vendredi 22 août 2014

Yémen : manifestation massive de la rébellion chiite à Sanaa

Des dizaines de milliers de partisans de la rébellion chiite ont manifesté vendredi dans le calme à Sanaa pour réclamer la démission du gouvernement accusé de corruption, à l’expiration d’un délai fixé pour son départ, mais des pourparlers sont en cours pour tenter de sortir de la crise.
Le slogan "le peuple veut la chute du gouvernement" a rythmé cette manifestation massive à laquelle des dizaines de milliers de partisans d’Ansarullah (également appelés houthis) ont pris part après la prière hebdomadaire du vendredi.
Le rassemblement, qui s’est déroulé sans heurts et avec une faible présence des forces armées, réclamait également l’annulation d’une récente augmentation des prix du carburant.
A l’issue du rassemblement, un groupe de 1.000 à 2.000 personnes a établi un campement sur une route menant à l’aéroport dans le nord de Sanaa, quartier où se trouve notamment les ministères de l’Intérieur, de la communication et de l’Électricité, afin d’accentuer la pression sur le gouvernement.
Depuis dimanche, les manifestations et sit-ins se sont succédés et des milliers de membres armés de la rébellion d’Ansaruallah se sont positionnés autour de Sanaa pour faire entendre leurs revendications.
Leur chef, Abdel Malek al-Houthi, avait prévenu que si ces demandes n’étaient pas satisfaites à l’expiration de l’ultimatum, les rebelles chiites mèneraient d’autres formes d’actions "légitimes", sans préciser lesquelles.
Il a appelé vendredi à converger vers le nord de capitale pour une manifestation "forte et efficace, tout en étant pacifique", prévenant que ses partisans ne "resteraient pas les bras croisés (...) si les forces armées attaquaient des manifestants".
Le président Abd Rabbo Mansour Hadi avait appelé les forces armées à redoubler de vigilance mais la présence des forces de sécurité était comme à l’ordinaire vendredi, sans renfort déployé dans l’immédiat à proximité des barrages de fortune et des tentes installées par les manifestants, a constaté un correspondant de l’AFP.
"La situation à Sanaa est explosive et pourrait donner lieu à de mauvais calculs", a estimé l’analyste April Longley Alley, spécialiste du Yémen.
"A ce stade, les rebelles d’Ansarullah exploitent une frustration généralisée (...) pour obtenir des concessions politiques", a-t-elle ajouté.
Pour tenter d’éviter une nouvelle vague de violences dans le pays engagé dans une difficile transition politique, le président Hadi a en effet tendu la main à la rébellion, qu’il a invitée au dialogue en vue de son entrée au gouvernement.
Les discussions à cet effet se poursuivaient vendredi à Saada, le bastion des rebelles dans le nord du pays, où une délégation de haut niveau a été dépêchée auprès d’Abdel Malek al-Houthi.
Ce dernier, s’estimant satisfait de "la compréhension (des émissaires) à l’égard de certaines de nos demandes", a cependant affirmé dans un discours jeudi soir que les négociations et manifestations allaient continuer en l’absence "d’une réponse claire et suffisante à nos demandes".
Selon le porte-parole des émissaires du président, Abdel Malek al-Mikhlafi, les discussions avec les houthis se déroulent de manière "positive et rassurante".
Les pourparlers se poursuivent vendredi pour "arriver à un accord qui soit dans l’intérêt du peuple yéménite", a-t-il déclaré au site internet du ministère de la Défense, 26sep.net.
"Le meilleur scénario à ce stade serait que le président négocie un compromis politique incluant de réels changements dans le gouvernement d’unité nationale, qui est très largement impopulaire, et cela en échange du soutien des houthis à ce cabinet", a commenté Mme Alley.
Le groupe Ansarullah, qui contrôle la région de Saada, est soupçonné de vouloir élargir sa zone d’influence dans le futur Etat fédéral qui doit compter six provinces.
Les rebelles houthis —issus du zaïdisme, une branche du chiisme majoritaire dans le nord du Yémen, alors qu’à l’échelle nationale, les sunnites sont prédominants— étaient arrivés en juillet aux portes de Sanaa en prenant la ville d’Amrane, dont ils ont ensuite accepté de se retirer.
Outre la rébellion chiite, le Yémen —pays le plus pauvre de la péninsule arabique— fait face à l’agitation de séparatistes dans le Sud et à des violences endémiques provoquées par Al-Qaïda.

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