé que cette exécution démontrait une nouvelle fois que l'EI "est l'incarnation du mal" alors que le président français François Hollande condamnait un "assassinat barbare". Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a dénoncé un "acte effroyable". Dans une déclaration unanime, les 15 pays membres du Conseil de sécurité ont condamné un "acte haineux et lâche (qui) montre une nouvelle fois la brutalité" de l'EI. Dans sa vidéo, l'EI donne le nom, les photos et les adresses de pilotes jordaniens de la coalition internationale et déclare offrir une récompense de "100 pièces en or" à ceux qui tueraient ce qu'il appelle un "pilote croisé".
Le groupe Etat islamique, accusé de nettoyage ethnique et de crimes contre l'humanité par l'ONU, a multiplié les exactions - décapitations, rapts, crucifixions - dans les régions sous son contrôle. Pour Shiraz Maher, chercheur à l'International Centre for Study of Radicalisation à Londres, la mise en scène de la mort du pilote jordanien est la chose "la plus horrible, dégoûtante" diffusée par l'EI ces deux dernières années. Kassasbeh "est le premier individu qu'ils ont capturé à être directement impliqué dans la coalition". Son exécution "est un acte de guerre", a-t-il estimé.

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