Reuven Rivlin, qui a pris jeudi les rênes de l’État d’Israël, en
pleine guerre à Gaza, est une figure haute en couleur de la droite
israélienne, partisan déclaré du "Grand Israël" mais aussi ardent
défenseur de l’État de droit. Élu dixième président d’Israël le 10 juin,
Reuven Rivlin, 74 ans, est un avocat de formation, connu pour son
affabilité et ses traits d’esprit. Il a commencé sa carrière politique
en 1988 au sein du Likoud (droite nationaliste) en se faisant élire
député à la Knesset, le Parlement. Il deviendra ensuite à deux reprises
président de la Knesset (2003-2006 et 2009-2013). Sur le front
idéologique, il fait partie de l’aile le plus à droite du Likoud.
Il n’a jamais caché son hostilité à la création d’un État
palestinien. "Rivlin ne sera pas le président de l’État d’Israël, mais
le président du Grand Israël. Il se servira de la fonction
présidentielle pour faire avancer la colonisation en Cisjordanie, qu’il
adule", s’inquiétait récemment un éditorialiste du quotidien de gauche
Haaretz. "Je préfère accepter les Palestiniens comme citoyens d’Israël
que de diviser Israël", affirme Reuven Rivlin, en plaidant sans fard
pour l’annexion de la Cisjordanie occupée. Dans le passé, il a exprimé
avec force son opposition au retrait unilatéral israélien de la bande de
Gaza en 2005 et à l’évacuation manu militari des colonies juives
considérées comme "illégales" par les autorités.
Mais ces prises de position ne l’ont jamais amené à attaquer
ouvertement la minorité arabe d’Israël, qui représente 20 % de la
population, contrairement à d’autres partisans de la colonisation tous
azimuts. Dans cette optique, cet ancien officier du renseignement
militaire a fait du rapprochement avec les Arabes israéliens,
descendants des 160 000 Palestiniens restés sur leur terre après la
création d’Israël en 1948, sa marque de fabrique politique. Son premier
geste, dès qu’il a été élu au perchoir, a été d’organiser une visite
dans la grande ville arabe d’Oum el-Fahm, en Galilée (nord d’Israël),
accompagné par plusieurs députés arabes. Il s’est aussi opposé à la
demande de l’extrême droite de limoger la députée Hanin Zoabi, du parti
nationaliste arabe Balad, après sa participation à la "Flottille de la
liberté pour Gaza" en mai 2010, qui s’était soldée par la mort de dix
militants turcs pro-palestiniens tués par l’armée israélienne.
En 2011, il s’insurge contre le projet de création d’une commission
parlementaire visant à mettre sous contrôle de la Knesset les activités
des ONG israéliennes de gauche, en particulier celles qui critiquent
l’armée. Il s’en est aussi pris avec virulence à la très droitière
députée de son parti Miri Régev pour avoir assimilé les clandestins
africains en Israël à "un cancer qui prolifère". En cultivant ainsi sa
double image de faucon et de défenseur de la démocratie parlementaire,
Reuven Rivlin espère jouer un rôle d’arbitre en tant que chef d’État.
Il avait fait une première tentative pour devenir président en 2007
mais avait été battu par Shimon Peres. Pour ce nouvel essai, il avait
reçu le soutien - mais du bout des lèvres et sous la pression du Likoud -
du Premier ministre Benyamin Netanyahou, avec lequel il entretient des
relations tendues pour des raisons avant tout personnelles.
Grand amateur de football, Reuven Rivlin, ex-président de l’équipe du
Beitar Jérusalem, un club toujours très marqué à droite, s’est taillé
une belle popularité auprès des Israéliens grâce à sa jovialité, son
côté bon enfant toujours prêt à blaguer. Il a d’ailleurs à un moment
fait office d’humoriste à la télévision. La célèbre émission satirique
Eretz Nehederet (sorte de Guignols de l’info israéliens) le caricature
régulièrement en politicien bedonnant et rigolard qui assène à coup de
plaisanteries souvent grasses ses quatre vérités au petit monde
politique, au premier rang duquel "Bibi" Netanyahou. "À sa manière, très
spéciale, Rivlin a su toucher le coeur des députés et plus largement
celui du grand public", reconnaît d’ailleurs, malgré ses critiques, le
Haaretz.
(24-07-2014 )
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