Le couteau sorti d'un sac ou d'une chemise est devenu l'arme et le
symbole de la confrontation des Palestiniens contre les Israéliens, avec
un impact psychologique fort même si ces attaques n'ont fait que deux
morts jusque-là.
"Le terrorisme au couteau ne nous vaincra pas", a lancé le Premier
ministre Benjamin Netanyahu à l'ouverture d'une nouvelle session du
Parlement placée sous le signe des violences qui secouent Israël et les
Territoires palestiniens occupés depuis 12 jours.
Les images des couteaux, qu'ils soient de simples couteaux de cuisine ou
de véritables surins de combat à lame crantée -en passant par un
tournevis et même un épluche-légumes-, font depuis dix jours le tour des
réseaux sociaux et des médias israéliens et palestiniens.
Policiers et témoins présents lors des attaques ont pris l'habitude de
dégainer leur téléphone portable en quelques secondes pour filmer la
scène de l'agression et parfois l'arme utilisée, encore ensanglantée.
"Il s'agit d'un objet du quotidien que tout le monde a chez soi ou qui
est disponible partout, qui ne demande aucun entraînement et qui est
facilement dissimulable", résume le Professeur Shaul Kimhi, psychologue
et spécialiste des situations de stress et de résilience liée au
"terrorisme".
"Une attaque au couteau n'a pas pour fonction première de tuer mais
d'abord de faire peur et le but est atteint. Les Israéliens sentent le
danger même s'il n'est pas proportionnel à la menace", ajoute-il.
Depuis le 3 octobre, 18 attaques ou tentatives d'attaques à l'arme
blanche ont été perpétrées, dans la quasi-totalité par des Palestiniens
hommes ou femmes. Loin des bains de sang causés par les attentats à la
bombe de la deuxième Intifada, elles ont tué deux Israéliens. Neuf
agresseurs ont été abattus. L'un des agresseurs blessés lundi à
Jérusalem-Est avait 13 ans.
Les Israéliens sont habitués à développer des solutions techniques pour
faire face aux menaces, comme le bouclier anti-missiles Dôme de fer
contre les roquettes. Ils sont pris de court par ce mode opératoire qui
n'est pas nouveau, mais s'emploie à un rythme inédit.
"Nous avons à faire à des individus qui utilisent la plus basique des
armes de terrorisme qui existe, et on ne peut pas faire la chasse aux
couteaux. Il n'existe donc aucune réponse sécuritaire à cette crise",
dit à l'AFP Miri Eisin, ancienne colonel du renseignement militaire
israélien.
A la télévision israélienne, des spécialistes de l'autodéfense sont invités en plateau pour montrer des parades spécifiques.
"Le plus important, c'est de créer une 'zone stérile', d'éloigner le
couteau le plus loin possible de votre corps, par exemple avec cette clé
de bras", explique en direct un intervenant en tordant le poignet de
celui qui simule son agresseur.
Les services de secours du Magen David Adom ont, eux, diffusé un
tutoriel (une vidéo pédagogique) pour apprendre au public les gestes qui
sauvent. Ils rappellent qu'il ne faut pas toucher à la lame enfoncée
dans la victime pour ne pas aggraver l'hémorragie.
Sur les réseaux sociaux palestiniens, certains parlent d'une "Intifada
des couteaux" et le chef du Hamas à Gaza, Ismaïl Haniyeh, a salué "les
héros au couteau" dans un prêche.
L'usage du couteau est à l'image d'un mouvement spontané de jeunes qui
ont répudié leurs dirigeants. Le désespoir apparent de ceux qui
manipulent l'arme blanche et doivent bien imaginer qu'ils vont au-devant
de la mort reflète celui d'une grande part de cette génération.
Mohammad Halabi, 19 ans, se disait prêt à mourir sur sa page Facebook au
nom d'une "troisième intifada" avant de tuer deux Israéliens à coups de
couteau dans la Vieille ville de Jérusalem et d'être ensuite abattu.
"Hé les occupants! Avec un couteau, pas de sirène d'alarme pour vous prévenir", écrit un internaute palestinien.
En réponse, c'est aussi sur les réseaux sociaux que les Israéliens
exorcisent la peur en maniant l'humour noir. Comme sur la photo de cet
homme affublé d'une armure artisanale, le visage crispé sur le pas de sa
porte avec pour légende: "Chérie je sors juste les poubelles et je
reviens".
En revanche, les Israéliens ont été choqués de voir passer à Tel-Aviv la
semaine dernière un couteau de 3 mètres de long enfoncé dans une
réplique géante de tomate rougeoyante, le tout juché sur la plateforme
d'un camion.
Il s'agissait d'une campagne publicitaire du coutelier Arcos. Aux
premières plaintes du public, il a remisé son camion et présenté ses
excuses en assurant qu'il s'agissait d'un timing malencontreux et qu'il
n'avait en aucun cas "songé à faire une exploitation cynique de cette
situation si triste".
(12-10-2015
- Assawra)
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