dimanche 18 octobre 2015

Israël/Palestine : Pour le père d'un assaillant palestinien, "l'occupation" l'a poussé à tuer

Bahaa Aliane organisait l'an dernier une grande chaîne de lecture autour des remparts de Jérusalem et se déguisait en clown pour les enfants. Mardi, ce Palestinien a tué deux Israéliens. Pour son père, c'est "la violence de l'occupation" qui l'a transformé.
Armés de couteaux et d'armes à feu, Bahaa Aliane et Bilal Ghanem, ont semé la terreur dans un bus israélien, tuant deux passagers et en blessant une dizaine dans un des incidents les plus meurtriers depuis le début de la vague d'attaques palestiniennes contre des Israéliens.
Aliane a été tué par la police, Ghanem blessé.
A 22 ans, Bahaa Aliane "était un artiste, plein d'énergie et non violent", assurent des Palestiniens dans des messages sur sa page Facebook.
"Pourquoi ?", s'interrogent des dizaines d'internautes et ceux qui l'ont connu.
Pour son père Mohammed, il y a "la violence de l'occupation" israélienne et "la faiblesse des dirigeants palestiniens, comme disait Bahaa".
Il y a aussi "ce qui se passe à Al-Aqsa", sur l'Esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est, un lieu sacré pour les musulmans et pour les juifs, où les Palestiniens dénoncent des "provocations" et des "attaques" israéliennes et où les visites de fidèles juifs sont en recrudescence.
Mais il y a surtout "la vidéo du jeune Ahmed Manasra, gisant à terre, alors que des gens réclament sa mort sous un flot d'insultes", explique Mohammed.
Sur les réseaux sociaux, les images de forces israéliennes tirant sur des assaillants palestiniens, dont cet adolescent de 13 ans blessé par balles après qu'il a tenté de poignarder deux juifs, alimentent la colère des Palestiniens qui estiment la réaction disproportionnée.
La plupart des attaques récentes semblent être le fait de "loups solitaires", non affiliés à des groupes armés.


 - 'Sous la terre de Palestine' -
Bahaa Aliane vivait avec ses parents dans le quartier palestinien de Jabal Moukabber, perché à flanc de coteau sur les hauteurs de Jérusalem-Est, la partie palestinienne occupée et annexée par Israël de la Ville sainte.
Ces derniers jours, en réponse aux attaques, les autorités israéliennes ont bouclé le quartier, bloquant les accès avec des blocs de béton et installant des barrages filtrant.
Elles considèrent Jabel Moukkaber comme une zone de non-droit d'où sont originaires nombre d'auteurs d'attaques meurtrières anti-israéliennes ces dernières années.
Dans ce quartier, trois nouvelles tentes de deuil ont été installées par des familles auxquelles les autorités israéliennes refusent de rendre le corps de leur proche, des assaillants abattus lors d'attaques anti-israéliennes.
L'une d'elles est dédiée à Bahaa Aliane.
"Je respecte la décision de mon fils", dit son père Mohamed. "Si les autorités israéliennes décident de ne pas nous rendre son corps et de l'enterrer ailleurs, je sais qu'il reposera sous la terre de Palestine".
Des Palestiniens accusent Israël d'enterrer dans des cimetières secrets en Israël et dans les Territoires occupés les corps d'assaillants non rendus à leurs proches.

- 'Ni solution, ni avenir' -
A Jabel Moukkaber, une autre tente est dédiée à Alaa Abou Jamal, qui a été tué après avoir foncé sur un abri d'autobus du centre de Jérusalem avec sa voiture, renversant un rabbin et l'achevant à coups de couteau. Bahaa Aliane et lui ont agi à quelques minutes d'intervalle, sans que la police n'ait pu établir si ces attaques étaient coordonnées.
La troisième tente a été érigée pour Moustafa Khatib, 18 ans, tué par la police après avoir tenté de poignarder un policier lundi dans la Vieille ville de Jérusalem, une version des faits contestée par ses parents.
Pour la communauté internationale, la poursuite de la colonisation constitue le principal obstacle à la paix mais le Premier ministre israélien réfute cet argument. Pour Benjamin Netanyahu, l'impasse dans laquelle se trouve le processus de paix n'est pas non plus à l'origine de la spirale de violences.
"Ils (les Palestiniens) nous attaquent non pas parce qu'ils veulent ou non la paix mais parce qu'ils ne veulent pas de nous ici", estime-t-il.
Pour le chercheur israélien Udi Dekel, ces violences viennent en fait du sentiment d'impuissance des jeunes Palestiniens. "Ils ne peuvent envisager une solution ou un avenir et n'ont pas de structures familiales ou éducatives pour les recadrer", dit-il à la radio publique israélienne.


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