Un
membre des forces de sécurité irakiennes escorte un membre présumé de Daesh arrêté la veille de l'attaque lancée à Kirkouk,
le 22 octobre 2016 (Afp)
Ces attaques ont marqué les esprits et montré les capacités de Daesh à
frapper hors des zones sous son contrôle au moment où les forces
irakiennes appuyées par une coalition internationale avancent vers
Mossoul, le dernier grand bastion de l'EI en Irak.
Au sixième jour de cette offensive, Bagdad a dû envoyer des renforts à
Kirkouk pour éliminer les combattants de Daesh, tireurs embusqués et
potentiels kamikazes, encore présents dans cette ville sous contrôle
kurde où un couvre-feu total a été maintenu.
Au sud de Mossoul, un incendie provoqué par Daesh cette semaine dans une
usine de soufre a engendré des fumées toxiques qui ont tué deux civils
et contraint des militaires américains présent sur une importante base
militaire à s'équiper samedi de leurs masques à gaz.
Un général irakien a admis que la présence de ces fumées toxiques
avaient un impact sur "la progression prévue" des opérations militaires.
En visite surprise samedi à Bagdad, le secrétaire américain à la Défense
Ashton Carter, dont le pays dirige la coalition internationale qui
soutient les forces irakiennes, doit discuter avec les autorités
militaires et politiques de la bataille de Mossoul, ville que Daesh
contrôle depuis juin 2014 quand il y a déclaré son "califat". Il
évoquera également la situation à Kirkouk.
Dans cette ville, les attaques jihadistes menées dès les premières
heures de vendredi dans plusieurs quartiers ont fait 46 morts et 133
blessés, principalement des membres des forces de sécurité, a déclaré à
l'AFP un responsable militaire du ministère irakien de l'Intérieur. Ce
bilan a été confirmé de source médicale à Kirkouk.
Quarante-huit jihadistes ont également été tués dans l'attaque, selon le chef de la police de Kirkouk.
"On a passé 24 heures dans la peur et la destruction, c'est comme si
cette journée avait duré toute une année", a raconté à l'AFP Abou Omar,
un boucher de 40 ans.
"On entendait des tirs et des explosions tout le temps, mais on n'osait
pas sortir pour voir" a ajouté cet habitant, qui est resté enfermé avec
sa femme, ses trois enfants et sa mère.
Un jihadiste présumé arrêté vendredi a affirmé que l'attaque avait été
planifiée par le chef de Daesh, Abou Bakr al-Baghdadi, pour "réduire la
pression sur le front de Mossoul", selon des propos qu'il a tenus lors
d'un premier interrogatoire auquel un journaliste de l'AFP a assisté.
Selon le gouverneur de la province de Kirkouk, Daesh a probablement
activé des cellules dormantes pour mener à bien ce raid spectaculaire.
Samedi, les forces fédérales ont avancé à Qaraqosh selon le commandement
joint des opérations. La prise totale de cette ville, qui était peuplée
de chrétiens avant l'arrivée de Daesh, permettrait de s'approcher de la
périphérie est de Mossoul.
Les combattants kurdes menaient parallèlement une opération au nord-est
de Mossoul mais se plaignaient d'une couverture aérienne jugée
insuffisante de la part de la coalition internationale.
Les jihadistes ont effectué des dizaines d'attaques suicide pour ralentir la progression des forces de sécurité.
Un journaliste irakien a par ailleurs été tué samedi alors qu'il
couvrait l'opération militaire près du village d'Al-Choura, au sud de
Mossoul, a annoncé la chaîne de télévision qui l'employait, Al Sumaria
TV. Un journaliste de télévision irakien avait déjà perdu la vie
vendredi, mortellement touché par un tireur embusqué de Daesh à Kirkouk.
Avec 3.000 à 4.500 jihadistes à l'intérieur de la ville, la bataille de
Mossoul paraît déséquilibrée mais quand les forces de sécurité seront
aux portes de Mossoul, il leur faudra probablement engager une longue
guérilla urbaine dans une cité qui compte environ 1,5 million
d'habitants.
La communauté internationale et des ONG s'inquiètent particulièrement du
sort des civils qui resteront piégés dans la ville tant que les forces
irakiennes ne s'en seront pas suffisamment rapprochées pour mettre en
place des couloirs d'évacuation.
Selon des habitants contactés par l'AFP, les conditions de vie se
détériorent de jour en jour à Mossoul et les réserves de nourriture
diminuent alors que la paranoïa des informateurs de Daesh ne fait
qu'augmenter.
A Bagdad, le chef du Pentagone Ashton Carter devait rencontrer le chef
militaire de la coalition internationale, le général américain Stephen
Townsend, et le Premier ministre irakien Haider al-Abadi.
Il entend notamment discuter des efforts nécessaires pour que Mossoul, une fois reconquise, puisse retourner à une vie normale.
"Il y aura un gros travail de reconstruction et de stabilisation à
faire", a déclaré le chef du Pentagone. Il est "crucial" que ces efforts
"ne soient pas en retard sur l'effort militaire" en cours, a-t-il
souligné.
Sa visite doit aussi servir à aplanir le différend entre Bagdad et
Ankara sur la participation de troupes turques aux opérations de reprise
de Mossoul, à laquelle le gouvernement irakien a dit être opposé. La
Turquie dispose d'une base militaire au nord de Mossoul.
Selon M. Carter, un accord de principe pour une telle participation a
toutefois été trouvé entre les parties mais il faut encore en définir
les "modalités pratiques".
(22-10-2016)
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