vendredi 8 novembre 2013

Arabie Saoudite : Privés de main-d’oeuvre bon marché, les Saoudiens se plaignent

Le départ forcé de près d’un million d’étrangers en situation illégale a provoqué une pénurie de main-d’oeuvre bon marché dont se plaignent les Saoudiens, même si les experts assurent qu’il sera bénéfique à long terme pour l’économie du royaume.
En vertu d’une amnistie qui a expiré dimanche, plus de 900 000 étrangers en situation irrégulière ont quitté le riche royaume pétrolier depuis le début de l’année.
Depuis lundi, des patrouilles de police pourchassent les étrangers qui n’ont pas régularisé leur situation, et beaucoup d’entre eux se terrent, ce qui affecte plusieurs secteurs de l’activité économique pour échapper à la prison ou aux amendes.
"Depuis ce matin, je cherche un menuisier pour effectuer des travaux dans ma maison", soupire Majed Hassen, un instituteur venu sur une place de Jeddah (ouest) où se regroupaient d’habitude les travailleurs expatriés payés à la journée.
"Une société de menuiserie m’a proposé un professionnel au prix de 150 riyals (47 dollars), soit le double de ce que je payais auparavant", ajoute-t-il.
Dans la seule ville de Jeddah, capitale économique du royaume, quelque 8000 personnes ont été arrêtées depuis le début de la semaine. Et pour l’ensemble du royaume, le chiffre a atteint 23 500 selon la presse.
Les coûts des prestations de services à domicile, pour de petits travaux de bricolage ou de réparation en plomberie, électricité ou menuiserie, se sont envolés. Comme c’est aussi le cas pour les chauffeurs à la journée.
Les prestataires de ce genre de services, qui se présentaient d’habitude en grand nombre sur les grandes places ou rues commerçantes des villes, se font rares cette semaine.
Mahmud Badr, un médecin égyptien de 47 ans, dit avoir "cherché en vain, dans trois quartiers différents de Jeddah, un plombier" pour des travaux de réparation dans sa maison.

Le taux de chômage atteint 12,5%
"Il est difficile de trouver un ouvrier depuis le début de la campagne de répression" contre les expatriés illégaux, dit Abu Maher, un Saoudien de 49 ans, qui cherche pour sa part un ouvrier pour réparer son antenne parabolique.
"Nous sommes pour la réorganisation du marché du travail, mais il fallait au préalable favoriser une solution de rechange à coût raisonnable" pour nous, a ajouté cet employé du secteur privé.
"Le coût des prestations de service ont doublé en deux jours, et cela était attendu. Mais ce à quoi nous ne nous attendions pas, c’est l’absence d’une solution de rechange", a-t-il contesté.
Les autorités souhaitaient réduire le nombre d’immigrés, estimé à 9 millions sur quelque 27 millions d’habitants, pour favoriser l’emploi des Saoudiens dans le royaume où le taux du chômage atteint 12,5%.
En vertu d’une amnistie de sept mois qui a expiré dimanche, les clandestins pouvaient sans risque se présenter aux autorités pour se faire parrainer par un employeur et obtenir un titre de séjour. A défaut, ils devaient renouveler leurs titres de voyage et quitter le royaume.
Le départ de près d’un million de travailleurs immigrés "va avoir des conséquences négatives à court terme", notamment dans les secteurs des services ou du bâtiment, déclare à l’AFP l’économiste Fawaz Al-Alami.
"Mais à moyen et long terme, il aura au contraire un effet bénéfique pour l’économie", souligne-t-il. Il explique que la plupart des travailleurs immigrés qui ont quitté le pays constituaient "une main d’oeuvre excédentaire dont le marché n’avait pas besoin".
La plupart de ces immigrés travaillaient dans des ateliers de mécanique, des blanchisseries des quartiers populaires, portaient les sacs des clients dans les supermarchés et autres petits métiers selon lui.
Mais les chantiers de Ryad connaissent également un ralentissement, alors que des échoppes consacrées aux ouvriers étrangers dans certains quartiers où se concentrent les ouvriers asiatiques ont fermé leurs portes.
"Le départ de ces étrangers en situation illégale va aider à contrôler le marché gris", affirme pour sa part l’économiste Ihsan Bu Halaiga, cité par le quotidien Arab News.
"Lorsque ces étrangers seront partis, il sera possible de comptabiliser la main-d’oeuvre légale dans le royaume, pour pouvoir élaborer une politique économique pour l’avenir", a-t-il ajouté.

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