jeudi 11 août 2016

Syrie : "Nous n'avons besoin ni de larmes ni même de prières"

Le quartier de Maadi à Alep, après un bombardement des forces du régime de Bashar le 16 juillet 2016. (Afp)

À Alep, les médecins appellent au secours. Ils ne sont plus que 35 dans les quartiers contrôlés par les insurgés. Et 15 d'entre eux, dans une lettre ouverte très émouvante, ont fustigé jeudi « l'inaction » des États-Unis face aux malheurs et atrocités que subit la population de leur ville. Ils décrivent la situation désespérée que connaîtraient les civils si le régime imposait un nouveau siège.
Samedi, les insurgés ont réussi à briser trois semaines d'un siège qui avait entraîné une hausse vertigineuse des prix et le tarissement progressif des produits de base. Mais les médecins considèrent que la situation reste désespérée. « Sans l'ouverture permanente d'une voie d'approvisionnement, nous serons dans pas longtemps de nouveau assiégés par les forces du régime, la famine se répandra et les produits hospitaliers se tariront complètement », préviennent-ils.
Dans la lettre envoyée à la Maison-Blanche, et dont l'AFP a eu une copie, ces pédiatres, chirurgiens et autres praticiens fustigent l'attitude des États-Unis qui « n'ont fait aucun effort pour lever le siège ou user de leur influence afin de pousser les parties (belligérantes) à protéger les civils ». « Nous n'avons besoin ni de larmes, ni de sympathie, ni même de prières. Prouvez seulement que vous êtes des amis des Syriens », disent-ils.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a estimé que la Syrie était l'endroit le plus dangereux pour le personnel médical avec 135 attaques en 2015 contre des installations sanitaires et leur personnel. Actuellement, 250 000 personnes habitent dans les zones rebelles et 1,2 million, dans les quartiers tenus par le gouvernement dans la ville d'Alep, la deuxième de Syrie et enjeu majeur d'un conflit qui a fait plus de 290 000 morts depuis son déclenchement en mars 2011. Insurgés et loyalistes se préparent pour une nouvelle bataille en vue de contrôler la ville, où hôpitaux et infrastructures civiles ont été ravagés.
En juillet, quatre hôpitaux de fortune et une banque du sang ont été touchés en une seule journée par des raids. Plusieurs des médecins signataires de cet appel y travaillaient. « Ce qui nous afflige le plus, comme médecins, est de devoir choisir qui vivra et qui mourra », écrivent les praticiens dans leur lettre. « De jeunes enfants arrivent aux urgences si gravement blessés que nous devons établir une priorité entre ceux qui ont le plus de chances de survivre, poursuivent-ils. Et parfois, nous n'avons même pas le matériel requis pour les aider. » Les médecins disent avoir été témoins en cinq ans de guerre de la mort d'un nombre incalculable de patients, amis et collègues dans d'« affreuses souffrances ».
Il y a deux semaines, une attaque a causé la mort de quatre nouveau-nés, l'explosion ayant coupé l'arrivée d'oxygène à leur couveuse. « Ils ont perdu la vie par suffocation avant même d'avoir commencé. »

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