mercredi 19 août 2015

Syrie: L'ONU soutient unanimement une stratégie censée mener à la paix

Le Conseil de sécurité de l'ONU a soutenu unanimement une initiative visant à favoriser une solution politique à la guerre en Syrie qui a été accueillie mardi avec méfiance tant par le régime que par l'opposition.
Même si les États-Unis et la Russie se sont entendus lundi soir sur un texte mettant en avant la transition, cette décrispation après l'échec de plusieurs initiatives ne reflète pas une convergence sur le fond, notamment sur le sort du dictateur syrien Bashar al-Assad, préviennent des experts.
D'après eux, l'accord a été favorisé par l'épuisement des belligérants sur le terrain, l'urgence de faire face à la menace du groupe État islamique et la détente irano-américaine après l'accord sur le nucléaire.
L'appui au plan intervient au lendemain de raids du régime qui ont fait une centaine de morts près de la capitale. Ils ont été qualifiés d'"inacceptables" par l'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura, accusé mardi de "partialité" par Damas.
Le Conseil de sécurité appuie le lancement d'un processus visant à "l'établissement d'un corps dirigeant de transition inclusif avec les pleins pouvoirs", sans mention du sort de M. Assad.
Cet organisme "devrait être formé sur la base d'un consentement mutuel tout en assurant la continuité (du fonctionnement) des institutions gouvernementales".
L'initiative de M. de Mistura, qui doit démarrer en septembre, devrait permettre la mise en place de quatre groupes de travail sur la sécurité et la protection, le contre-terrorisme, les questions politiques et légales ainsi que la reconstruction.
Haytham Manna, un opposant ayant participé activement aux consultations menées par M. de Mistura, a affirmé à l'AFP que la sélection "des personnes qualifiées (des deux bords) pour former les quatre commissions a déjà commencé".
Le plan est basé sur les principes du communiqué dit de Genève 1, un document signé par les grandes puissances le 30 juin 2012 comme plan de règlement politique du conflit. Mais il est resté lettre morte, même si à deux reprises le Conseil de sécurité en a fait mention.
La porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, s'est félicitée que la position de Moscou fasse "l?objet d?un accord". "Il s'agit d'un document constructif, qui fait l'économie d'accusations gratuites contre une partie ou une autre mais qui au contraire appelle à la consolidation de toutes les forces pour un règlement pacifique", a-t-elle expliqué à l'AFP.
Mais Karim Emile Bitar, chercheur auprès de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris), estime que la nouvelle initiative n'est qu'un début et que "rien ne garantit qu'elle aura plus de succès que les précédentes".
"Il y a une unanimité sans précédent (...) une ébauche de rapprochement, un état d'esprit qui commence à changer", affirme-t-il à l'AFP. "Mais à ce stade, aucune des deux parties n'est prête à faire des concessions qui permettraient vraiment de concrétiser ce rapprochement sur le terrain".
Jusqu'à présent, tous les plans proposé par l'ONU ou les grandes puissances ont échoué. Les pourparlers de Genève 2 en 2014 avaient buté notamment sur le sort du président syrien et tourné à un dialogue de sourds entre régime et opposition.
Mais les grandes puissances se sont depuis rendues compte de la fatigue du régime et des rebelles, une situation qui profite aux jihadistes, notamment de l'EI, principale menace aux yeux de la communauté internationale. "Il y une prise de conscience commune que personne ne pourra reprendre le dessus", explique M. Bitar.
Pour l'expert Andreï Baklitski du PIR-Center à Moscou, "la déclaration n'a rien de révolutionnaire mais pour la première fois depuis deux ans le Conseil de Sécurité a trouvé un consensus sur la Syrie. C'est un texte assez évasif et sa mise en pratique n'est pas évidente".
En fait les positions des protagonistes restent inchangées. "La lutte contre le terrorisme est primordiale et il ne sert à rien avant de parler d'autre chose", affirme à l'AFP Bassam Abou Abdallah, professeur à l'université de Damas et proche du régime.
Du côté de la Coalition de l'opposition, il y a de la "suspiscion", reconnait l'un de ses dirigeants, Samir Nachar. "Nous sommes ouverts au processus politique mais nous n?accepterons pas Assad dans la période de transition", a-t-il dit à l'AFP.
"Le fond le problème reste intact", résume M. Bitar. "C'est surtout le sort personnel d'Assad qui continue d'être un obstacle" depuis le début de la guerre en 2011.
Pour M. Manna, cette question "se posera durant le processus ou à la fin, car si on le pose au début on va à l'échec total".
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a d'ailleurs déclaré lundi qu'il était "inacceptable" de faire du départ du président syrien une précondition.

(18-08-2015)

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