mardi 13 septembre 2016

Syrie : Les armes se sont tues avec l'entrée en vigueur de la trêve

 Des enfants jouent dans des ruines à Daraa, un fief rebelle dans le sud-ouest de la Syrie, le 12 septembre 2016 (Afp)

Les armes se sont tues lundi soir en Syrie avec l'entrée en vigueur d'une trêve initiée par Moscou et Washington, énième effort pour mettre un terme à cinq ans d'un conflit dévastateur.
"C'est globalement calme sur tous les fronts, surtout dans les régions de Damas, d'Alep et d'Idleb, hormis quelques roquettes tirées dans le sud juste après le début de la trêve", a dit à l'AFP Rami Abdel Rahmane, directeur de l'Observatoire syrien ds droits de l'Homme (OSDH), en allusion aux principales zones de combats entre rebelles et régime.
La trêve a débuté à 19H00 locales (16H00 GMT), alors que l'opposition et la rébellion n'y ont pas encore donné leur accord formel et que prévaut le scepticisme sur le succès de ce nouveau cessez-le-feu.
Le régime, qui a donné son approbation à l'accord conclu vendredi par les Etats-Unis et la Russie après des semaines de négociations, a annoncé le gel de ses opérations militaires "sur le territoire pendant sept jours de lundi à 16H00 GMT au 18 septembre à 21H00 GMT".
Comme lors de la précédente trêve fin février, les groupes jihadistes Daesh, prétendu Etat islamique (EI), et Front Fateh al-Cham (ex-branche d'Al-Qaïda), qui contrôlent de vastes régions du pays, en sont exclus.
Si elle tient, cette cessation des hostilités devra déboucher sur une collaboration inédite entre Moscou et Washington qui lanceront des attaques conjointes contre les deux groupes. Elle devra également permettre l'acheminement d'aides humanitaires notamment à Alep, principal front du conflit.
Selon le correspondant de l'AFP dans la partie gouvernementale de la ville divisée d'Alep (nord), le dernier tir provenant du secteur rebelle a été entendu à 18H55 (15H55 GMT). Dans la partie rebelle, le calme règne depuis 17H00 (14H00 GMT).
En dépit de la fête musulmane de l'Aïd al-Adha, les rues des quartiers rebelles d'Alep sont restés vides, les magasins n'ayant pas de nourriture à offrir. Seuls les coiffeurs pour hommes ont ouvert.
"C'est la journée la plus calme depuis que je me suis marié il y a une semaine", se réjouit Chadi Saber, un habitant de 26 ans attendant son tour chez le coiffeur à Boustane al-Qasr. "J'espère que ça va durer pour avoir une lune de miel d'au moins une semaine".
Dans les quartiers gouvernementaux d'Alep, au contraire, il y avait beaucoup de circulation le soir.
"J'ai regardé toute la journée ma montre et quand l'accord est entré en vigueur j'étais heureux. J'espère que cette trêve me permettra de revoir mon frère qui habite de l'autre côté", a déclaré Khaled al-Mouraweh un commerçant de 38 ans, dans le quartier de Fourqane.
Pour Hassan Abou Nouh, un militant de Talbissé, fief rebelle de la province centrale de Homs, l'important est de survivre. "Nous avons passé l'Aïd dans des abris aujourd'hui. Nous n'avons pas beaucoup d'espoir. On espère que ça restera calme (...) Je veux juste rester en vie".
Les Etats-Unis et la Russie, parrains respectivement des rebelles et du régime, cherchent à travers l'accord de trêve de favoriser une reprise des négociations entre régime et rebelles pour arrêter l'effusion de sang qui a coûté la vie à plus de 290.000 personnes, poussé à la fuite des millions de Syriens et favorisé la montée en puissance du redoutable groupe Daesh.
Mais la tâche reste très difficile, tant le conflit est complexe avec l'implication de nombreux acteurs.
Le dictateur Bashar al-Assad a ainsi, malgré la trêve, répété sa "détermination à reprendre aux terroristes toutes les régions" du pays, en référence aux rebelles et jihadistes, éloignant toute perspective d'une solution rapide.
Les termes de l'accord américano-russe rendus public ne sont pas très précis sur les régions qui sont concernées par la trêve.
Le texte stipule d'abord un cessez-le-feu de 48 heures, renouvelables, dans toutes les régions à l'exception de celles où l'EI et le Front Fateh al-Cham sont présents.
Le chef de la diplomatie américaine John Kerry a affirmé que le régime devrait s'abstenir de mener des "missions aériennes dans toute zone où se trouve l'opposition et sur laquelle on s'est mis d'accord", sans identifier ces régions.
Or dans plusieurs zones, les rebelles sont alliés au Front Fateh al-Cham considéré comme "terroriste" par Washington et Moscou.
L'armée russe, qui aide militairement le régime syrien, a annoncé qu'elle suspendait ses frappes "sur tout le territoire" à l'exception des zones où se trouvent les groupes "terroristes", sans préciser non plus ces zones.
L'opposition a réclamé des garanties avant d'avaliser l'accord. "Quelle est la définition choisie pour le 'terrorisme' et quelle sera la réponse en cas de violations?" a dit Salem al-Moslet, un porte-parole.
Les civils ont, eux, continué à payer un lourd tribut dans les combats avant le début du cessez-le-feu. Treize ont péri dans Idleb (nord-ouest) selon l'OSDH et trois à Douma près de Damas où le correspondant de l'AFP a vu des enfants à la tête ensanglantée tremblant dans un hôpital de fortune.
L'accord devra par ailleurs permettre un accès humanitaire sans entrave aux zones assiégées, comme Alep. Il prévoit une "démilitarisation" de la route du Castello au nord de la métropole, unique axe de ravitaillement pour les rebelles avant sa prise par le régime.

(12-09-2016)

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