La rébellion chiite au Yémen a accentué mercredi la pression sur le
gouvernement qui se dit pourtant prêt au dialogue pour désamorcer une
crise qualifiée de "dangereuse", voire d’"explosive", par des analystes.
Des milliers de membres armés de la rébellion d’Ansaruallah ont
poursuivi la fortification de leurs positions autour de la capitale
Sanaa où ils mobilisent leurs partisans pour réclamer la démission du
gouvernement, ont rapporté des correspondants de l’AFP.
Ce mouvement de protestation, également lié à une récente
augmentation des prix du carburant, a été lancé dimanche à l’appel du
chef d’Ansaruallah, Abdel Malek al-Houthi, qui a ordonné à ses partisans
de marcher sur Sanaa afin de précipiter "la chute du gouvernement qui a
échoué".
Pour tenter d’enrayer l’escalade, le président Abd Rabbo Mansour Hadi
a tendu la main à la rébellion, qu’il a invitée au dialogue en vue de
son entrée au gouvernement, a indiqué à l’AFP son conseiller, Farès
al-Saqqaf.
Selon lui, cette offre a été décidée au terme d’une réunion mercredi
matin à Sanaa, à laquelle le chef de l’Etat a convié des représentants
des partis politiques, des corps élus, des organisations de la société
civile et de l’armée, qui ont jugé "inacceptable" la nouvelle action
d’Ansarullah, a-t-il dit.
Une délégation issue de la réunion doit rencontrer jeudi Abdel Malek
al-Houthi dans son fief à Saada (nord) pour "lui remettre une lettre
(...) l’invitant au dialogue et l’incitant (...) à participer à un
gouvernement d’unité nationale", a ajouté M. Saqqaf.
Le gouvernement, mis en place après le départ en février 2012, sous
la pression de la rue, de l’ex-président Ali Abdallah Saleh, est
confronté à des difficultés économiques, accentuées par une vague de
violences attribuée à Al-Qaïda, mais aussi à la rébellion dans le nord
et à un mouvement sécessionniste dans le sud.
"La situation à Sanaa est explosive et pourrait donner lieu à de
mauvais calculs", a estimé l’analyste April Longley Alley, spécialiste
des affaires du Yémen, ajoutant que les rebelles d’Ansaruallah
"exploitent une frustration généralisée (...) pour obtenir des
concessions politiques".
La démonstration de force des rebelles témoigne cependant d’"un
marchandage politique de plus en plus dangereux" de la part de ces
insurgés qui veulent "s’imposer comme force politique dominante dans le
nord et au sein du gouvernement", a dit cette experte de l’International
Crisis Group.
Ansaruallah, qui contrôle la région de Saada, est soupçonné de
vouloir élargir sa zone d’influence dans le futur Etat fédéral qui doit
compter six provinces. Les rebelles étaient arrivés en juillet aux
portes de Sanaa en prenant la ville d’Amrane, dont ils ont ensuite
accepté de se retirer.
Mais la mobilisation rebelle apparaît peut-être plus forte cette fois.
Aux entrées nord, sud et ouest de la capitale, des rebelles
s’employaient mercredi à construire des fortifications en terre autour
de leurs campements, formés de dizaines de tentes.
Des hommes, armés de kalachnikov, tenaient des points de contrôle
autour de ces campements, survolés en matinée par des avions de l’armée
de l’air yéménite, mais en l’absence d’une présence militaire ou
policière dans leurs environs immédiats.
Le chef d’Ansaruallah a fixé aux autorités un ultimatum expirant
vendredi pour satisfaire ses revendications, faute de quoi d’autres
formes d’actions "légitimes" seront menées, a-t-il prévenu, sans
préciser lesquelles.
"Notre action est pacifique mais si nos militants sont agressés, nous
couperons la main de l’agresseur", a déclaré à l’AFP Abou Ali al-Asdi,
porte-parole des protestataires rassemblés à l’ouest de Sanaa.
"L’éviction du gouvernement est une demande populaire et nous sommes contre les corrompus de tout bord", a-t-il ajouté.
La tension est aussi vive au sud de la capitale où des centaines
d’hommes en armes ont aménagé un vaste campement à une centaine de
mètres du principal axe routier reliant Sanaa au sud du pays.
"On se donne rendez-vous samedi. Le gouvernement tombera ce jour-là",
a déclaré à l’AFP Mohamed al-Hojari, un rebelle armé, en poste aux
confins de ce campement en cours de fortification et où des véhicules
continuaient d’acheminer des protestataires.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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