La tenue des élections législatives du 30 avril a beau être incertaine
après la démission de la commission électorale, les murs de Bagdad se
couvrent chaque jour de nouvelles affiches, en toute illégalité, la
campagne officielle n’ayant pas encore commencé.
Les rotatives des imprimeries tournent à plein régime pour tirer les
affiches de candidats qui ne mentionnent qu’à demi mots l’élection,
tentant de contourner l’interdiction de faire campagne avant le 1er
avril.
Les enjeux du scrutin à venir sont de taille, en particulier pour le
Premier ministre Nouri al-Maliki qui brigue un troisième mandat alors
que le pays connaît un pic de violences inédit depuis 2008 et peine à
reconstruire une économie minée par les conflits et stimuler la
production pétrolière.
La démission mardi de la commission électorale irakienne indépendante
(IHEC), chargée d’organiser le scrutin, pour protester contre des
décisions du Parlement, a plongé dans la confusion totale les
législatives. Mais elle n’a pas ralenti les rotatives.
"Nous avons imprimé des affiches et des prospectus pour une quinzaine de
candidats" jusqu’à présent, explique le propriétaire de l’imprimerie
Abu Haidar, qui ne donne que son surnom, Abu Mohammed, par peur de
perdre des clients.
Son magasin, proche de la rue Mutannabi, dans le centre historique de Bagdad, déborde de matériel de campagne.
Chaque candidat a dépensé environ 1000 dollars (725 euros), et ce n’est qu’un début, explique Abu Mohammed.
Parmi ses clients figurent aussi bien des candidats novices que des
partis établis, dont la formation de M. Maliki, l’Alliance pour l’Etat
de droit, et les listes d’Ahrar, parti lié jusqu’à peu au puissant clerc
chiite Moqtada Sadr.
"Beaucoup d’entre eux ont déjà commencé à distribuer leur matériel électoral", affirme l’imprimeur.
Avant sa démission, la commission électorale avait stipulé que la
campagne devait se dérouler du 1er au 28 avril, réclamant que toutes les
affiches soit retirées avant son lancement officiel.
Mais malgré ces mises en garde, les candidats ont poursuivi leur campagne anticipée.
Le Bloc des citoyens —anciennement appelé Conseil suprême islamique
irakien et considéré comme proche de l’Iran- a placardé de grands
panneaux interrogeant "Les citoyens veulent... ?"
Les candidats indépendants, eux, ont déployé des affiches sur lesquelles des membres de leurs tribus chantent leurs louanges.
En Irak, les candidats jouent plus sur leur appartenance ethnique ou tribal que sur des positions politiques.
L’Alliance pour l’Etat de droit a tenu à assurer sa présence, en
déployant de grands posters montrant diverses scènes comme une jeune
fille tenant un drapeau irakien ou une vieille dame embrassant un soldat
sur son casque, sans faire référence directement aux élections.
"C’est seulement pour occuper notre espace sur les panneaux", a justifié Samira al-Moussaoui, députée du bloc.
En l’absence de réelle menace, et bien que la commission électorale
continue de surveiller les préparatifs du scrutin en dépit de sa
démission, l’argent -ou plutôt le manque d’argent- est le facteur le
plus important dans la production de matériel de campagne.
Les imprimeries se montrent ainsi de plus en plus strictes avec les
candidats, ayant été échaudées l’an dernier par les élections
provinciales, à l’issue desquelles des candidats avaient refusé de les
payer, après avoir été battus lors du scrutin.
"Cette fois, nous refusons tout délai pour le paiement", souligne Abu Mohammed.
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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