mardi 20 décembre 2016

Israël/Palestine : La politique israélienne secouée par 40 familles sur une colline

Des colons israéliens essaient de bloquer la voiture du ministre de la Construction et du Logement Yoav Galant dans la colonie d'Amona, le 18 décembre 2016 (Afp)

Quand les haut-parleurs ont annoncé un accord sur l'avenir de la colonie d'Amona, des centaines de jeunes manifestants juifs qui promettaient de tenir la colline froide et pluvieuse de Cisjordanie occupée ont levé le camp à contrecoeur.
Les jeunes avec des boucles de cheveux longs dépassant de leurs kippas tricotées, signes distinctifs de leur appartenance à la mouvance nationaliste et religieuse, prenaient acte du dénouement d'un psychodrame de plusieurs semaines: les 40 familles de colons auxquels ils étaient venus apporter leur soutien acceptaient l'offre de relogement du gouvernement contre la promesse de ne pas résister physiquement à leur évacuation.
Les jeunes partaient sans en découdre. Les 300 habitants, tenus par une décision de la justice israélienne de déménager d'ici au 25 décembre parce qu'ils s'étaient installés sur des terres privées palestiniennes, devraient déménager sous peu. Mais leur défaite ressemble beaucoup à une victoire pour le lobby israélien de la colonisation.
La cohésion du gouvernement de Benjamin Netanyahu, confronté sur sa droite au forcing des plus ardents défenseurs de la colonisation, à commencer par les ministres du Foyer juif, a été mise à l'épreuve.
La controverse a conduit à un débat plus large sur l'avenir de la Cisjordanie et d'une solution à deux Etats, au centre des efforts pour résoudre le conflit israélo-palestinien. Cette solution paraît de plus en plus menacée.
Les nationalistes religieux au sein de la coalition gouvernementale se sont servis d'Amona pour promouvoir une loi prévoyant la légalisation de plusieurs milliers d'autres maisons de colons en Cisjordanie.
Ils ont également fait avancer leur cause à plus long terme: l'annexion par Israël de la plus grande partie de la Cisjordanie.
Pour certains analystes, cette possibilité gagne plus que jamais du terrain, notamment en raison de la prise de fonctions de Donald Trump en tant que président des Etats-Unis fin janvier.
"Je crois que nous assistons maintenant à un mouvement lent mais clair aux deux extrémités du spectre politique vers un examen sérieux de la possibilité d'annexer certains territoires" palestiniens, dit à l'AFP Yedidia Stern, du centre de recherches The Israel Democracy Institute.
Les colonies israéliennes sont considérées comme des obstacles majeurs aux efforts de paix car elles sont construites sur des terres que les Palestiniens considèrent comme faisant partie de leur futur Etat.
Toutes les colonies sont considérées comme illégales au regard du droit international, mais Israël distingue entre celles qu'il a approuvées et les colonies dites sauvages, comme Amona, établies sans l'approbation des autorités israéliennes.
En 2006, la démolition de neuf bâtiments permanents à Amona avait conduit à de violents affrontements entre colons et forces de l'ordre et Netanyahu voulait éviter la réédition de ce spectacle politiquement très préjudiciable.
Quand les résidents ont rejeté une première proposition du gouvernement mi-décembre, des centaines de jeunes nationalistes se sont installés à Amona, prêts à résister à une évacuation forcée.
Ils ont dressé des barricades à l'intérieur de la synagogue d'Amona, répandu des clous, des pierres et des poteaux sur les routes escarpées conduisant à la colonie.
"C'est Dieu qui nous a donné cette terre, nous ne pouvons pas la laisser aux Arabes", disait un de ces jeunes, répétant la revendication biblique sur ces terres. "Nous ne laisserons pas tomber sans nous battre", promettait-il sous le couvert de l'anonymat.
Au terme d'âpres négociations, les habitants ont finalement accepté dimanche une nouvelle offre, prévoyant le relogement de 24 familles sur des terres à proximité.
Le Foyer juif a profité de la querelle pour présenter un projet de loi qui légaliserait quelque 4000 maisons de colons construites sur des terres palestiniennes privées.
Le texte a été approuvé par le Parlement en première lecture et doit encore être examiné en deuxième et troisième lectures.
Le procureur général Avichai Mandelblit a prévenu que le texte pourrait conduire la Cour pénale internationale à engager des poursuites contre les responsables israéliens.
Mais pour Eli Greenberg, un porte-parole des habitants d'Amona, la lutte de ces derniers a servi la cause de la colonisation.
"Nous avons réalisé l'impossible", disait-il la semaine dernière sous le porche devant son préfabriqué d'Amona, "les gens d'Amona ont fait descendre les étoiles sur terre".


(20-12-2016 )

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