Une trentaine d’éminents juristes internationaux ont adressé mardi une
lettre ouverte à l’ONU lui demandant d’imposer le passage vers la Syrie
de convois humanitaires venant de Turquie ou de Jordanie, afin de
secourir plus rapidement les civils syriens. Le Conseil de sécurité a
adopté en février la résolution 2139 qui demande au régime syrien
d’autoriser ces opérations de secours transfrontalières, mais Damas
renâcle. Les signataires considèrent que l’ONU a le droit d’imposer ce
passage transfrontalier au nom du droit humanitaire. Ils déplorent que
l’ONU "ne procède pas à ces opérations vitales de crainte que certains
États membres ne les jugent illégales" et ils critiquent "une
interprétation trop prudente du droit international humanitaire".
Le Conseil doit examiner mercredi un rapport du secrétaire général de
l’ONU Ban Ki-moon soulignant que la résolution 2139 n’est pas appliquée,
ni par le régime ni par l’opposition, et qui demande au Conseil d’agir.
"L’ONU et d’autres agences humanitaires affirment depuis longtemps
qu’il n’est possible d’accéder à des centaines de milliers de civils
qu’à partir de pays voisins tels que la Turquie et la Jordanie",
souligne la lettre ouverte, qui doit être publiée dans le Guardian
britannique et Al-Hayat. "Le droit international humanitaire dispose
sans équivoque qu’une action humanitaire impartiale doit être entreprise
là où une population civile a besoin d’une aide vitale", ajoutent les
signataires.
"Nous jugeons qu’il n’existe aucun obstacle juridique empêchant l’ONU de
procéder directement à des opérations humanitaires transfrontalières et
d’apporter son soutien aux ONG afin qu’elles en effectuent également",
ajoutent-ils. Ils font valoir en particulier "que les parties ne peuvent
refuser leur consentement que pour des motifs légaux valables", comme
des opérations militaires sur le trajet proposé pour l’acheminement de
l’aide. "Elles ne peuvent dès lors légitimement refuser leur
consentement pour affaiblir la résistance de l’ennemi, réduire les
civils à la famine ou empêcher la délivrance de soins médicaux",
expliquent-ils.
Les juristes reconnaissent que les organisations humanitaires
"s’exposeront à d’énormes risques en effectuant des opérations d’aide
transfrontalières et il se peut qu’elles refusent de le faire". Mais
celles qui sont "impartiales, désireuses et capables d’entreprendre" de
telles actions peuvent "légitimement" le faire. La lettre est adressée à
Ban Ki-moon, aux États membres de l’ONU et aux principales agences
humanitaires (Unicef, PAM, OMS, HCR, UNRWA). Parmi les signataires
figurent Richard Goldstone (Afrique du Sud), ancien procureur du
Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, William
Schabas, professeur de droit international à la Middlesex University
britannique, l’ancien ministre de la Justice canadien Irwin Cotler,
l’Américaine Leila Nadya Sadat, conseillère spéciale auprès de la
procureur de la Cour pénale internationale, et le Pr Alain Pellet
(université Paris-Ouest/Nanterre), ancien président de la Commission du
droit international de l’ONU.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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