La Ligue arabe, sous pression pour saisir l’ONU sur le conflit syrien, devrait prolonger d’un mois sa mission en Syrie malgré les critiques grandissantes, la présence des observateurs n’ayant pas permis de mettre fin à dix mois d’effusion de sang.
En raison de la dégradation de la sécurité dans le pays, où la répression de la révolte populaire a fait plus de 5.400 morts depuis la mi-mars, selon l’ONU, les Etats-Unis ont indiqué envisager de fermer leur ambassade en Syrie.
Alors que la mission de la Ligue arabe est sous le feu des critiques, plus de 400 personnes étant mortes depuis son arrivée en Syrie le 26 décembre, le chef des observateurs, Mohammed Ahmed Mustafa al-Dabi, doit présenter dimanche au Caire un rapport sur la base duquel l’organisation décidera de la suite de la mission.
Selon le chef adjoint de la cellule de la Ligue arabe chargée de la mission, Ali Jarush, "tout indique que la mission d’observation en Syrie sera prolongée d’un mois car le premier mois n’a pas suffi, puisqu’il a été en partie consacré aux préparatifs logistiques".
Un autre responsable a indiqué à l’AFP sous couvert de l’anonymat que "le nombre d’observateurs serait porté à quelque 300", soit quasiment le double du chiffre actuel.
"De nombreux pays arabes ont rejeté l’idée d’envoyer des troupes arabes en Syrie", comme l’avait proposé l’émir du Qatar Hamad Ben Khalifa Al Thani, a-t-il ajouté. Damas a également rejeté cette idée, accusant même le Qatar d’"armer les gangs terroristes" en Syrie.
Après plus de dix mois de violences, plusieurs mouvements d’opposition ont réclamé une saisine de l’ONU, allant dans le sens des demandes occidentales. Le chef du Conseil national syrien (CNS), le plus important groupe de l’opposition, Burhan Ghalioun, était présent au Caire samedi pour tenter de faire pression sur la Ligue arabe.
Il doit rencontrer le secrétaire général de la Ligue, Nabil al-Arabi, et lui demander "le transfert du dossier syrien au Conseil de sécurité", a déclaré le porte-parole du CNS, Mohammed Sermini, à l’AFP au Caire.
Burhan Ghalioun doit aussi exprimer les craintes du CNS que le rapport des observateurs ne reflète pas la situation réelle en Syrie, "où le régime commet un génocide et des crimes contre l’humanité", a ajouté Sermini.
"Le rapport devrait faire une différence claire entre la victime et le bourreau", a-t-il dit, en déplorant que le rapport, selon des "fuites", indique que les observateurs sont dans l’incapacité de déterminer qui commet les tueries dans le pays.
Sermini a indiqué que le CNS "préparait un contre-rapport".
Au Caire, le grand imam d’Al-Azhar, principale institution de l’islam sunnite, a appelé les dirigeants arabes "à prendre des mesures sérieuses et immédiates" pour que les violences cessent.
Les observateurs ont été déployés après l’accord donné par Damas à un protocole régissant leur mission, qui prévoit un arrêt des violences, le retrait des chars des villes et le déplacement libre des médias étrangers. Mais aucune de ces trois clauses n’a été respectée.
L’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW) a estimé que "la Ligue arabe devrait publiquement reconnaître que la Syrie n’a pas respecté le plan de la Ligue" et exhorter le Conseil de sécurité à imposer des sanctions sur Damas pour stopper les violences.
Sur le terrain, huit civils ont encore été tués par balles vendredi : un à Douma et un à Damir, dans la banlieue de Damas, trois à Homs (centre), deux dans la province de Deir Ezzor (est) et un à Khan Cheikhoun dans le gouvernorat d’Idleb (nord-ouest), selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).
Dans cette même région, les services de sécurité ont remis les corps de six personnes, disparues depuis deux jours, à leurs proches, tandis qu’à Hama (centre), un civil a succombé après avoir été blessé la veille, d’après la même source.
A Deraa (sud), un membre des forces de sécurité a été tué.
Dans ce contexte tendu, les Etats-Unis envisagent de fermer leur ambassade. "Nous sommes vraiment inquiets quant à la dégradation de la sécurité à Damas —notamment après la récente augmentation des (attentats) à la voiture piégée— et quant à la sécurité de notre personnel diplomatique", a indiqué le département d’Etat.
"Nous avons aussi dit au gouvernement syrien que, faute de mesures concrètes au cours des prochains jours, nous n’aurions d’autre choix que de fermer la mission", a-t-il ajouté, tout en précisant "qu’aucune décision n’a(vait) encore été prise".
Un attentat suicide, imputé par les autorités à des "terroristes" et par des opposants au régime, avait fait 26 morts le 6 janvier dans un quartier historique du centre de Damas. Le 23 décembre, un double attentat à la voiture piégée avait fait 44 morts et 150 blessés dans la capitale.
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