Yehya Maatouq tient dans ses bras sa petite fille Wahida de 4 mois, le 1er octobre 2016 à Idleb (Afp)
Un secouriste sort des décombres avec la petite Wahida, 4 mois, dans
les bras puis s'effondre en pleurs: ces images tournées à Idleb en
Syrie ont fait le tour du monde ce week-end. Le père de la fillette
raconte à l'AFP son drame.
C'était jeudi. "J'étais dans le magasin où je travaille lorsque les
frappes aériennes ont commencé", se souvient Yeyha Maatouk d'un ton
neutre. "J'ai tout de suite couru vers chez nous et j'ai vu que tout
notre quartier était sans dessus dessous. Je n'ai trouvé personne
dans ce qu'il restait de notre logement".
Il entend la voix étouffée de sa femme, ensevelie sous les décombres
de leur appartement situé dans un petit immeuble.
"Je l'ai cherchée partout. J'ai soulevé un bloc de ciment et je l'ai
trouvée, le visage contre la terre. J'ai creusé autour d'elle pour
pouvoir la dégager, et, grâce à Dieu, elle était consciente et me
parlait".
Avec les Casques blancs, ces sauveteurs de la Défense civile en
territoire rebelle, il se met ensuite à la recherche désespérée de
ses deux filles, Wahida, quatre mois, et Sinar, trois ans.
"J'ai commencé à creuser dans la chambre à coucher et j'ai trouvé la
main de ma fille (Wahida). Quand j'ai réussi à l'atteindre, elle
s'est agrippée à mon doigt".
Les secouristes l'aident, dégagent le bébé des blocs de ciment qui
recouvrent son corps. Son père peut alors la prendre dans ses bras.
"Ils l'ont emmenée à l'hôpital et Dieu soit loué, elle est vivante".
Une vidéo tournée par les Casques blancs montre un jeune volontaire
portant à bout de bras la petite fille, blessée au visage et
habillée d'un pyjama jaune fluo recouvert de poussière.
Ce secouriste qui n'est pas identifié tient tendrement le bébé dans
ses bras dans l'ambulance qui les conduit à l'hôpital.
"Nous avons mis deux heures pour l'extraire des décombres, et grâce
à Dieu elle est vivante", dit-il en pleurs. Ses larmes se mêlent aux
plaintes, plus discrètes, de Wahida.
Pendant que le bébé part à l'hôpital, le père, lui, cherche toujours
Sinar, sa fille de trois ans, et sa propre mère. Mais les deux ont
été tuées ce jour-là par le raid qui a fait au total six morts dont
quatre enfants selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme
(OSDH).
"Ma deuxième fille... le mur lui est tombé dessus. Elle est morte.
J'aimerais préféré tout perdre mais pas elle", réussit à articuler
Yeyha Maatouk, la voix brisée.
Avec sa femme et Wahida, le jeune père a été accueilli chez des
proches dans la banlieue d'Idleb, une ville du nord-ouest que
cherchent à reconquérir les forces du régime et son allié russe.
Wahida a des égratignures et des bleus sur la tête, mais elle se
tient tranquille dans les bras de son père, ses grands yeux noirs
regardant le ciel.
Lorsqu'on lui demande ce qu'il espère désormais, Yeyha Maatouk
soupire, impuissant. "On s'en remet à Dieu... On n'arrive même pas à
faire face à tout ce qui nous est déjà arrivé".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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