Un officier yéménite sur le tarmac de l'aéroport de Sanaa, le 16 août 2016 (Afp)
Ybdel Salam Khaled a l'impression d'être pris en otage. Titulaire d'une bourse d'étude en Inde, il est bloqué depuis des mois à Sanaa, comme des milliers de Yéménites, en raison de l'interdiction aérienne décrétée par la coalition menée par l'Arabie Saoudite.
En janvier, ce jeune homme croyait qu'il allait pouvoir quitter le Yémen pour parfaire ses connaissances en anglais. Au lieu de cela, il erre dans les rues de la capitale, contrôlée par les rebelles chiites Houthis, en se désolant de son sort.
"En raison de la fermeture de l'aéroport, je ne peux pas voyager. Il y a d'autres aéroports (dans le sud) mais, malheureusement, on ne peut pas s'y rendre en raison de l'insécurité", dit-il.
Depuis le 9 août, la coalition arabe, qui intervient au Yémen en soutien au président Abd Rabbo Mansour Hadi chassé de Sanaa par les rebelles, interdit tout vol commercial au départ et à destination de la capitale.
Raison invoquée: l'aéroport sert à des livraisons d'armes au profit des rebelles et leur donne une liberté de mouvement pour aller porter leur parole à l'étranger.
"Il n'y a pas de blocus", affirme cependant à l'AFP le porte-parole de la coalition arabe, le général saoudien Ahmed Assiri, préférant parler "d'interdiction" et de "contrôle" en vertu du "droit international".
Seuls les vols humanitaires opérés par les agences des Nations unies sont autorisés, au cas par cas. Certaines ONG se plaignent des faibles volumes d'aide qui arrivent ainsi par voie aérienne.
Avant le 9 août, seuls les rares avions de la compagnie nationale Yemenia assuraient des vols commerciaux ponctuels en direction d'Amman, Le Caire ou Nairobi.
"Des milliers de personnes parmi lesquelles des étudiants, des malades ou de simples citoyens ne peuvent plus voyager", se lamente le directeur de l'aéroport de Sanaa, Khaled al-Chayef, faisant remarquer que cela vaut aussi pour des Yéménites se trouvant à l'étranger.
"Le préjudice est énorme", renchérit le directeur du trafic aérien, Mazen al-Soufi.
"Il y a 20.000 personnes qui sont bloquées à l'étranger et qui veulent rentrer au Yémen", affirme-t-il.
"Des personnes atteintes de maladies graves meurent chaque jour", faute de pouvoir être évacuées pour des soins à l'étranger, "et il y a des étudiants qui sont en train de rater leur année scolaire" dans les universités étrangères.
Le coordinateur humanitaire de l'ONU au Yémen, Jamie McGoldrick, a déploré ces restrictions aériennes. "L'un des plus gros problèmes auxquels nous faisons face, ce sont les vols aériens yéménites qui ne viennent pas à Sanaa".
"Nous appelons toutes les parties à permettre la reprise de ces vols afin que les gens obtiennent le répit dont ils ont tant besoin", a-t-il ajouté.
Les restrictions dans les mouvements de l'aide humanitaire d'une manière générale sont une préoccupation constante. Il y a "de nombreuses difficultés", explique Adham Musslam, directeur adjoint au Yémen du Programme alimentaire mondial, en citant notamment les permissions pour faire entrer de l'aide qui "prennent 4 à 5 mois".
Les restrictions aériennes et maritimes appliquées aux zones rebelles sont restées en vigueur en dépit d'un cessez-le-feu annoncé la semaine dernière par l'ONU.
La coalition, commandée par Ryad, a fait toutefois une exception après le carnage du 8 octobre à Sanaa.
A la suite d'un double raid aérien sur la capitale yéménite qui a fait 140 morts et 525 blessés lors d'une cérémonie funéraire, selon l'ONU, la coalition a reconnu le 15 octobre que l'attaque était une bavure commise sur la base d'une "information erronée".
Après ce mea culpa, un avion de l'armée de l'air omanaise s'est posé à Sanaa et a pu évacuer plus de 100 des blessés de cette attaque vers Mascate.
Le même avion avait ramené à Sanaa les membres d'une délégation rebelle aux négociations de paix qui s'étaient terminées à Koweït le 6 août sans succès. Ces personnes étaient bloquées depuis à Mascate en raison de l'interdiction aérienne.
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