Massoud Barzani, président du Kurdistan irakien, aime à vanter la
stabilité et la démocratie qui règnent dans sa région. Mais ses
adversaires sont vent debout contre le projet qu’il caresse de briguer
un troisième mandat, craignant une dérive "dictatoriale".
D’ici au 8 septembre, les 2,5 millions d’électeurs de la région
autonome, qualifiée parfois de "Suisse d’Irak" car exempte des violences
qui ensanglantent le reste du pays, doivent renouveler leurs assemblées
provinciales, leur parlement régional et élire leur président.
C’est ce dernier poste qu’entend bien conserver Massoud Barzani, 66
ans, au grand dam de ses adversaires qui crient à l’usurpation.
"Nous ne voulons pas que Barzani reste au pouvoir. Nous ne voulons
pas qu’il soit en mesure de briguer un troisième mandat", explique
Youssouf Mohammed, un des ténors de Goran, le principal parti
d’opposition de la région.
Sur le papier, le président de la région autonome a droit à seulement
deux mandats. Or Massoud Barzani a accédé au pouvoir en 2005, porté par
les élus du Parlement régional, et non par le suffrage universel, comme
c’est désormais la règle.
Son deuxième mandat, entamé en 2009, touchant à sa fin, toute la
question est de savoir si le premier compte comme un mandat à part
entière, auquel cas il devrait céder la place, ou s’il peut à nouveau
faire acte de candidature, comme le pensent ses amis.
"Nous examinons les voies légales qui permettraient au président
Barzani de se représenter", souligne Jafar Aïminki, porte-parole du
Parti démocratique du Kurdistan (PDK) de M. Barzani.
Ce dernier peut compter sur un rapport de force en sa faveur au
Parlement régional. Le PDK et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK) du
président irakien Jalal Talabani, qui font front commun, totalisent 59
des 111 sièges.
Goran Azad, l’une des rares voix discordantes au sein de l’UPK,
qualifie sans ambages la manoeuvre d’"illégale. Il n’a aucun droit de se
présenter".
Mais c’est sans compter avec la popularité de Massoud Barzani. Réélu
avec 69,6% des voix en 2009, il peut se targuer d’être à la tête d’une
oasis de calme et de relative prospérité dans un Irak qui, dix ans après
son invasion, se débat toujours avec des attentats quotidiens et une
crise politique à n’en plus finir.
La région, composée des provinces d’Erbil, Souleimaniyeh et Dohouk,
jouit d’une grande autonomie et fait de plus en plus cavalier seul dans
la conduite de ses affaires, provoquant la colère de Bagdad. Le
gouvernement irakien lui reproche notamment de signer des contrats avec
des compagnies pétrolières étrangères en se passant de l’accord du
ministère du Pétrole.
A l’échelle régionale, les plus critiques accusent l’UPK et le PDK de corruption et de népotisme.
En février, l’organisation Human Rights Watch a accusé les autorités
de museler la liberté d’expression et de maintenir des journalistes, des
opposants et des militants en détention sans inculpation.
"Les autorités régionales se rapprochent d’une dictature. Elles ne
font aucun cas des demandes des citoyens", tonne Salaheddine Bahaddine,
ancien dirigeant de l’Union islamique du Kurdistan.
Si Massoud Barzani "n’abandonne pas (ses projets), il connaîtra le
même sort que les dictatures de la région", assure-t-il dans une
référence implicite aux régimes égyptien, libyen, tunisien et yéménite,
tombés à la faveur de soulèvements.
Et pour Ahmed Mira, rédacteur en chef de l’hebdomadaire Levine, une
nouvelle candidature de M. Barzani "serait un pas en arrière pour toute
la région qui se fermerait. Comme une dictature".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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