Une série d’attentats visant des pèlerins dans le sud du pays et des quartiers chiites de Bagdad a fait au moins 61 morts jeudi alors que le pays traverse une grave crise politique qui a remis à vif les tensions confessionnelles.
Ces attentats sont les plus meurtriers depuis la série d’explosions du 22 décembre à Bagdad, quatre jours après le départ des derniers soldats américains du pays.
Un kamikaze a fait exploser sa bombe près de Nassiriya (sud) au milieu d’un groupe de pèlerins qui se rendaient à pied dans la ville sainte de Kerbala pour des célébrations de l’Arbaïn, un deuil religieux chiite commémorant la mort de l’imam Hussein à Kerbala.
Un médecin des services de santé de la province, Hadi Badr el-Riyahi, a avancé un bilan de "38 morts et 62 blessés".
Dans la capitale, les attentats ont visé deux quartiers chiites emblématiques : Kazimiya, où se trouve le mausolée du 7ème imam, Moussa al-Kadoum, et Sadr City, le plus grand quartier chiite de la capitale.
A Kazimiya, deux voitures piégées ont explosé vers 09H00 (06H00 GMT) à des carrefours proches. Elles ont fait au moins 14 morts et 31 blessés selon des sources aux ministères de la Défense et de l’Intérieur.
A Sadr City, une moto piégée a explosé vers 07H00 (04H00 GMT) près d’un groupe de journaliers qui attendaient qu’on vienne leur proposer du travail, faisant 7 morts et 20 blessés, selon le responsable du ministère de l’Intérieur.
Peu après, deux bombes dissimulées en bord de route ont explosé près du principal hôpital du quartier au moment où les blessés y étaient conduits, faisant deux morts et 15 blessés supplémentaires, selon la même source.
Le ministère de la Défense a confirmé un bilan de neuf morts et 35 blessés pour les explosions de Sadr City.
"Où sont les forces de sécurité ? Où sont les points de contrôle ? Comment cette voiture piégée a-t-elle pu exploser ici", tempêtait, furieux, Achour Abdoullah, un homme de 60 ans près du site des explosions à Kazimiya où s’activaient secours et forces de l’ordre.
Une femme d’une cinquantaine d’années à proximité hurlait et pleurait : "Des innocents meurent, on les tue sans raison. Que Dieu accomplisse sa vengeance sur ceux qui ont commis ces meurtres !"
Le vice-ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir Abdollahian, a condamné des attentats "visant à provoquer des affrontements inter-religieux dans ce pays important de la région".
Ces attaques interviennent en pleine crise politique entre les blocs politiques sunnites et chiites. Plusieurs responsables politiques ont exprimé ces derniers jours leur crainte de voir resurgir les terribles violences confessionnelles qui avaient fait des dizaines de milliers de morts en 2006 et 2007.
Le conflit actuel s’est déclaré lorsque le bloc parlementaire Iraqiya, soutenu par les sunnites, a entrepris à la mi-décembre de dénoncer en termes très forts les méthodes autoritaires du Premier ministre chiite, Nouri al-Maliki.
Il a été aggravé par le mandat d’arrêt pour complot lancé quelques jours plus tard à l’encontre du vice-président sunnite Tariq al-Hashemi, qui se trouve actuellement au Kurdistan irakien (nord).
"Les responsables politiques luttent entre eux pour le pouvoir et nous en payons le prix", s’est lamenté Ahmed Khalaf, un des journaliers présents sur le site des explosions à Sadr City. "Est-ce de notre faute si Hashemi est recherché, ou si d’autres personnes sont recherchées ? Pourquoi devons-nous payer à leur place ?"
A Kazimiya, un autre homme s’indignait : "Pourquoi empêchez-vous la presse et les photographes de venir sur les lieux ? Avez-vous peur que le monde voie votre échec ? Les politiques sont à l’origine de cette crise, qui se traduit par des attentats terroristes. Des innocents en paient le prix".
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