L’indéboulonnable président syrien Bashar al-Assad prête serment
mercredi dans un pays ravagé par la guerre, alors que l’attention
internationale est distraite par les multiples conflits qui secouent la
région.
Voulant faire mentir les Occidentaux, qui pariaient sur son départ
rapide, l’autocrate de 48 ans organise une imposante cérémonie dans son
palais qui surplombe la capitale, avec un millier d’invités, pour prêter
serment et annoncer les grandes lignes de son troisième septennat.
Dans une Syrie exsangue où les violences ont tué 170 000 personnes et
poussé des millions d’autres à fuir depuis trois ans, et alors que les
jihadistes ultra-radicaux de l’Etat islamique dominent l’est du pays, Assad a été élu le 3 juin lors d’un scrutin raillé comme une "parodie
de démocratie" par ses détracteurs.
"La situation au Proche-Orient est très fluctuante. Et malheureusement
pour les Syriens, cette instabilité a distrait l’attention de la
communauté internationale", confie amèrement à l’AFP Samir Nachar,
membre de la Coalition de l’opposition syrienne.
"Doit-elle se concentrer sur l’Etat islamique ? Sur l’Irak ? Sur l’Egypte ? Sur la Palestine ?" ajoute-t-il.
Pour l’opposant, "il faut avouer qu’Assad a réussi dans une large mesure
à se mettre dans une position (favorable) en comparaison à l’Etat
islamique et à l’extrémisme".
Des experts estiment en effet que la montée des jihadistes a été un
"cadeau" pour Assad, qui n’a cessé de présenter les rebelles comme
des "terroristes", et peut désormais essayer de se présenter aux yeux
des Occidentaux comme un rempart contre l’extrémisme.
"Il leur dit : Je suis votre homme dans la région et je peux faire face
aux terroristes et aux extrémistes, donnez-moi votre soutien et votre
reconnaissance", explique M. Nachar.
Appliquant la stratégie chère à son père Hafez, qui a dirigé le pays
d’une main de fer durant 30 ans, Bashar al-Assad a fait le dos rond
durant deux ans face à l’Occident.
Il s’est pour cela appuyé sur ses deux alliés indéfectibles, la Russie
et l’Iran, qui lui ont livré armes et argent. En outre, Moscou ainsi que
Pékin ont fait usage de leur véto au Conseil de sécurité de l’ONU pour
empêcher toute sanction contre leur allié.
Puis le vent a tourné. Les combattants chiites aguerris du Hezbollah
libanais ont aidé son armée à reprendre du terrain, les rebelles se sont
entre-déchirés dans une guerre intestine qui a tué plus de 6.000 hommes
dans leurs rangs depuis janvier.
En outre, la brutalité des combattants de l’EI et leur expansion tant en
Syrie qu’en Irak focalisent l’attention des Occidentaux.
Bashar al-Assad prêtera serment alors que toute la région est presque à
feu à sang avec une nouvelle offensive israélienne à Gaza, un Irak très
affaibli par la poussée jihadiste et une Libye plongée dans l’anarchie.
Aussitôt après, le gouvernement syrien devrait démissionner. Le
président aura alors le choix entre nommer un nouveau Premier ministre
ou reconduire Waël Halaqi, aux commandes depuis août 2012.
Pour le nouveau chef de l’opposition, Hadi al Bahra, "Bashar al-Assad
reste la raison principale de la crise humanitaire sans précédent qui
touche le pays. Sa technique de ’mourir de faim ou se rendre’ et son
soutien officieux aux groupes terroristes armés déchirent la Syrie".
"La communauté internationale ne doit pas tomber dans ce piège tendu
cyniquement par la dictature. Bashar al-Assad reste la cause principale
d’instabilité, et non la solution au conflit. (...) Il porte sur ses
mains le sang des Syriens", insiste-t-il dans un texte diffusé par son
bureau.
Pour Lina Khatib, qui dirige le Centre Carnegie Moyen-Orient à Beyrouth,
le véritable objectif d’Assad est de poursuivre sa stratégie de guerre
et chasser les rebelles de leurs fiefs dans le nord et le sud.
"La stratégie d’Assad est de s’étendre autour des régions que le régime
contrôle déjà et de remettre la main sur la totalité d’Alep",
assure-t-elle.
"Cela signifie que la majorité des régions seront sous la férule soit du
régime, soit de l’’Etat islamique, avec une région dans le sud sous le
contrôle des (modérés) de l’Armée syrienne libre (ASL). C’est une
équation qui convient à court terme au régime", note-t-elle.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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