dimanche 17 juillet 2016

Bahreïn : Le gouvernement dissout le principal groupe de l'opposition chiite (Assawra)

La justice de Bahreïn a prononcé dimanche la dissolution du principal mouvement de l'opposition chiite, confirmant la ligne dure adoptée par le régime malgré les critiques de son allié américain et des défenseurs des droits de l'Homme.
La dissolution de Al-Wefaq (L'entente) intervient un mois après la suspension, le 14 juin, de ses activités par un tribunal bahreïni, qui avait ordonné la fermeture de ses locaux et le gel de ses fonds.
Mais le ministère de la Justice avait réclamé la dissolution pure et simple du mouvement accusé de ne pas respecter la loi et de "favoriser le terrorisme".
Al-Wefaq anime un mouvement de protestation de la majorité chiite contre le pouvoir sunnite et réclame une véritable monarchie constitutionnelle à la famille royale de Al-Khalifa.
Le tribunal administratif a jugé dimanche que le mouvement était "allé, dans son action politique, jusqu'à inciter à la violence et encourager les manifestations et les sit-in qui sont de nature à provoquer une discorde confessionnelle dans le pays".
Il "n'a cessé aussi de critiquer les institutions de l'Etat", a ajouté le tribunal, dont la décision peut faire l'objet d'un appel.
La justice a en outre prononcé la saisie des fonds du groupe au "profit du Trésor public", selon une source judiciaire.
Ce jugement a été prononcé en l'absence des avocats de la défense qui se sont retirés lors d'une précédente audience pour protester contre l'interdiction qui leur avait été faite de consulter les archives du mouvement pour préparer leurs plaidoyers.
L'offensive judiciaire contre Al-Wefaq a suscité des critiques de l'ONU et des Etats-Unis, proche allié de Bahrein qui accueille la Ve Flotte américaine. Des organisations de défense des droits de l'Homme ont également dénoncé une tentative d'éliminer "ce qui reste de l'opposition" dans ce petit royaume du Golfe.
A Londres, le nouveau ministre britannique des Affaires étrangères, Boris Johnson, s'est dit dimanche "profondément préoccupé" par la dissolution d'Al-Wefaq et appelé Manama à favoriser "un dialogue constructif et inclusif pour promouvoir la cohésion sociale (...), dont la représentation politique, pour tous les Bahreïnis".
Mais le Premier ministre Khalifa Ben Salmane Al-Khalifa, qui défend "la fermeté" de son gouvernement, a répété dimanche que "les mesures prises pour préserver la sécurité et la stabilité du pays sont irréversibles".
Le chef d'Al-Wefaq, cheikh Ali Salmane, purge actuellement une lourde peine de prison pour complot contre le régime et incitation à la désobéissance.
Le 20 juin, les autorités avaient déchu de sa nationalité bahreïnie le chef spirituel chiite, cheikh Issa Qassem, 75 ans, accusé d'"encourager le confessionnalisme et la violence" et de servir "des intérêts étrangers", en allusion à l'Iran.
Soutenu par l'Arabie Saoudite, Manama accuse régulièrement l'Iran, une puissance à majorité chiite, de s'ingérer dans ses affaires intérieures, ce que Téhéran a toujours démenti.
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a affirmé le 6 juillet que son pays n'intervenait pas dans les affaires intérieures de Bahreïn. Mais il a mis en garde contre le risque que "le conflit politique" ne se transforme "en guerre interne".
Si la violence a baissé en intensité ces dernières années, la justice de Bahreïn continue de prononcer de lourdes peines de prison contre les auteurs présumés d'attaques, notamment contre les forces de l'ordre.
Ces condamnations sont souvent assorties de retrait de la nationalité, une mesure qui a sanctionné au moins 261 personnes depuis 2012, selon le Bahrain Center for Human Rights (BCHR).
Le chef de cette ONG, le chiite Nabil Rajab, est poursuivi pour insulte aux autorités et atteinte à l'Arabie saoudite. Arrêté le 13 juin, cet homme de 51 ans est maintenu en détention en attendant son jugement le 2 août, malgré les appels à sa libération, dont ceux lancés par Amnesty et le Parlement européen.

(17-07-2016 - Assawra)

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