Mohamed Bar, sifflet et palmes à portée de main, est à des années
lumières des images glamour de la série américaine "Alerte à Malibu".
Mais pendant la guerre à Gaza, ce surveillant de plage passionné par son
métier est resté fidèle au poste.
"La mer est le seul endroit à Gaza où les gens peuvent respirer. Nous
sommes dans une grande prison", dit-il. "Les frontières sont fermées
nous ne pouvons pas bouger, notre vie est terrible", ajoute-t-il.
Dans son poste d’observation, sifflet et jumelles autour du cou,
chaussé de tongs, le jeune homme de 21 ans se tient prêt à intervenir.
Au loin un groupe de jeunes s’amuse dans l’eau plongeant dans les vagues.
Pendant les courtes trêves qui ont ponctué les hostilités, il a été le seul dit-il à se présenter tous les jours à son poste.
Plus de 2.100 Palestiniens, en grande majorité des civils, ont été
tués et 70 Israéliens, dont 64 soldats, pendant l’opération "Bordure
protectrice" menée par Israël du 8 juillet au 26 août pour neutraliser
les capacités militaires du Hamas au pouvoir à Gaza.
Toutes les frontières terrestres de Gaza, vers Israël et l’Egypte
sont bouclées. Le cessez-le-feu durable conclu mardi prévoit notamment
un allègement du blocus israélien et une extension de la zone de pêche.
Pour Mohamed, la mer et le sauvetage sont toute sa vie, mais depuis
trois mois, il ne perçoit plus son salaire de 190 euros que le Hamas
doit lui verser.
Le mouvement islamiste, isolé par le blocus, est désormais étranglé
financièrement car l’Egypte, devenue hostile depuis la destitution du
président islamiste Mohamed Morsi, son grand allié, par l’armée, a
détruit ses tunnels vers le Sinaï. Depuis, l’argent ne rentre plus à
Gaza et des dizaines de milliers de fonctionnaires ne perçoivent plus
aucun salaire.
Et le rêve de Mohamed de s’acheter un jet ski s’évapore tous les jours un peu plus.
Au loin, un vendeur de cerceaux parcourt la plage, des jeunes amènent
leurs chevaux se rafraîchir au soleil couchant avant de repartir au
galop dans le sable.
"Normalement, on devrait être sept maîtres nageur, mais aujourd’hui,
je suis tout seul", explique-t-il. "La guerre a tué notre été, tout le
monde a peur".
Chaque semaine, Mohammed intervient entre trois et cinq fois. La
dernière fois c’était il y a quelques jours. "J’étais sur ma moto et de
loin j’ai vu des gens qui se noyaient. Si je ne passais par là par
hasard, ils auraient pu mourir", raconte-t-il.
Sa vocation, Mohammed l’a trouvée à 16 ans. Après avoir vu son voisin
Nasser mourir, noyé, il a décidé rejoindre les sauveteurs, pour ne plus
jamais revivre ça.
Sauver des vies dans l’eau, il sait faire. Mais arrêter la guerre qui
a tué deux de ses amis et totalement détruit sa maison, ça, il n’y peut
rien.
Avec le conflit, le troisième en six ans à Gaza, il a arrêté de
donner les cours de natation qu’il dispensait trois fois par semaine dès
six heures du matin.
En contrebas, un petit groupe de femmes, leurs longs voiles noirs
couverts de grains de sable, sirotent à l’ombre un thé sucré. Aïcha, 21
ans, a perdu sa maison et elle s’inquiète pour ses deux enfants.
"Je suis stressée, déprimée et j’en ai marre. J’essaye de me changer
un peu les idées" sur la plage, dit-elle, son bébé sur les genoux.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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