mercredi 19 mars 2014

Égypte : l’armée prise pour cible

Un général et un colonel de l’armée, ainsi que cinq djihadistes, ont péri mercredi dans de nouveaux combats au nord du Caire, alimentant la spirale des violences entre les insurgés islamistes et l’armée depuis qu’elle a destitué le président Mohamed Morsi. Plus de 200 policiers et soldats ont péri dans les attaques quasi quotidiennes contre les forces de sécurité depuis le 3 juillet 2013, quand l’armée a renversé l’islamiste Morsi, seul président jamais élu démocratiquement en Égypte et dont les partisans sont la cible d’une sanglante répression depuis.
L’armée et la police ont attaqué mercredi à l’aube un repaire de membres présumés d’Ansar Beït al-Maqdess à Al-Qanatir Al-Khayriya, à une trentaine de kilomètres au nord du Caire, assure le ministère de l’Intérieur dans un communiqué. Ce groupe disant s’inspirer d’al-Qaida a revendiqué la plupart des attaques contre les forces de l’ordre. Il est basé dans la péninsule du Sinaï, d’où ses combattants tirent également régulièrement des roquettes sur Israël.
"Un général de brigade et un colonel de l’unité des démineurs de l’armée ont péri dans l’affrontement", a indiqué l’armée sur son compte Facebook. Le ministère de l’Intérieur a confirmé l’information dans son communiqué, précisant que les "terroristes" ont fait usage de vestes bourrées d’explosifs dans l’affrontement. Plus de 1 400 manifestants pro-Morsi ont été tués par l’armée et la police, dont la moitié au Caire en une seule journée le 14 août, et plusieurs milliers de partisans du président déchu ont été emprisonnés depuis, dont la quasi-totalité des cadres des Frères musulmans, la confrérie de Mohamed Morsi, qui risquent tout comme lui la peine de mort dans divers procès.
Assurant agir en représailles à cette répression, des groupes djihadistes - essentiellement Ansar Beït al-Maqdess - attaquent quasi quotidiennement policiers et soldats dans tout le pays, étendant récemment leur action au coeur de la capitale. Le nouveau gouvernement mis en place dès le 3 juillet et dirigé de facto par l’armée accuse, lui, les Frères musulmans d’être derrière ces attentats, et a décrété la confrérie "organisation terroriste".
Le général et le colonel tués dirigeaient une unité d’experts en explosifs qui épaulait la police et l’armée dans le raid lancé contre le repaire d’Ansar Beït al-Maqdess, a précisé l’armée. Les suspects ciblés à Al-Qanatir Al-Khayriya, dans le delta du Nil, sont soupçonnés d’avoir participé à l’attaque d’un poste de contrôle routier de l’armée samedi au Caire, dans laquelle six soldats avaient péri, et dans l’assassinat, le 28 janvier, d’un général de police proche conseiller du ministre de l’Intérieur, selon les mêmes sources.
Le communiqué du ministère assure que cinq "terroristes" ont été tués au cours du raid et quatre arrêtés. L’armée précise qu’"une grande quantité d’explosifs ont été saisis". Le 3 juillet, le chef de l’armée, le général Abdel Fattah al-Sissi, avait destitué et fait arrêter Mohamed Morsi, élu un an plus tôt à l’issue d’une période chaotique qui avait suivi la révolte populaire ayant chassé Hosni Moubarak début 2011, dans la lignée des Printemps arabes.
Pour justifier son coup de force, Sissi avait invoqué les millions de manifestants qui avaient réclamé quelques jours plus tôt le départ de Mohamed Morsi, accusé d’accaparer les pouvoirs au profit des Frères musulmans et de vouloir islamiser la société à marche forcée. Depuis, le général Sissi, ministre de la Défense et vice-Premier ministre, récemment promu maréchal, ne cache pas ses intentions de se présenter à l’élection présidentielle prévue cette année. Il est assuré de la remporter haut la main tant il est populaire depuis qu’il a lancé l’implacable répression visant les islamistes et en l’absence de candidats crédibles potentiels, selon les experts.

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