Des vols de reconnaissance de l'aviation française seront menés à partir
de mardi au-dessus de la Syrie pour y mener des "frappes" contre
l'organisation Etat islamique (EI), a annoncé lundi le président
François Hollande.
"J'ai demandé au ministre de la Défense que dès demain puissent être
menés des vols de reconnaissance au-dessus de la Syrie. Ils permettront
d'envisager des frappes contre Daech, en préservant notre autonomie
d'action et de décision", a déclaré M. Hollande au cours d'une
conférence de presse.
Cette décision s'appliquera de manière autonome sans que la France ne se
joigne à la coalition agissant en Syrie sous la direction de
Washington, a laissé entendre le chef de l'Etat.
L'organisation Etat islamique (EI, Daech) "est en Irak et en Syrie.
C'est Daech qui fait fuir, par les massacres qu'il commet, des milliers
de familles", a souligné le président français, alors que l'Europe fait
face à un afflux historique de réfugiés.
Plusieurs paramètres sont à l'origine du changement de positionnement de la France.
Lorsque la France a décidé il y a un an de s'engager dans la coalition
arabo-occidentale dirigée par Washington contre l'organisation Daech,
elle avait alors spécifié qu'elle se limiterait au territoire irakien
pour ses vols de reconnaissance et ses bombardements.
Paris avait alors expliqué qu'il mettait dans le même sac Daech et le
régime de Bashar al-Assad, accusés de centaines de milliers de morts
depuis le début de l'insurrection syrienne en mars 2011. Et pour la
France, bombarder Daech en Syrie ne pouvait servir que les intérêts du
régime syrien.
"L'efficacité de la coalition en Syrie n'est pas prouvée et la stratégie
politique n'est pas claire", soulignait un responsable français sous
couvert d'anonymat pour expliquer cette absence d'engagement français
auprès de ses alliés.
"Daech a considérablement développé son emprise depuis deux ans", a fait
valoir lundi François Hollande en justifiant le changement
d'orientation de sa politique.
Derrière les postures militaires se jouent en fait deux approches très
différentes entre les Etats-Unis et la France face à Daech.
"Pour les Etats-Unis, Daech est une crise irakienne, pour la France
c'est une crise syrienne. On a une différence d'analyse", explique un
responsable français sous couvert d'anonymat. "Les Etats-Unis ne
bombardent en Syrie que des objectifs liés à Daech en Irak. Ils n'ont
jamais frappé Daech près d'Alep, ils ne veulent pas mêler les deux
conflits", ajoute-t-il.
Un autre paramètre pouvant expliquer l'évolution de la position
française est l'engagement des pays arabes dans des bombardements en
Syrie. Dans la coalition, figurent l'Arabie Saoudite, la Jordanie, le
Qatar, Bahreïn ou les Émirats arabes unis.
En 2015, la France s'est considérablement rapprochée de plusieurs pays
arabes, via des ventes d'armes et aussi politiquement notamment avec les
pays du Golfe. Il était difficile en conséquence pour Paris de fermer
les yeux sur leur engagement qui est à double détente: contre Daech et
contre le régime de Bashar al-Assad soutenu notamment par l'Iran leur
principal rival dans la région.
Mais surtout pour la France, l'objectif est d'essayer d'atténuer la
menace de nouveaux attentats sur son sol. Les attaques meurtrières
contre Charlie Hebdo, une policière et un magasin casher en janvier,
celle commise fin août dans un train Thalys, les attentats avortés comme
celui contre une église dans la banlieue parisienne, ont tous un lien
avec le jihadisme et certains ont été revendiqués par Daech.
"La France face au terrorisme a toujours pris ses responsabilités", a
martelé lundi le président français. "Et c'est depuis la Syrie, nous en
avons la preuve, que sont organisées des attaques contre plusieurs pays,
et notamment le nôtre".
"Pour nous, la Syrie a un rôle central pour notre sécurité à cause des
centaines de combattants français recensés dans le conflit", renchérit
un diplomate sous couvert d'anonymat.
Dans la classe politique et l'opinion publique, le changement de positionnement de la France bénéficie d'un large soutien.
Il est justifié, jugeait ainsi lundi le quotidien régional Sud-Ouest.
"Les auteurs et commanditaires des attentats aveugles commis dans
l'Hexagone ont pour point commun d'avoir pour base arrière la Syrie : il
serait d'autant plus cohérent d'y frapper que le califat autoproclamé
ignore superbement les frontières classiques", note un éditorial du
journal.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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