mardi 4 mars 2014

Libye : la transition démocratique de plus en plus incertaine

Les autorités libyennes, de plus en plus affaiblies, tentaient lundi d’éviter le pire, au lendemain de l’assassinat d’un ingénieur français et de manifestations violentes au Parlement, quelques jours avant une Conférence internationale à Rome sur la Libye.
Le gouvernement a annoncé avoir dépêché dimanche soir une délégation ministérielle à Benghazi (est), pour examiner les moyens de rétablir l’ordre dans cette ville où les forces de l’ordre et les expatriés sont la cible d’attaques et d’assassinats quasi-quotidiens.
Lundi encore, deux membres des services de sécurité ont été tués par balles dans le centre de la ville, selon des sources hospitalière et de sécurité. Dimanche, un Français qui travaillait pour une compagnie française a été tué par balle dans le centre de la ville.
En outre, selon des sources islamistes à Benghazi, quatre corps retrouvés dimanche en périphérie de la ville ont été identifiés comme ceux de membres de groupes islamistes, dont Ansar Ashariaa, considérée comme organisation terroriste par Washington.
A Tripoli, des dizaines de manifestants ont envahi dimanche soir les locaux du Congrès général national (CGN), plus haute autorité politique de Libye, dans le centre de la capitale, saccageant les lieux et agressant des députés, dont deux ont été touchés par balles.
Les protestataires réclamaient la dissolution du Congrès, estimant qu’il avait échoué à rétablir l’ordre dans le pays.
Le CGN, issu des premières élections libres du pays en juillet 2012, a provoqué la colère d’une grande partie de la population en décidant de prolonger jusqu’en décembre 2014 son mandat, qui devait expirer début février.
"Je vous assure que nous sommes déterminés (...) à poursuivre le processus démocratique", a déclaré le président du CGN, Nouri Abou Sahmein, dans un discours diffusé lundi, dénonçant une "agression flagrante contre le siège de la souveraineté légitime".
Lundi, des groupes d’ex-rebelles appuyés par des pick-up équipés de canons anti-aériens étaient postés autour des locaux du CGN, a constaté un photographe de l’AFP.
Pour des raisons de sécurité, le Congrès s’est réuni lundi dans un luxueux hôtel de la capitale pour débattre des incidents de la veille, a-t-on appris auprès de députés.
La Mission de l’ONU en Libye (Unsmil) a "condamné fermement l’attaque contre le CGN", soulignant "l’importance du respect des institutions légitimes" et appelant à la "poursuite du processus politique visant à parvenir à une passation démocratique du pouvoir et à préserver la sécurité et la stabilité".
Cette escalade de violence intervient à quelques jours d’une conférence internationale sur la Libye jeudi à Rome, où les puissances occidentales devraient examiner les moyens d’aider le pays à sortir du chaos.
Lors de cette conférence, Tripoli tentera de "mobiliser un soutien international en faveur de la Libye en cette étape critique", a déclaré lundi la vice-ministre des Affaiers étrangères, Wafa Abou Kikis.
Dans son discours, M. Abou Sahmein a expliqué que le CGN examinait une feuille de route permettant une "passation du pouvoir le plus rapidement possible" à un nouveau corps élu, ce qui semble compliqué dans l’immédiat compte tenu des violences et des tensions.
"Avant de songer à des élections, il faut mettre fin aux tensions politiques et rétablir la sécurité", a ainsi insisté président de la Commission électorale, Nouri al-Abbar, qui a présenté dimanche sa démission au Congrès.
Divisés, les membres du Congrès ne sont pas parvenus jusqu’à présent à un consensus sur la nature des élections à tenir : législatives seules ou législatives et présidentielle en même temps.
Le pouvoir exécutif est lui toujours paralysé par le CGN, qui réclame la démission du Premier ministre Ali Zeidan malgré l’échec d’une motion de censure.
Alors que les autorités ne parviennent pas à former une police et une armée professionnelles et sont régulièrement la cible d’attaques, la présence de factions et groupes d’ex-rebelles rivaux ajoute un cocktail dangereux qui pourrait faire basculer le pays dans la guerre civile.

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