Près de 700 partisans du président islamiste destitué Mohamed Morsi,
jugés pour des violences en Egypte, connaîtront leur sort le 28 avril, à
l’issue d’une unique journée d’audience mardi, comme les 529 autres
pro-Morsi condamnés à mort lundi, malgré un tollé international.
Tous ces pro-Morsi, parmi lesquels Mohammed Badie, le guide suprême des
Frères musulmans, la confrérie vieille de 85 ans qui avait remporté
toutes les élections depuis la chute du président Hosni Moubarak début
2011, sont jugés par un même tribunal pour des violences survenues le 14
août dans le gouvernorat de Minya, au sud du Caire.
Les 683 accusés jugés mardi comparaissaient pour la première fois.
M. Badie, incarcéré au Caire, n’a toutefois pas été amené devant la
cour.
Les avocats de la défense ont boycotté cette audience, dénonçant une
"mascarade" de procès, au lendemain du verdict le plus sévère rendu en
Egypte, prononcé à l’issue d’une seule audience par un juge visiblement
courroucé par une demande de récusation formulée par les avocats de la
défense.
Et la communauté internationale, déjà préoccupée par la sanglante
répression qui s’est abattue sur les partisans de M. Morsi depuis sa
destitution le 3 juillet par l’armée, a pointé du doigt "irrégularités"
et "violations" des droits des accusés, dénonçant un verdict "sans
précédent" bien au-delà des frontières du plus peuplé des pays arabes.
Cependant, seuls 153 des 529 condamnés à mort lundi sont actuellement en
détention. Les autres, en fuite, ont été jugés par contumace. Les
experts judiciaires sont unanimes : ce verdict, susceptible d’appel,
sera probablement annulé ou les peines commuées parce que le tribunal
n’a respecté ni la procédure, ni les droits les plus élémentaires de la
défense.
A l’issue de l’audience de mardi, le tribunal a fixé la date du verdict
au 28 avril. Les accusés doivent répondre de leur implication présumée
dans des violences ayant causé la mort de deux policiers dans le
gouvernorat de Minya et d’attaques contre des biens le 14 août, le jour
où soldats et policiers ont tué plus de 700 manifestants pro-Morsi au
Caire.
Les avocats de la défense ont indiqué qu’ils allaient de nouveau
demander la récusation du juge Saïd Youssef Sabry qui, selon certains
médias égyptiens, est connu pour prononcer des peines extraordinairement
lourdes même dans des affaires mineures. Selon ces derniers, il a ainsi
infligé un jour 30 ans de prison à un homme qui avait volé des robes
dans un magasin.
Son verdict intervient dans un climat extrêmement délétère depuis la
destitution de M. Morsi, alors qu’une large majorité de la population, à
l’unisson des médias quasi-unanimes, applaudit la répression
extrêmement sanglante qui s’est abattue sur les islamistes.
Plus de 1.400 manifestants pro-Morsi ont été tués en huit mois, selon
Amnesty International, et quelque 15.000 personnes ont été arrêtées,
selon des responsables de la police.
La communauté internationale s’émeut régulièrement de cette répression
implacable, mais lundi, les 529 condamnations à mort ont déclenché un
nouveau tollé.
"L’imposition en masse de la peine de mort après un procès marqué par
des irrégularités de procédure est une violation du droit international
des droits de l’Homme", a estimé le Haut-Commissariat de l’ONU aux
droits de l’Homme. "Un procès de masse de 529 personnes qui a duré deux
jours ne peut pas avoir répondu aux exigences les plus fondamentales
d’un procès équitable", a-t-il ajouté.
Les Etats-Unis se sont dits "profondément inquiets", estimant eux aussi
qu’il n’était "pas possible qu’un examen juste des preuves et des
témoignages, conformément aux normes internationales, ait pu être
effectué pour 529 accusés en deux jours de procès".
La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a pressé Le Caire
d’assurer aux accusés "le droit à un procès juste et respectant les
délais" pour la défense.
Il s’agit "du plus grand nombre de condamnations à mort simultanées que
nous ayons vu ces dernières années, pas seulement en Egypte mais dans le
monde entier", s’est ému Amnesty International, tandis que Human Rights
Watch dénonçait un procès "criblé de violations graves des procédures"
et ayant "donné lieu à des peines scandaleuses qui s’apparentent à une
grave erreur judiciaire".
Lancé le 19 décembre 2011, "Si Proche Orient" est un blog d'information internationale. Sa mission est de couvrir l’actualité du Moyen-Orient et de l'Afrique du Nord avec un certain regard et de véhiculer partout dans le monde un point de vue pouvant amener au débat. "Si Proche Orient" porte sur l’actualité internationale de cette région un regard fait de diversité des opinions, de débats contradictoires et de confrontation des points de vue.Il propose un décryptage approfondi de l’actualité .
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