mardi 29 avril 2014

Syrie : l’ONU sommée d’imposer le passage des secours

Une trentaine d’éminents juristes internationaux ont adressé mardi une lettre ouverte à l’ONU lui demandant d’imposer le passage vers la Syrie de convois humanitaires venant de Turquie ou de Jordanie, afin de secourir plus rapidement les civils syriens. Le Conseil de sécurité a adopté en février la résolution 2139 qui demande au régime syrien d’autoriser ces opérations de secours transfrontalières, mais Damas renâcle. Les signataires considèrent que l’ONU a le droit d’imposer ce passage transfrontalier au nom du droit humanitaire. Ils déplorent que l’ONU "ne procède pas à ces opérations vitales de crainte que certains États membres ne les jugent illégales" et ils critiquent "une interprétation trop prudente du droit international humanitaire".
Le Conseil doit examiner mercredi un rapport du secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon soulignant que la résolution 2139 n’est pas appliquée, ni par le régime ni par l’opposition, et qui demande au Conseil d’agir. "L’ONU et d’autres agences humanitaires affirment depuis longtemps qu’il n’est possible d’accéder à des centaines de milliers de civils qu’à partir de pays voisins tels que la Turquie et la Jordanie", souligne la lettre ouverte, qui doit être publiée dans le Guardian britannique et Al-Hayat. "Le droit international humanitaire dispose sans équivoque qu’une action humanitaire impartiale doit être entreprise là où une population civile a besoin d’une aide vitale", ajoutent les signataires.
"Nous jugeons qu’il n’existe aucun obstacle juridique empêchant l’ONU de procéder directement à des opérations humanitaires transfrontalières et d’apporter son soutien aux ONG afin qu’elles en effectuent également", ajoutent-ils. Ils font valoir en particulier "que les parties ne peuvent refuser leur consentement que pour des motifs légaux valables", comme des opérations militaires sur le trajet proposé pour l’acheminement de l’aide. "Elles ne peuvent dès lors légitimement refuser leur consentement pour affaiblir la résistance de l’ennemi, réduire les civils à la famine ou empêcher la délivrance de soins médicaux", expliquent-ils.
Les juristes reconnaissent que les organisations humanitaires "s’exposeront à d’énormes risques en effectuant des opérations d’aide transfrontalières et il se peut qu’elles refusent de le faire". Mais celles qui sont "impartiales, désireuses et capables d’entreprendre" de telles actions peuvent "légitimement" le faire. La lettre est adressée à Ban Ki-moon, aux États membres de l’ONU et aux principales agences humanitaires (Unicef, PAM, OMS, HCR, UNRWA). Parmi les signataires figurent Richard Goldstone (Afrique du Sud), ancien procureur du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, William Schabas, professeur de droit international à la Middlesex University britannique, l’ancien ministre de la Justice canadien Irwin Cotler, l’Américaine Leila Nadya Sadat, conseillère spéciale auprès de la procureur de la Cour pénale internationale, et le Pr Alain Pellet (université Paris-Ouest/Nanterre), ancien président de la Commission du droit international de l’ONU.

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